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Redressement fiscal de 13 milliards d'euros: Dublin et Apple font appel

Apple emploie 5.500 personnes à Cork.

Apple emploie 5.500 personnes à Cork. - AFP - Paul Faith

Il s'agit du plus important redressement fiscal jamais infligé par Bruxelles. Pour le Trésor américain, cette décision de l'Union européenne pourrait menacer les investissements étrangers en Europe. Même son de cloche du côté de la Maison Blanche.

La Commission européenne a frappé un grand coup ce mardi 30 août contre les "avantages fiscaux" accordés par l'Irlande à Apple, en ordonnant au géant américain de rembourser à Dublin plus de 13 milliards d'euros, soit plus de 2.800 euros par habitant. Du jamais vu.

Apple a immédiatement annoncé son intention de faire appel contre la décision de la Commission européenne. Le groupe a également prévenu que cette décision "aura un effet profond et néfaste sur l'investissement et la création d'emplois en Europe". Allant dans le même sens, le Trésor américain a averti que la décision de l'UE pourrait menacer les investissements étrangers en Europe. De son côté, la Maison Blanche met en garde contre l'approche "unilatérale" de l'UE.

Le gouvernement irlandais, de son coté, a annoncé préparer un appel. "Je suis en profond désaccord avec la décision de la Commission", a déclaré le ministre des Finances irlandais, Michael Noonan, cité dans un communiqué du gouvernement.

"Pratique illégale"

Ce qui est reproché à Apple et l'Irlande? "Les États membres ne peuvent accorder des avantages fiscaux à certaines entreprises triées sur le volet. Cette pratique est illégale au regard des règles de l'UE en matière d'aides d'État", explique Margrethe Vestager, la commissaire chargée de la politique de concurrence. En clair, l'Irlande est sommée de récupérer les impôts qu'elle aurait dû exiger d'Apple.

La Commission européenne a menée une enquête pendant deux ans au terme de laquelle elle a conclu que "l'Irlande avait accordé des avantages fiscaux illégaux à Apple, ce qui a permis à cette dernière de payer nettement moins d'impôts que les autres sociétés pendant de nombreuses années." Un traitement de faveur particulièrement avantageux puisque, selon la commissaire chargée de la politique de concurrence, le taux d'imposition sur les sociétés appliqué à Apple est passé de 1% sur ses bénéfices européens en 2003 à 0,005% en 2014. 

Un échange de bons procédés entre Apple et Dublin

Apple aurait usé et abusé de ce régime de rêve, en rapatriant l'ensemble de ses bénéfices mondiaux en Irlande. Un vrai paradis fiscal personnalisé. En échange, le géant californien garantissait à la république irlandaise de maintenir les emplois à Cork, deuxième plus grande ville du pays, où le groupe héberge quasiment le quart de ses effectifs européens, soit 5.500 postes.

Un échange de bons procédés contraire aux règles de l'Union européenne en matière d'aides d'État, dans la mesure où il a conféré à Apple un avantage significatif par rapport aux autres sociétés soumises aux règles nationales d'imposition.

Mais pourquoi 13 milliards d'euros? La réponse est fournie dans le communiqué officiel de l'UE: "la Commission peut ordonner qu'une aide d'État perçue illégalement soit récupérée sur une période de dix ans précédant la première demande de renseignements, 2013 en l'occurrence. L'Irlande doit maintenant récupérer les impôts impayés par Apple sur son territoire entre 2003 et 2014, à savoir 13 milliards d'euros, plus les intérêts."

Et même si elle a fait appel de l'injonction qui lui est faite, l'Irlande va devoir exiger d'Apple qu'il lui transfère cette somme, comme le précise d'ailleurs la commission européenne dans son communiqué: "Si un État membre décide d'introduire un recours contre une décision de la Commission, il doit quand même récupérer l'aide d'État illégale mais pourrait, par exemple, placer le montant récupéré sur un compte de garantie bloqué en attendant l'issue de la procédure devant la juridiction de l'UE."

A la Bourse de New York, l'action d'Apple ne souffrait pas trop de ce sévère redressement fiscal. Le titre, côté sur le Nasdaq, perdait moins de 1% à l'ouverture.

Antoine Larigaudrie, A.R. avec AFP