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Transports

La SNCF ne sera plus seule sur les lignes TGV

La SNCF va devoir faire face à la concurrence.

La SNCF va devoir faire face à la concurrence. - Jean-Philippe Ksiazek - AFP

"À partir de 2020, la SNCF va devoir ouvrir ses lignes de TGV à la concurrence. Les lignes de TER et Intercités suivront juste après."

La SNCF va bientôt devoir faire face à la compétition. La société va devoir ouvrir ses lignes TGV à la concurrence à partir de 2020, puis ses lignes sous contrat de service public (TER et Intercités) à partir de 2023, conséquence d'un accord trouvé à Bruxelles. En France, le trafic ferroviaire de passagers est le monopole de la SNCF, ce qui n'est plus le cas du transport de fret ni des trains internationaux de voyageurs. D'autres pays, comme le Royaume-Uni ou la Suède ont totalement libéralisé ce secteur, ou en partie, comme l'Allemagne ou l'Italie.

L'accord informel sur le "quatrième paquet ferroviaire", entériné entre le Parlement européen et la présidence néerlandaise du Conseil intervient après sept mois de négociations laborieuses. Selon ce compromis, qui sera adopté définitivement d'ici le 1er novembre 2016, les lignes commerciales de type TGV, qui représentent 10% du trafic en France, devront être placées en "open access" à partir de 2020, c'est-à-dire que des concurrents de la SNCF auront le droit d'y faire circuler librement des trains.

Appels d'offres dès fin 2017

En théorie leur ouverture interviendra le 3 décembre 2019, mais comme les opérateurs doivent réserver un an à l'avance les "sillons" (créneaux horaires pour la circulation des trains), la concurrence ne sera effective qu'en décembre 2020. Point important, les LGV françaises ne pourront pas en principe être requalifiées en contrat de service public, ce qui aurait permis de retarder leur ouverture à la concurrence. En effet, pour les lignes protégées par un contrat de service public, à savoir les TER et les TET (90% du trafic en France), les autorités organisatrices pourront procéder à des appels d'offres dès fin 2017.

Mais celles qui ne souhaitent pas libéraliser pourront continuer, sous réserve d'engagements de performance, à attribuer directement le marché à la SNCF jusqu'à fin 2023. À cette date, l'appel d'offres deviendra obligatoire et les exceptions pour y déroger seront très restrictives, même si les régions pourront de fait continuer à attribuer directement des contrats d'une durée maximale de dix ans jusqu'à la veille du jour J. Une protection a néanmoins été introduite pour les TER et TET, puisque le gendarme du rail (l'Arafer en France, NDLR) pourra intervenir si la mise en concurrence des lignes à grande vitesse affecte "substantiellement" l'équilibre économique des lignes conventionnées.

L'État a le dernier mot

Par ailleurs une disposition permettra à l'État d'avoir le dernier mot, si une région souhaitait ouvrir ses lignes à la concurrence avant 2023. Sur le plan social, les dispositions de reprise des personnels, notamment des TER, restent assez vagues, la libéralisation étant censée se faire "dans le respect des accords collectifs nationaux". Concernant la reprise potentielle par la concurrence du matériel roulant (TER) financé par des aides publiques et exploité par la SNCF, qui favoriserait la concurrence, l'incertitude subsiste aussi. Sur ce point, les autorités compétentes devront se contenter "d'évaluer les mesures nécessaires à faciliter l'accès au matériel roulant".

Enfin, la "muraille de Chine" voulue par la Commission entre les gestionnaires d'infrastructures (SNCF Réseau en France, NDLR) et les opérateurs ferroviaires apparaît sérieusement écornée, alors qu'elle devait garantir "la mise en place de conditions de concurrence équitables pour tous". Ainsi, le régulateur ne devra plus intervenir à titre préventif pour prévenir des risques de conflits d'intérêt mais seulement a posteriori. "Sur les LGV, un opérateur pourra concurrencer la SNCF sur les sillons actuels", a réagi auprès de l'AFP le député PS Gilles Savary.

"Je pense qu'on aurait pu convenir que les lignes actuelles sont le patrimoine historique du pays et qu'elles ne peuvent être 'challengées' que si l'entreprise historique les abandonne", a-t-il souligné, ajoutant qu'"il y aura peut-être des surprises car la SNCF est venue en Italie et les Italiens sont décidés à en découdre avec le Thalys". De son côté, l'opérateur Transdev (filiale de la Caisse des Dépôts et de Veolia) voit dans l'accord une réforme "édulcorée (...) par les coups portés au principe d'attribution compétitive des contrats de service public, (...) l'introduction de nombreuses exemptions, de périodes de transition plus longues, et (...) l'affaiblissement du contrôle des entreprises intégrées".

D. L. avec AFP