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La Cour des comptes pointe les lacunes de l'État "numérique"

La Cour des comptes constate que le service de télédéclaration de l'impôt sur le revenu est ouvert depuis 2003 mais que la stagnation du taux de télé-déclaration entraîne encore le traitement de 22,5 millions de déclarations et d’avis papier tous les ans.

La Cour des comptes constate que le service de télédéclaration de l'impôt sur le revenu est ouvert depuis 2003 mais que la stagnation du taux de télé-déclaration entraîne encore le traitement de 22,5 millions de déclarations et d’avis papier tous les ans. - Bertrand Guay-AFP

Pour la Cour des comptes, les services publics numériques ne jouent pas un rôle moteur dans la modernisation de l’État et de sa relation avec les usagers.

C'est peu de dire que la Cour des comptes porte un jugement nuancé sur les efforts de l'État pour développer des services numériques vers les usagers. "Les données chiffrées disponibles laissent apparaître que l’offre de services numériques par l’État souffre encore de certaines lacunes,...(...).., et que ceux qui existent sont relativement sous-utilisés" affirme un récent rapport sur le sujet des sages de la rue Cambon.

La Cour des comptes se saisit de l'exemple de télédéclaration de l'impôt sur les revenus, qui ne sera obligatoire que pour certaines catégories de contribuables en 2016. "Ce service est ouvert depuis 2003 mais la stagnation du taux de télé-déclaration entraîne encore le traitement de 22,5 millions de déclarations et d’avis papier tous les ans. L’économie potentielle générée par la généralisation du recours à la procédure dématérialisée est estimée à 78 millions d'euros. On peut noter que l’obligation de dématérialisation existe déjà pour la déclaration ou le paiement dans une douzaine de pays" expliquent les auteurs du rapport.

L'État ne se serait pas assez transformé en interne

Leur discours critique vise aussi l'État et son organisation interne. "La dématérialisation des procédures administratives modifie en profondeur l’organisation et le travail des services publics et donc à terme la gestion des ressources humaines. Cette mutation a été insuffisamment prise en compte au sein de l’État dans la formation des cadres et dans le recrutement, la gestion de carrière et l’emploi des métiers d’informaticiens". Résultat, la transformation numérique des procédures administratives apparaît plus subie que comme la source de la transformation de l'État.

Les sages ont aussi comparé la France à d'autres pays pour jauger des efforts qu'il lui reste à fournir en matière de services publics numériques. Parmi les pays étudiés par la Cour, les plus avancés en termes de services publics numériques proposent aux usagers un compte administratif personnel unique (cf encadré ci-dessous)

Vers une généralisation de la prise de rdv en ligne?

En attendant l'avènement d'un tel service, le rapport préconise pour la France des évolutions pragmatiques comme la généralisation de la prise de rendez-vous en ligne avec l'administration. "Outre le fait qu’elle permet de réguler les flux au guichet et donc de diminuer l’attente des usagers, la prise de rendez-vous en ligne apaise les relations entre usagers et agents" affirment les auteurs du rapport. De même, ceux-ci recommandent-ils la généralisation des services de suivi en ligne des dossiers et d’information des usagers par sms et courriels. 

Conscient aussi des dangers liés à la fracture sociale et numérique, le rapport exprime enfin "l’importance d’un accompagnement des usagers, en ligne ou à distance mais aussi d’un accompagnement humain dans les points d’accès aux services publics numériques, avec une attention particulière pour les publics les plus éloignés a priori de l’utilisation de ces services".

L'exemple à l'étranger du compte administratif unique

Le compte administratif personnel et unique est accessible par un identifiant et un mot de passe uniques. "Ce service permet via une boite aux lettres numérique et/ou un portail d’accès unique à l’administration, de recevoir des courriers officiels de l’administration et d’effectuer des demandes, des déclarations et des paiements" souligne les auteurs du rapport.

Il permet surtout à l’usager d’être reconnu par l’ensemble des administrations partie-prenantes. Ainsi l’administration peut s’assurer de la bonne identité de l’usager lors de la circulation de ses informations, et l’usager peut exercer un contrôle sur ses données personnelles lorsqu’elles sont échangées par voie électronique.

"Cette méthode est appliquée en Espagne avec le service Cl@ve124, au Royaume-Uni avec la plateforme numérique (GOV.UK) et au Danemark avec le portail Borger.dk. La détention de ce compte personnel numérique peut être rendue obligatoire : c’est le cas au Danemark pour les citoyens âgés de plus de 15 ans. Ce modèle est également en cours de mise en place en Allemagne" explique la Cour des comptes.

Frédéric Bergé