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Le fisc réclame 1,4 milliard d'euros à SFR

Vivendi a promis d'indemniser Numericable des conséquences de ce redressement fiscal

Vivendi a promis d'indemniser Numericable des conséquences de ce redressement fiscal - Philippe Huguen - AFP

Bercy conteste une optimisation fiscale réalisée par Vivendi en 2011 dans ses activités télécoms.

1,37 milliard d'euros: c'est la somme record que le fisc réclame à SFR. Bercy conteste des opérations d'optimisation fiscale conduites en 2011. 

Précisément, Vivendi avait fusionné en décembre 2011 ses deux filiales SFR et Vivendi Telecom International (VTI). Cette holding, filiale à 100% de Vivendi, détenait les investissements du groupe dans les télécoms hors de France (Pologne, Espagne, Kenya...), qui ont été vendus au fur et à mesure. 

Fusion à objectif fiscal

L'objectif de cette fusion était fiscal. En effet, SFR engrangeait de copieux bénéfices, tandis que VTI avait perdu beaucoup d'argent, et donc disposait d'importants déficits fiscaux (452 millions d'euros). Fusionner les deux sociétés a permis d'imputer les pertes de VTI sur les bénéfices de SFR et de réduire d'autant les bénéfices du nouvel ensemble. Selon les comptes de SFR, cette fusion a eu fiscalement "un impact de 163,2 millions d'euros" - autrement dit, elle a permis de réduire d'autant l'impôt payé. C'est cette fusion que le fisc conteste aujourd'hui.

Arguments sérieux

Mais ce n'est pas tout. Quelques mois plus tôt, en juin 2011, Vivendi était monté à 100% dans SFR en rachetant les 44% détenus par Vodafone. Ainsi, Vivendi a dépassé le seuil de détention de 95% dans SFR, ce qui a permis à Vivendi et SFR de payer leur impôt ensemble -dans le jargon des fiscalistes, on dit que SFR a intégré le groupe d'intégration fiscale de Vivendi. Las! Le fisc conteste désormais cette intégration pour l'année 2011. 

Vivendi estime avoir des arguments "sérieux" pour justifier ce montage. SFR ayant été racheté l'an dernier par Numericable, Vivendi a promis à l'acquéreur de rembourser un éventuel redressement fiscal, jusqu'à une somme maximale de 711 millions d'euros.

Le coup de pouce du gouvernement Fillon

L'optimisation fiscale menée en 2011 avait nécessité l'aide du gouvernement Fillon. En effet, la revente de licences de téléphone mobile entre deux sociétés était jusqu'alors interdite. Or le montage d'optimisation fiscale impliquait que VTI rachète SFR, et rachète au passage les licences mobiles 2G et 3G de SFR. 

Le seul moyen de mettre en place ce montage était donc que le gouvernement modifie les textes sur ce point. Et c'est ce que le gouvernement Fillon a fait fort opportunément. Le 1er décembre 2011, Eric Besson, alors ministre chargé de l'Industrie, et François Baroin, son collègue à l'Economie, ont signé un arrêté ministériel autorisant la revente des fréquences 2G et 3G. Moins de deux semaines plus tard, le 12 décembre 2011, la fusion entre SFR et VTI avait lieu.

Un haut fonctionnaire se souvient: "le gouvernement a autorisé cette revente des fréquences 2G et 3G uniquement car SFR le souhaitait. Toutefois, il a fallu passer outre l'opposition du ministère du Budget, qui avait bien compris que c'était pour faire de l'optimisation fiscale". 

Jamal Henni