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Le Sénat bouscule le gouvernement sur la fin du monopole de la SNCF

Les services dits "conventionnés" (les trains TER et les trains d’équilibre du territoire ou TET), doivent être ouverts à la concurrence au plus tard le 3 décembre 2019 et les TGV dès 2021.

Les services dits "conventionnés" (les trains TER et les trains d’équilibre du territoire ou TET), doivent être ouverts à la concurrence au plus tard le 3 décembre 2019 et les TGV dès 2021. - Charles Platiau-AFP

Des sénateurs présentent déjà leur proposition de loi sur l'ouverture à la concurrence du transport de voyageurs sur rail. Celle-ci concernerait dès décembre 2019 les TER pour les régions qui le désirent et les TGV. Le transfert du personnel SNCF aux opérateurs privés désignés, se ferait avec tous leurs avantages sociaux et salariaux.

Le Sénat ne va pas attendre le gouvernement pour débattre de l'ouverture du rail français à la concurrence sur le transport de voyageurs. Alors que la ministre Élisabeth Borne mène tambour battant avec les syndicats la concertation sur la réforme de la SNCF dont elle présentera la conclusion vendredi 30 mars, le Sénat examinera, à partir du mercredi 28 mars, sa proposition de loi sur l’ouverture à la concurrence du transport de voyageurs.

Les deux auteurs du texte, les sénateurs Hervé Maurey (Les Centristes) et Louis Nègre (LR), ont présenté publiquement, ce mardi 27 mars, le document législatif qu'ils avaient déposé en septembre 2017. En bousculant ainsi le calendrier gouvernemental sur la réforme ferroviaire, les sénateurs affichent clairement leur mécontentement. Dans leur présentation, ils "considèrent qu’il n’est pas acceptable que le gouvernement, en recourant aux ordonnances, prive le Parlement d’un débat de fond sur l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs". 

Le texte des sénateurs a été validé par le Conseil d'État

Ce recours aux ordonnances, prévu par le gouvernement dans sa volonté d'accélérer les débats, commence cependant à avoir du plomb dans l'aile. "Dès vendredi, je présenterai le bilan de ces concertations", a déclaré la ministre sur France info, précisant qu'elle pourrait abandonner le recours aux ordonnances sur la question de l'ouverture à la concurrence.

En attendant, le texte de loi présenté par les sénateurs a déjà bénéficié d'un avis du conseil d'État obtenu le 22 février 2018. "Pour que l’ouverture à la concurrence soit effective à la fin de 2019, et que les acteurs puissent s’y préparer dans de bonnes conditions, nous devons adopter un texte sans tarder, et anticiper toutes les répercussions de cette libéralisation pour l’usager et pour les personnels" estiment les deux sénateurs auteurs du texte.

Leur proposition de loi acte l’ouverture à la concurrence de l’ensemble des services conventionnés (les TER en France) dès le 3 décembre 2019, comme l’impose le droit européen. Les régions pourront procéder par appel d'offres et le texte prévoit que les agents SNCF sous statut devront bénéficier du maintien de leur rémunération, de leurs droits à la retraite, de la garantie de l’emploi, et de leurs facilités de circulation. "En revanche, les règles d’organisation du travail devront être définies librement par les nouvelles entreprises" soulignent les parlementaires.

Des régions pourront tenter la concurrence dès fin 2019

Les sénateurs rappellent toutefois que ce dispositif ne se traduira que progressivement, par le jeu du renouvellement des conventions qui seront signées entre les régions et SNCF Mobilités avant le 3 décembre 2019. "En effet, une grande majorité des conventions entre les régions et SNCF Mobilités sont en cours de négociation et devraient être signées d’ici la fin 2017 ou la fin 2018. Si elles durent six à sept années comme c’est le cas en moyenne, l’ouverture effective du marché n’aura lieu qu’entre 2023 et 2025" explique-t-on au Sénat.

Une exception de taille est prévue pour les régions volontaires ayant prévu un dispositif spécifique dans leur convention avec SNCF Mobilités, comme l’a fait la région Grand Est, qui pourront ouvrir à la concurrence tout ou partie de leurs services dès le 3 décembre 2019.

Les TGV "privés" auront des obligations de desserte locale

Enfin, le texte libéralise les lignes à grande vitesse sur le principe du libre accès aux opérateurs privés ferroviaires, prévu par la directive européenne. En revanche, les sénateurs, soucieux de l'aménagement du territoire, ont prévu dans leur proposition de loi que l’État conclut avec eux des contrats de service public combinant des services rentables et des services non rentables.

Concrètement, les futurs opérateurs privés pourront transporter des voyageurs sur Paris-Bordeaux ou Paris-Marseille mais devront aussi desservir des gares moins rentables sur ces lignes. Reste à savoir si le gouvernement prendra position sur l'examen de ce texte au Sénat...

Frédéric Bergé