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Le travail d’intérêt général, ou comment développer une alternative efficace à la prison

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Considéré comme une alternative efficace et humaine à la prison, le travail d’intérêt général peine à se développer en France. Fondée en 2015, l’association Chantiers-Passerelles compte bien faire bouger les choses.

"Interpeller, mobiliser, agir", telle est la devise de l’association Chantiers-Passerelles, dont la mission est de sensibiliser, de valoriser et de développer le travail d’intérêt général. C’est au cours de ses études en école d’ingénieur que Sylvain Lhuissier s’est intéressé au domaine de la justice, et notamment au milieu carcéral en s’engageant aux côtés de l’association Genepi, qui intervient en prison auprès des personnes incarcérées. "Je me suis rendu plusieurs fois dans la maison d’arrêt de Fresnes, et à chaque fois, cela a été une sacrée claque", raconte-t-il.

"C’est là que j’ai pris conscience des incohérences du système pénal et carcéral en France, et à la sortie de mes études, j’ai eu envie d’agir sur ce sujet", poursuit-il. Avec sa nouvelle associée, Agathe Zebrowski, ils s’intéressent plus particulièrement à une alternative à l’incarcération : la peine de travail d’intérêt général (TIG). Leur constat: alors que la prison est coûteuse (près de 100 euros par jour et par détenu, et environ 26.000 euros par peine en moyenne), et qu’elle se révèle particulièrement inefficace pour prévenir la récidive (2/3 des personnes qui sortent de prison y retournent dans les cinq ans), le TIG ne coûte en moyenne que 1000 euros par peine et semble plus efficace pour empêcher la récidive (moins de 50%), selon les chiffres de l’association.

En optant pour la peine de travail d’intérêt général, la personne condamnée ne se retrouve pas enfermée dans un établissement pénitentiaire mais va travailler sans rémunération au sein d’une structure qui oeuvre dans l’intérêt collectif : municipalité, association, entreprise chargée d’une mission de service public comme la Poste ou la SNCF… Seules les personnes ayant été condamnées pour délits ou contraventions peuvent se voir proposer ce type de peine, les criminels étant bien évidemment écartés.

ou comment développer une alternative efficace à la prison
ou comment développer une alternative efficace à la prison © Chantiers-Passerelles

Développer l’utilisation du travail d’intérêt général

En lien avec le ministère de la Justice, les services pénitentiaires d’insertion et de probation et les missions locales, Chantiers-Passerelles a ainsi pour ambition de développer l’utilisation du travail d’intérêt général, en favorisant la création de missions d’intérêt général, et en sensibilisant les acteurs intervenant dans le domaine de la justice mais aussi le grand public à cette question, pour faire de cette sanction une opportunité d’insertion sociale et professionnelle.

Pour ce faire, plusieurs axes de travail ont été développés depuis la création de l’association en 2015: la mise en place de "dispositifs passerelles", qui correspondent à des stages proposés dans le cadre du TIG et qui portent notamment sur la confiance en soi, l’orientation professionnelle et l’insertion. Une personne condamnée à 150 heures de travail d’intérêt général réalisera ainsi, par exemple, 120 heures de TIG classique et 30 heures de stages encadrés par l’association.

Le but est d’orienter ces personnes vers des parcours d’insertion de plus longue durée pour qu’elles puissent pérenniser leur projet professionnel et réussir ensuite leur entrée ou leur retour sur le marché du travail. Depuis le lancement de ce dispositif en octobre 2015, vingt personnes condamnées à des peines de travail d’intérêt général ont suivi les ateliers proposés par Chantiers-Passerelles.

Un tour de France du travail d’intérêt général

Autre mission de l’association: l’animation d’un forum du travail d’intérêt général, notamment financé par une bourse de 25 000 euros de la Fabrique Aviva décrochée par l’association en 2016. Ce réseau national, lancé en septembre 2016, est à la fois une plateforme web et un organisme de formation qui rassemble de nombreux acteurs engagés sur le travail d’intérêt général. L’idée est de faire connaître et valoriser leur engagement, de leur proposer des outils et des formations adaptés, notamment pour former les personnes encadrant celles et ceux qui exécutent des peines de TIG au sein de leur structure.

Dans ce cadre, l’association organisera en octobre-novembre 2017 un "tour de France du travail d’intérêt général" avec une quinzaine d’étapes prévues. Enfin, et c’est leur troisième axe de travail, Chantiers-Passerelles se mobilise pour sensibiliser le grand public à travers l’organisation de nombreux cafés-débats qui permettent de développer les connaissances des citoyens sur ce sujet et de lever de nombreux préjugés.

Aujourd’hui cantonnés à la ville de Lyon, ces événements ont vocation à s’étendre partout en France avec le développement d’un réseau de bénévoles pour les animer. Ce projet tient particulièrement à cœur à Sylvain Lhuissier qui souhaite profondément "contribuer à un changement de société pour aller vers une société qui vit mieux ensemble".

En 2016, Chantiers-Passerelles a bénéficié d’une aide de 25 000 euros de la part de La Fabrique Aviva, dans la catégorie "Soutenir l’emploi". Pour découvrir les projets déposés cette année et soutenir l’un ou plusieurs d’entre eux, inscrivez-vous sur :
www.aviva.fr/lafabrique

> Pour en savoir plus sur La Fabrique Aviva

> Découvrez la liste complète des grands gagnants de l’édition 2016

Mélanie Rostagnat