BFM Business
Vie de bureau

Les effets d'un dimanche travaillé sont difficiles à compenser

Les moments passés entre un père et ses enfants sont réduits de 92% quand il travaille le dimanche.

Les moments passés entre un père et ses enfants sont réduits de 92% quand il travaille le dimanche. - Pezibar - CC

Le dimanche est traditionnellement consacré aux loisirs, à la famille et aux amis. Pour ceux qui sont amenés à travailler ce jour-là, avoir un jour de repos en semaine ne permet pas d'avoir ces mêmes moments de partage.

Un salaire doublé, la prise en charge des frais de garde des enfants, le remboursement des frais de taxi, voici quelques-unes des compensations obtenues par les salariés dans le cadre des accords de branche permettant le travail dominical. Mais ces avantages ne compensent pas tout. Selon une étude publiée dans la revue Économie et Statistique de l'Insee, travailler le dimanche entraîne une perte de sociabilité familiale et amicale que ne peut remplacer aucun jour de repos en semaine. Un enjeu social "souvent occulté dans les débats relatifs à l'extension du travail dominical", selon ses auteurs, auteurs Jean-Yves Boulin et Laurent Lesnard.

Leur étude ne portait pas sur l'impact du travail le dimanche à proprement parler, mais elle permet de "comparer les usages du temps de ceux qui travaillent le dimanche et de ceux qui ne travaillent pas ce jour-là", a expliqué Laurent Lesnard. Les deux chercheurs se sont appuyés pour leur étude sur l'enquête Emploi du temps menée par l'Institut de la statistique en 2009 et 2010, confirmant que le dimanche est "avant tout le jour des loisirs", avec en moyenne une durée des heures récréatives plus que doublée par rapport à un jour de semaine.

Moins de temps accordés aux enfants

Le dimanche, jour sans travail et sans école, est aussi et surtout plus propice aux moments de partage en famille et avec les amis. "Il permet de synchroniser les rythmes de l'ensemble de la société", souligne Laurent Lesnard. De ce fait, le travail dominical a des conséquences plus importantes que le travail en semaine, notamment sur les temps familiaux. Selon les calculs des deux chercheurs, la perte de sociabilité parents-enfants, "toutes choses égales par ailleurs", est ce jour-là "quasiment multipliée par deux" (+43%). Les temps spécifiques mère-enfants et père-enfants sont aussi plus impactés, (-69% et -92% respectivement). Or, "le temps passé ensemble en famille est l'un des piliers du lien familial contemporain", soulignent les auteurs.

Les loisirs avec les amis, deux fois plus conséquents le dimanche qu'un jour de semaine non travaillé (83 minutes contre 42), se réduisent aussi: un quart d'heure (-82%) quand le dimanche est travaillé.

Un jour de repos en semaine compense-t-il cette perte de sociabilité? Pas entièrement, selon l'étude. "Une partie des temps de sociabilité parents-enfants et amicale récréative perdus les dimanches ne sont pas récupérés pendant la semaine et correspondent à des pertes nettes pour les travailleurs dominicaux", selon les chercheurs. Les temps parents-enfants sont les plus affectés, avec une perte nette de presque 40 minutes, tandis que la sociabilité amicale se creuse de 25 minutes.

Les salariés peu qualifiés sont les plus exposés 

L'étude relève enfin que, de manière générale, le travail dominical "s'inscrit dans des rythmes hebdomadaires atypiques", allant de pair avec des "semaines décalées la nuit" (avec du travail de nuit), "fragmentées" (avec des coupures en journée entre des périodes de travail) et "décalées en soirée".

Des horaires qui sont "assumés principalement par des salariés peu qualifiés de l'industrie et des services", dont le risque d'exposition au chômage est "particulièrement élevé", notent les auteurs. Ils y voient un "correctif" à l'explication qui voudrait que "seuls les salariés pour qui de tels horaires de travail ne posent pas problème acceptent ces emplois". Le travail dominical concerne près de trois salariés sur dix en France.

C.C. avec AFP