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Les chantiers qui attendent le nouveau patron de Volkswagen

Matthias Müller, actuel patron de Porsche a été nommé ce vendredi pour remplacer Martin Winterkorn, parti suite au scandale. Il prend ses fonctions immédiatement, et a du pain sur la planche.

Au terme d'une journée de réunion, le conseil de surveillance du leader mondial de l'automobile a nommé un successeur à Martin Winterkorn, dont la prise de fonction. Une pile de chantiers attend le nouveau patron de Volkswagen, Matthias Müller, parmi lesquels la gestion du scandale des moteurs truqués est le plus brûlant, mais pas le seul, et de loin, entre faiblesse de la Chine et la décentralisation des structures.

C'est "une tâche herculéenne" qui attend le nouvel homme fort, jugeait le tabloïd Bild. Pour cet homme de 62 ans issu du sérail, puisqu'il a fait pratiquement toute sa carrière chez Audi et dirigeait depuis 2010 la filiale Porsche, la priorité sera d'abord de "réparer les dégâts", estime Ferdinand Dudenhöffer, expert automobile allemand. C'est-à-dire de faire la lumière sur le pourquoi et le comment d'une tricherie gigantesque, en gérer les conséquences judiciaires et financières, et restaurer l'image sérieusement mise à mal du groupe. Pour rappel, Volkswagen a admis avoir implanté sur 11 millions de voitures un logiciel capable de fausser les résultats des tests antipollution.

"Nous pouvons et nous allons surmonter cette crise", a asséné vendredi le nouveau patron, juste après sa désignation par le conseil de surveillance. Promettant même que Volkswagen allait sortir "plus fort" de ce que le président du conseil de surveillance Berthold Huber a qualifié de "désastre moral".

Une communication à revoir

Volkswagen est un groupe de superlatifs, avec 10 millions de voitures produites par an, douze marques de véhicules (Porsche, Audi, Seat...), camions et motos (Ducati), 590.000 salariés et 200 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel.

Première urgence pour ce colosse, selon Ferdinand Dudenhöffer: mieux communiquer, alors que gouvernements, associations de consommateurs et ONG accusent le groupe de ne révéler la vérité que "par à-coups", comme le formule Greenpeace.

Les actionnaires, qui ont vu leur investissement perdre un tiers de sa valeur cette semaine, ont besoin d'être rassurés aussi. Parmi eux d'ailleurs l'Etat, sous forme du Land allemand de Basse-Saxe. Restaurer la confiance des clients, priorité numéro un martelée vendredi par les membres du conseil de surveillance, sera une tâche titanesque, maintenant que le groupe a été pris en flagrant délit de mensonge.

Sa stratégie américain avortée

Interrogée à une station-service à Los Angeles, Marivi Badin, propriétaire d'une Golf diesel, raconte l'avoir achetée pour sa faible consommation et "parce qu'elle était propre". "Et maintenant on découvre que tout cela était une farce", se désole-t-elle.

Même avant le scandale, le marché américain donnait du fil à retordre à Volkswagen, qui y a pourtant investi de grosses sommes. Pour s'attirer les faveurs des clients américains, le groupe avait tout misé sur le "diesel propre", et cette stratégie vient de s'écrouler comme un château de cartes.

Autre vaste dossier, la Chine, où, pour la première fois depuis dix ans, les ventes de Volkswagen ont décliné au premier semestre. Pendant des années, l'appétit des Chinois aisés pour les Audi et des classes moyennes pour les VW Jetta a semblé insatiable, faisant du pays le premier marché du groupe, devant l'Allemagne. La perspective d'un ralentissement de la croissance chinoise est un sérieux nuage à l'horizon de Volkswagen. Maigre consolation: les Chinois ne sont pas clients des modèles diesel tombés en disgrâce.

VW en retard dans la bataille de l'électrique

Parmi les défis du groupe figure aussi l'électrique auquel Volkswagen, comme ses confrères allemands, a été lent à se mettre, venant d'un pays attaché à la puissance de ses moteurs. Audi vient de présenter au salon de l'auto de Francfort, qui s'achève dimanche, un prototype de 4x4 urbain électrique attendu en 2018. Et Porsche a fait sensation avec un concept-car électrique aux formes futuristes, la "Mission E". Mais alors que l'américain Tesla vend ses voitures électriques comme des petits pains et que l'éternel rival Toyota s'est imposé comme champion de l'hybride, Volkswagen se lance bien tard dans la bataille. Le groupe promet aussi depuis des années un modèle à bas coûts, qui tarde à venir.

Pour beaucoup d'observateurs, les ratés stratégiques des dernières années, notamment la lenteur à embrasser certaines tendances comme le car-sharing, renvoient à une culture d'entreprise centralisée et pyramidale, organisée autour du siège de Wolfsburg et de l'ex-patron Martin Winterkorn. "Il va nous falloir une nouvelle culture d'entreprise", a reconnu vendredi le président du conseil d'entreprise Bernd Osterloh.

N.G. avec AFP