Les grands crus de Sauternes menacés par une ligne de TGV?
"C'est l'arrêt de mort pour des crus connus depuis des siècles", clament les producteurs de Sauternes et de Barsac. Ils sont remontés contre le projet de ligne à grande vitesse qui doit relier Bordeaux et Dax, à l’horizon 2027. Une LGV qui va, selon eux, modifier le microclimat et le processus très particulier de fabrication de leurs vins liquoreux. Avec les élus de Gironde, ils sont prêts à saisir la Cour de justice européenne pour défendre ce patrimoine de valeur.
Un nectar à la pourriture noble
170 vignerons de Sauternes et de Barsac se disent menacés par le futur tracé. La ligne ne passera pas directement sur leurs propriétés mais elle traversera sur 70 km la Vallée du Ciron en Gironde et ses affluents, ce qui risque de casser le lien avec le terroir et modifier la climatologie.
Or, c’est dans cette zone humide et boisée que se forment les brouillards matinaux qui favorisent la création de la moisissure. Sans moisissure sur les grappes, pas de pourriture noble, ce processus si particulier qui donne aux vins de Bordeaux leur goût liquoreux, unique au monde.
26 grands crus classés
Ces vins sucrés, très appréciés pendant les fêtes de fin d’année, ne représentent que 1,2% de la production de vin bordelais. Il s'en vend chaque année 6 millions de bouteilles, à environ à 25 euros. Mais Sauternes est réputé pour sa qualité, c’est l’appellation qui compte le plus grand nombre de crus classé 1855. On en dénombre 26 au total répartis sur 5 communes. Parmi elles, le plus prestigieux : le premier cru supérieur Château d’Yquen dont les bouteilles valent entre 400 et 600 euros.
200.000 oeno-touristes
Le président du syndicat de Sauternes et Barsac défend également le poids économique de ses domaines: "2.000 salariés directs travaillent sur 2.200 hectares de vignes." A cela s’ajoute, les hôtels, chambres d’hôtes et restaurants de la Vallée de la Ciron qui travaillent autour de l'oenetourisme. 200.000 touristes viennent visiter chaque année la vallée du Ciron.
Pour préserver cette richesse économique et environnementale , les vignerons n'excluent pas de saisir la Cour de justice européenne. Avant cela, ils appellent ‘tous les défenseurs des vins liquoreux à faire part de leur mécontentement sur les registres de l'enquête d'utilité publique", qui se clôt lundi. Au terme de l'enquête publique, un rapport de synthèse sera remis au Conseil d'État qui émettra un avis que le gouvernement pourra suivre ou non.