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Vie de bureau

Les télétravailleurs ne sont pas si heureux que ça

"Une majorité de Français veut faire du télétravail, tout particulièrement les cadres. Parce qu'ils n'y voient que des avantages. Pourtant, travailler de chez soi comporte des inconvénients, voire des risques. "

6 Français sur 10 expriment le désir de travailler de chez eux. Les cadres, eux, sont même 7 sur 10, selon un sondage Odoxa. Ils n’y voient que des avantages, comme ne plus avoir d'envie de meurtre dans les transports le matin, mieux profiter de leur vie personnelle. Mais ils semblent avoir moins conscience des inconvénients, et même des risques du télétravail.

Actuellement en France, il n’y a que 17% de télétravailleurs. La majorité d'entre eux avoue souffrir d’isolement. Échanger avec leurs collègues leur manque. Et puis, outre les potins, les informations importantes, stratégiques, les annonces officielles de l'entreprise n’arrivent pas forcément jusqu’à eux.

Un risque pour sa carrière?

En plus, leur carrière peut en souffrir. Parce que pour évoluer, il faut “être connu dans sa société, être visible des chefs des différents services”, selon Sylvain Maquet, de Greenwich Consulting.

L’entreprise, de son côté, se montre encore assez frileuse. Souvent pour des questions de confiance. Certaines des réserves se justifient, et nuisent également au salarié, comme le manque d’émulation collective qui nuit à la créativité. Comme dit Sylvain Maquet, “les meilleures idées se trouvent à la machine à café”. C’est d’ailleurs la raison qu’avait donnée Marissa Mayer, tout juste nommée à la tête de Yahoo en 2013, pour interdire le télétravail.

Il y a pourtant des formules qui en font un jeu à deux gagnants. Chez Total, par exemple, on a mis en place depuis 2012 un format hybride: maximum deux jours par semaine à la maison, le reste au bureau. Et chaque année, le salarié et son manager dressent un bilan avant de signer pour un an de plus.

Les syndicats reconnaissent s'être trompés

D’après les enquêtes réalisées chaque année, de manière anonyme, tout le monde est content. Les télétravailleurs occasionnels y trouvent un meilleur équilibre vie pro-vie perso, les managers trouvent qu’ils sont plus productifs. Les cadres, même les plus hauts placés, le pratiquent. Un directeur qui a plus de 700 personnes à manager en fait même la promotion auprès des équipes.

Même les syndicats -au départ réticents- reconnaissent s’être trompés. Ils croyaient que les gens dépasseraient leurs horaires, en feraient des tonnes pour montrer qu’ils travaillent réellement. Ils craignaient des pressions managériales qui passeraient inaperçues. Ils admettent que ce n’est pas le cas.

Pas si facile toutefois de faire évoluer la culture française du présentéisme. Selon la CGT, certains services ne jouent pas le jeu et refusent toutes les demandes. Depuis six mois, le nombre de télétravailleurs qui ne faisait que croître stagne. À un peu moins de 600 sur 10.000 qui pourraient y prétendre.

Nina Godart