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Les voitures anciennes, nouvelles vaches à lait des constructeurs

Une Ferrari 330 GTO, exposée au salon Rétromobile à Paris (France) en 2012.

Une Ferrari 330 GTO, exposée au salon Rétromobile à Paris (France) en 2012. - Thomas Samson - AFP

Devant le succès des voitures anciennes, les constructeurs ont ouvert des départements dédiés à l'entretien de ces modèles. À la clé, un peu d’image et, surtout, un vrai business.

Une Jaguar XKSS de 1957 neuve, des pièces d’anciens modèles refabriquées par Peugeot Classic, de l’huile Motul spéciale voitures anciennes... Le business de la voiture de collection n’est plus l’apanage des clubs de passionnés. Constructeurs et équipementiers se sont engouffrés dans la brèche, créant des départements dédiés pour capter ce nouveau business.

800.000 voitures d'avant 1985 immatriculées en France

Rien qu’à Rétromobile, le salon de la voiture ancienne et de collection qui ouvre ses portes ce mercredi 8 février à Paris, le constructeur britannique Land Rover et l’équipementier allemand Bosch présenteront leurs nouvelles divisions "Classic", tandis que Fiat Chrysler exposera pour la première fois son département FCA Heritage. Même le Conseil National des Professionnels de l’Automobile (CNPA) dévoilera sa branche Véhicules de collection. Les vieux modèles font l’actu!

"Si les constructeurs s’y engouffrent, c’est parce qu’il y a des parts de marché à prendre et surtout que ce marché fonctionne", résume Frédéric Dubois, référent national véhicules de collection chez Classic Expert, un spécialiste de l’expertise automobile.

Depuis 10 ans, le marché de la voiture de collection explose. Selon l’AFP, 800.000 voitures d’avant 1985 sont immatriculées dans l’Hexagone (elles ne sont pas forcément toutes roulantes, certaines peuvent être à l’état d’épave dans une grange). Et jusqu’à présent, l’entretien passait surtout par des garages spécialisés. "Et ils le font plutôt bien! Quand les constructeurs ont constaté combien facturaient ces spécialistes, ils ont voulu leur part du gâteau", résume Oliver Camelin, spécialiste automobile à la maison de vente RM Sotheby’s.

Une Lancia et une Lamborghini exposées à Rétromobile, en 2014.
Une Lancia et une Lamborghini exposées à Rétromobile, en 2014. © Thibault Le Mer - Flickr CC

Ferrari en pole position

L’un des premiers à avoir lancé ce genre de services, c’est Ferrari. La marque italienne dispose depuis 2006 d’un département classique, 900 mètres carrés dans son usine historique, à Maranello (Italie). "Ferrari Classiche" restaure et certifie les véhicules au cheval cabré, avec une addition souvent salée. Pour une certification, l’italien demande au minimum 1200 euros HT et jusqu’à 5100 euros HT pour un modèle immatriculé avant 1979. Sans compter les réparations d’usage. Et on ne parle même pas ici du coût d’une restauration.

Le document de certification se présente sous la forme d’un petit livre qui, après examen du véhicule à Maranello, recense les caractéristiques techniques de la voiture, et les "matching numbers" et "matching colors", soit les éléments d’origine de la voiture, de la peinture au châssis. "Cette certification rend plus facile la vente de certains véhicules, poursuit Oliver Camelin. Sans certification, il est par exemple aujourd’hui compliqué de vendre une 250 GT PF par exemple".

70% des Porsche produites encore en circulation

Aston Martin ou Porsche ont pris le même chemin. "On propose au catalogue 52.000 références pour nos voitures, et ça s'agrandit de mois en mois", témoigne Dominik Gruber, responsable de la communication de Porsche en France, à l’AFP, en remarquant que "70% des Porsche qui ont été construites sont encore en circulation". À la clé pour les clients, la sécurité, avec l'assurance de pièces conformes. Porsche Classic propose cependant des tarifs plus raisonnables que Ferrari, pour la certification du moins: environ 300 euros.

Mettre au point un tel département demande cependant du temps et de l’argent. Jaguar Land Rover présente ainsi le programme "Range Rover Reborn" à Rétromobile. Mais si le service est accessible en Allemagne et en Angleterre, il est encore à l’étude en France. "Cela prendra un peu de temps car il faut des ateliers spécialisés, et les réseaux d'indépendants font déjà très bien ce travail", souligne Marc Luini. Le directeur général de Jaguar et Land Rover en France rappelle qu’en Grande-Bretagne, les mécaniciens et ingénieurs de la marque ont écumé la campagne anglaise, afin de se faire la main sur de vieux modèles dormant au fond des granges. Pour le moment, la marque Jaguar propose en France de rapatrier les voitures en Grande-Bretagne pour être traitées à la maison.

Se lancer dans la voiture de collection reste un bon investissement pour les grandes marques, notamment en termes d’image. "C’est une manière de faire vivre son histoire. Chez Bosch, notre priorité est de toucher un public de collectionneurs avec des ateliers de rénovation et de maintenance de qualité, pour soutenir notre slogan ‘Des technologies pour la vie’, souligne Denis Regard, directeur commercial Pièces et Services pour la France. Ceux qui veulent réparer eux-mêmes, rechercher leurs propres pièces, continueront de le faire, mais des clients sont intéressés par une remise en état ou de l’entretien, sans mettre les mains dans le cambouis. Et ils peuvent alors découvrir les produits Bosch également disponibles pour les véhicules actuels". À l’horizon 2018, Bosch Classic France vise les 5 millions d’euros de chiffre d’affaires. Finalement, c’est donc bien dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes.

Pauline Ducamp