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Malgré l'interdiction de TF1, Orange  continue à diffuser la chaîne

TF1 est aussi diffusé dans les offres internet des opérateurs dites 'over-the-top'

TF1 est aussi diffusé dans les offres internet des opérateurs dites 'over-the-top' - 01 Net Pierre Fontaine

TF1 a sommé Orange de ne plus diffuser son signal dans ses offres internet à compter de juillet, mais l'opérateur télécoms passe outre.

Après SFR et Canal Plus fin avril, Orange a décidé lui aussi d'ignorer l'ultimatum de TF1. La filiale du groupe Bouygues avait exigé que l'opérateur téléphonique cesse de diffuser la Une après le 30 juin. Mais l'ex-France Télécom est passé outre, et continue de diffuser la chaîne.

Bras de fer

Le bras de fer porte sur l'argent versée à la Une par ses distributeurs: CanalSat et les opérateurs télécoms. Jusqu'à présent, TF1 reçoit de leur part une dizaine de millions d'euros par an, dont environ 5 millions d'Orange. Mais la Une a fortement revu à la hausse ses exigences financières: la facture totale tutoie la centaine de millions d'euros. Pas question, pour les distributeurs, d'accepter une révision tarifaire aussi élevée. Constatant leur refus, TF1 a alors écrit aux distributeurs pour les sommer de ne plus diffuser la chaîne. Pour la diffusion sur internet en "over-the-top" (OTT), qui permettent de regarder la Une sur téléphone mobile, ordinateur ou tablette, l'échéance avait été fixée au 30 avril pour SFR et CanalSat, et au 30 juin pour Orange. Las! Tous les distributeurs sont passés outre et continuent à diffuser la chaîne la plus regardée de France. Pour la diffusion sur les box, TF1 a fixé un ultimatum à fin août.

De toutes façons, TF1 ne peut pas couper lui-même son signal uniquement pour ces offres OTT. C'est à l'opérateur télécoms de le faire.

Surtout, tout le monde a décidé de s'en remettre à la justice pour trancher cette épineuse question. Le 25 avril, une demande d'arbitrage a été déposée devant le CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel) par SFR (qui détient 49% de BFM Business). Le gendarme de l'audiovisuel dispose de quatre mois pour trancher, soit d'ici fin août. Mais il peut se déclarer incompétent -c'était une issue qu'il envisageait initialement. Dans ce cas là, tout le monde reviendrait à la case départ. "TF1 saisirait alors le tribunal de commerce ou le tribunal de grande instance", indique un dirigeant de la chaîne. Ce qui prendrait au moins un an pour aboutir...

Camper sur ses positions

Pour le moment, chacun campe sur ses positions. Le 13 avril, le PDG de TF1 Gilles Pélisson avait plaidé: "Il est légitime que les revenus [de TF1] dépendent non seulement de la publicité à la télévision, mais désormais aussi de l'internet. Il n'est pas normal que l'opérateur garde cet argent. Il n'est pas normal qu'une partie de l'argent [récolté par les fournisseurs d'accès internet] ne puisse pas revenir au diffuseur que nous sommes, sachant que ces mêmes opérateurs rémunèrent les chaînes américaines [thématiques payantes], ou les compétitions sportives. À un moment, il est difficile pour un opérateur de se passer des chaînes principales d'un pays".

Le 20 avril, le PDG d'Orange Stéphane Richard lui répondait: "Tout le monde aimerait bien avoir des revenus supplémentaires sans charge. Mais où est l'intérêt de l'utilisateur? Le grand absent de ce débat, c'est l'utilisateur. S'agit-il en fait d'introduire un nouveau modèle économique dans lequel l'utilisateur serait mis à contribution? Est-ce que l'utilisateur, vous et moi, va payer pour regarder TF1? C'est ça la question. Parce que si on ne demande pas [à l'utilisateur] de payer, cela signifie en fait qu'on prend du pognon chez l'opérateur pour le verser dans la poche de TF1, et il s’agit d’un impôt privé".

Stéphane Richard ajoutait: "Dans cette confrontation, je n'ai pas de doutes sur la réalité du rapport de force qui nous est favorable". En effet, "Orange, c'est 25% de l'audience cumulée de TF1 en France. Est-ce que vous pensez raisonnablement qu'une chaîne dont le modèle économique est la gratuité pour les utilisateurs, donc rémunérée par la publicité, peut du jour au lendemain se couper de 25% de son audience? Je ne crois pas". En outre, "n'oubliez pas que le secteur des télécoms et du câble est un des tout premiers annonceurs publicitaires chez TF1".

Un dirigeant de la Une corrige: "Orange pèse plutôt 10% de l'audience de la chaîne".

Interrogés, Orange a confirmé avoir reçu un ultimatum de la Une, tandis TF1 se refuse à tout commentaire. De son côté, le CSA répond que "l'arbitrage est toujours en cours".

Jamal Henni