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Muguet et légumes pâtissent de la fraîcheur du printemps

"Dans les champs, salades et radis végètent", témoigne un maraîcher de la Marne.

"Dans les champs, salades et radis végètent", témoigne un maraîcher de la Marne. - AFP-Jeff Pachoud

"Les faibles températures du mois d’avril inquiètent certains maraîchers. Le sol trop froid bloque la pousse des légumes racines. Quant aux clochettes blanches, elles ont eu tendance à se raréfier."

Cette année, le traditionnel brin de muguet du 1er mai risque de coûter un peu plus cher. La faute à la météo. Après des températures particulièrement douces cet hiver, le mois d’avril a été plus frais qu’habituellement. Résultat, les brins sont sortis de terre au compte-goutte et comportent moins de jolies clochettes blanches. "Il y aura entre 20 et 30% de muguet en moins sur le marché", regrette Patrick Véron, de la fédération des maraîchers nantais auprès du Figaro

Écarts de températures

Ces derniers jours, les écarts de températures sont surtout constatés dans le nord, l’ouest et le centre de la France, d’après les données recueillies auprès de Météo France. Le 25 avril dans le nord-est de la France, il a par exemple fait - en moyenne sur la zone-, 6,6 degrés Celsius de moins que la température moyenne attendue un 25 avril dans cette partie de la France. 

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De quoi perturber la floraison du muguet. Sa pousse aurait 15 jours de retard. "Je vais perdre 50% de ma production cette année, habituellement je ramasse 3.000 à 4.000 brins", témoigne même le cultivateur poitevin Patrick Martin sur France Bleu. 

Mais au-delà de la traditionnelle fleur blanche, ce sont la plupart des cultures maraîchères de plein champ qui ont eu tendance à prendre du retard: asperges, salades, radis, carottes, pommes de terre… "Ce rafraîchissement anormal provoque une stagnation de la pousse. Dans les champs, salades et radis végètent", témoigne Jacques Rouchaussé, maraîcher dans la Marne et président des Producteurs de Légumes de France. Les plants souffrent de gelées matinales tardives survenues dans le nord, le centre et l’est de la France. Le sol trop froid bloque la pousse des légumes racines. 

"Éclaircissage naturel"

Dans certains vergers, les arbres fruitiers pâtissent de la climatologie inhabituelle de ces derniers mois. Ainsi dans la Marne "on a eu une floraison précoce suivie de gelées, cela provoque un éclaircissage naturel de la végétation arboricole", explique Jacques Rouchaussé. Or les arbres fruitiers en fleurs au mois d’avril sont légion: cerisiers, pruniers, pommiers, brugnoniers… "On a constaté des dégâts de gel sur les abricotiers de la Vallée du Rhône et des incidents de grêle sur les pêchers et nectariniers", témoigne François Lafitte, le président de l’association GEFEL (Gouvernance Economique des Fruits et Legumes).

Sous les serres, il manque aussi de soleil et de chaleur pour faire rougir les fraises. "On a eu trois semaines de retard sur l’asperge, on aura deux semaines de retard sur les fraises", se désolait la maraîchère Aurore Mesnil il y a quelques jours sur le marché de Dijon.

Mais d’autres producteurs sont plus confiants. À l’image de Luc Barbier, le président de la Fédération nationale des producteurs de fruits, qui ne redoute pas un réel retard de production. "On avait beaucoup d’avance avec un hiver très doux. Le printemps frais a simplement fait perdre cette avance", explique-t-il.

Reste que du côté des maraîchers, ces retards risquent d’avoir des conséquences néfastes sur la trésorerie des exploitations. Les produits importés vont rester un peu plus sur les étals des marchés et dans les rayons des magasins. "Le basculement sur la production française n’est pas encore fait, il y a du retard. Ce qui nous préoccupe c’est le télescopage de nos produits avec ceux venant d’Espagne, du Maroc", s’inquiète le président des Producteurs de Légumes de France.

Inquiétude

D’autant que la faiblesse des températures ralentit la vente des fruits et légumes dont la consommation est la plus climato-sensible, comme les fraises par exemple. Les produits ayant poussé sous des serres espagnoles arrivent en quantité sur les étals, de quoi concurrencer les productions françaises, qui, en plus, tardent à arriver. Ce qui conduit Jacques Rouchaussé à redouter "une incertitude de chiffre d’affaires par exploitation". "On espère que c’est juste décalé, mais ce qui n’est pas vendu à instant T est une perte en puissance", s’inquiète-t-il.

En France, la filière fruits et légumes représente 11% de la production agricole, d’après les données de France AgriMer. Derrière l’Italie et l’Espagne, l’Hexagone est le troisième producteur de fruits et légumes de l’Union européenne.

Adeline Raynal