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Pour le philosophe Raphael Enthoven, Uber c’est la "Chine communiste"

Philosophe, essayiste et animateur de télé (sur Arte), Raphael Enthoven s'est livré à une charge pour le moins audacieuse contre Uber

Philosophe, essayiste et animateur de télé (sur Arte), Raphael Enthoven s'est livré à une charge pour le moins audacieuse contre Uber - Eric Feferberg - AFP

Invité par la fédération du e-commerce (la Fevad) à disserter lors de sa conférence annuelle, le philosophe et animateur de télé Raphael Enthoven a enjoint la France à résister contre l’économie collaborative.

"Ce qu’on décrit comme l’économie collaborative, cette soi-disante idée neuve, a en fait été inventée par le parti communiste chinois dans les années 50." Le philosophe et animateur de télé Raphael Enthoven était très remonté ce jeudi 2 juillet contre Uber et l’économie collaborative en général. Invité par la Fevad à disserter à l’occasion de la conférence annuelle de la fédération du e-commerce, l’agrégé de philosophie s’est fendu d’un cours d’économie mâtiné d’histoire des idées politiques (le verbatim complet est disponible sur le site de Challenges). Avec, il faut bien l’avouer, un audacieux parallèle entre Uber et la Chine de Mao.

Car selon lui, l’économie collaborative c’est l’équivalent de la "ligne de masse" du PC chinois qui consistait dans les années 50 à recueillir les idées du peuple dans des sortes de cahiers de doléances pour les faire remonter à Pékin et ainsi produire des lois directement dictées par la volonté populaire. "Mais en réalité tout était écrit par avance, explique Raphael Enthoven, et l’on ne faisait que prélever parmi ces doléances les choses déjà écrites. C’est ça qu’on appelle démocratie participative en France."

"Uber fait de nous des moutons"

Si le lien avec Uber est difficile à saisir (quel est le point commun entre le centralisme dirigiste à la chinoise et la libre concurrence prônée par la société américaine?), le philosophe étaye un peu. "Uber joue sur le développement de l’autonomie et le sentiment qu’avec Internet, chacun va avoir le sentiment de construire sa petite vie mais c’est une illusion. C’est l’uniformisation des comportements qui est en marche." Il estime en substance que chaque individu se sentant unique dans ce système, ses comportements se standardisent. "On flatte l’individu en vous, mais c’est le mouton qu’on caresse, estime-t-il. Dans cette lutte des taxis contre Uber, il y a une lutte du village gaulois contre le village gaulois", conclut-il.

Mais pas de quoi s’inquiéter finalement puisque de l’aveu même du philosophe, "ce n’est pas une révolution, les problèmes n’ont pas changé depuis Aristote qui avait déjà défini la valeur d’usage et la valeur d’échange."

Cette distinction qui est la base de l’économie (on fabrique un bien soit pour l’utiliser, soit pour le vendre) est justement en train de petit à petit s’effacer avec l’économie collaborative quoi qu’en pense Raphael Enthoven. La voiture d’un particulier (l’usage donc) devient avec UberPop un bien qui acquiert de la valeur pour les autres (l’échange). La preuve que, quoi qu’on pense notre philosophe national, Aristote n’avait finalement peut-être pas anticipé l’émergence d’Uber et de cette économie collaborative honnie…

Frédéric Bianchi