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Pour ses 10 ans, The Huffington Post va-t-il devenir allemand ?

Le 28 avril, Arianna Huffington invitait les équipes mondiales du Huff pour fêter son dixième anniversaire. Pas un mot n'a fuité sur une éventuelle vente.

Le 28 avril, Arianna Huffington invitait les équipes mondiales du Huff pour fêter son dixième anniversaire. Pas un mot n'a fuité sur une éventuelle vente. - Brian Ach (Getty Images North America/AFP)

Le repreneur d'AOL, Verizon, ne devrait pas conserver tous les actifs de ce portail historique du web. L'opérateur américain négocierait la cession au groupe berlinois Axel Springer du plus puissant de ses sites, The Huffington Post. Son prix: 1 milliard de dollars!

Le rachat d’AOL par Verizon préfigure-t-il ce qu'on appelle dans le jargon financier une vente par appartement des nombreux actifs que possède le portail historique de l'internet? C'est probable. Cela expliquerait en tout cas pourquoi le puissant opérateur américain a investi plus de 4 milliards de dollars dans cette acquisition. D'autant que parmi les plus belles pépites figure en effet The Huffington Post, acheté en 2011 par AOL pour 315 millions de dollars.

Verizon fait le tri avant décider de ce qu’il va conserver. Pour Olivier Rafale, principal consultant chez Pierre Audoin Consultants, l’exercice est inévitable. "Difficile de gérer la monétisation du contenant et du contenu. Plusieurs groupes ont déjà tenté de le faire, mais sans succès. Apparemment, le choix de l’opérateur est de se concentrer sur ce qu’il sait faire, la publicité en ligne, et de rentabiliser son investissement en cédant les médias."

Le "pôle" média d'AOL se compose de sites pour geeks comme TechCrunch ou EnGadget, mais son fleuron est The Huffington Post, un des seuls sites d’information et d’opinion ayant réussi son internationalisation. Or, à en croire, Re/Code, entre Arianna Huffington, cofondatrice du site, et Tim Armstrong, patron d’AOL, les relations n’ont jamais été bonnes. L'un et l'autre auraient hâte de divorcer.

En quatre ans, la valeur du site a été multipliée par trois

Selon les médias américains et allemands, des discussions auraient déjà démarré avec le groupe de presse allemand Axel Springer propriétaire entre autres du quotidien le plus lu d’Allemagne, Bild Zeitung et d’un journal de référence outre-Rhin, Die Welt. Ce groupe de presse est hautement rentable. en 2014, il affichait une marge d'exploitation (calculée à partir de son EBITDA hors éléments exceptionnels) de 18,4% pour un chiffre d'affaires de 1,56 milliard d'euros dont 53% provenaient de ses activités digitales.

Depuis quelques années, le groupe accélère sa stratégie numérique en rachetant de nombreuses plateformes en Europe. En France, il a déjà fait l’acquisition d’Aufeminin.com, de Marmiton ou de SeLoger.com. Mais les sites américains sont aussi dans sa ligne de mire. Axel Springer a également pris au début de l’année une participation minoritaire dans Business insider. Un investissement raisonnable: 25 milllions de dollars.

Le Huffpo est présent dans une quinzaine de pays

Pour s’offrir The Huffington Post, il ne pourra pas se contenter de puiser dans sa trésorerie. AOL compte vendre son titre-phare pour 1 milliard de dollars. Une somme considérable pour un site média. Rappelons qu’en 2013, Jeff Bezos, patron d’Amazon, a fait l’acquisition du Washington Post pour 250 millions de dollars. Et le New York Times qui a réussi sa transition numérique ne vaudrait pas plus du milliard de dollars.

The Huffington Post, qui vient de fêter ses dix ans à New York, a été créé le 9 mai 2005 par Arianna Huffington, Kenneth Lerer et Jonah Peretti. Il ne leur a fallu que 4 ans pour devenir le premier média en ligne américain grâce à une couverture très remarquée des élections présidentielles américaines de 2008. A la surprise générale, il est devenu rentable dès 2011, l’année où AOL l’a racheté pour 315 millions de dollars.

Dès 2012, le site entame une stratégie vidéo qui booste son audience. Elles est estimée au niveau mondial à 80 millions de visiteurs uniques par mois (VU) dont 20 à 25% hors des Etats-Unis. Le Huffpo comme on l’appelle en France dispose de versions au Brésil, au Royaume-Uni, au Canada, en France, en Espagne, en Italie, au Japon, en Corée, au Maghreb, en Grèce, en Inde, en Italie et... en Allemagne.

En France, l'audience du "HuffPo" flirte avec les 4 millions de visiteurs

En France, le Huffpo est le partenaire du Monde depuis son lancement en 2011. C’est la régie du groupe, M Publicité, gère les annonceurs. La rédaction a appris par la presse que la revente était dans l’air. "Apprendre que le groupe pèse près d'un quart du prix d’AOL m'a surpris", nous a déclaré Alexandre Phalippou, rédacteur en chef de l’édition française qui, bon an mal an, affiche 4 millions de visiteurs uniques par mois selon Médiamétrie.

"Au départ, notre succès provenait de l’image d’Anne Sinclair, mais nous nous sommes développés petit à petit sur d’autres publics. D’abord les jeunes avec des informations originales ou décalées, puis désormais avec l’information qui attire désormais la majorité de nos lecteurs."

Pour la vidéo, des progrès restent à faire. Le site ne figure pas encore dans le Top 15 du classement Médiamétrie et n’atteint donc pas encore le chiffre de 1,5 million de visiteurs uniques.

Pour le moment, rien n’a été officialisé : ni la vente, ni son montant. Afin d’éteindre le buzz, un porte parole d’AOL a même contacté Re/Code pour indiquer que The Huffington Post, ainsi que EnGadget et TechCrunch, "continueront à faire partie de notre entreprise". Pourtant les fameuses sources du site américain ayant dévoilé ces pourparlers avec Axel Springer seraient des responsables d’AOL. 

Pascal Samama