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Pourquoi ce collectif berlinois manifeste chaque vendredi en criant "fuck off Google"

A Berlin, l'arrivée d'un Google Campus ne fait pas que des heureux. Chaque vendredi à 18 heures, les opposants manifestent pour réclamer l'abandon du projet.

A Berlin, l'arrivée d'un Google Campus ne fait pas que des heureux. Chaque vendredi à 18 heures, les opposants manifestent pour réclamer l'abandon du projet. - Maurizio Gambarini / dpa / AFP

Le campus que Google crée à Berlin soulève un vent de contestation chez les habitants du quartier de Kreuzberg. Ils se sont rassemblés dans un collectif au nom on ne peut plus explicite: "Fuck Off Google". Une manifestation se tient chaque vendredi pour demander l'arrêt du projet.

Google étend sa présence dans le monde et pas seulement sur Internet. Le groupe Californien installe aussi des incubateurs dans les villes les plus dynamiques en matière de création de start-up.

Après Londres, Madrid, Sao Paulo, Séoul, Tel Aviv et Varsovie, Berlin a été sélectionné pour installer le septième Google Campus qui développe l’innovation et le potentiel de création d’emplois. Accueilli à bras ouvert par le maire social-démocrate de la ville, le groupe a choisi une usine désaffectée de briques rouges de 3000 m2 dans le quartier de Kreuzberg.

Mais l’arrivée du géant américain ne fait pas que des heureux. Un vent de protestation souffle contre ce projet et des opposants, soutenus par les élus écologistes du quartier, ont créé le collectif "Fuck Off Google" (tout le monde comprendra cette expression anglophone) qui vise à dissuader Google de mener à bien son projet dans ce quartier populaire et traditionnellement contestataire. Sur son site, le ton est donné: "Nous nous engageons à ne pas laisser notre ville bien-aimée se laisser envahir par cette société qui échappe à la loi et fait de l'évasion fiscale et construit un avenir dystopique".

Faire sa fête à Google

Ce quartier populaire connu pour sa mixité sociale devient peu à peu un lieu branché. Il attire de plus en plus une classe sociale jeune et aisée qui trouve des logements moins chers que dans les autres quartiers berlinois. Conséquence: les prix de l’immobilier augmentent, la population change. Le collectif estime qu’il s’agit d’une gentrification. Il parle même d'un colonialisme social mené par un groupe qui accuse Google de "viole[r] systématiquement les droits de l'Homme à travers une censure généralisée et une surveillance de masse".

Au départ, le mouvement était timide. En début d'année, la première manifestation n’a été suivie que par une poignée de militants. Mais en avril dernier, une marche anti-Google a rassemblé 14.000 personnes. Lors des manifs du 1er mai, l’un des slogans scandés a même été "Fuck Off Google". Depuis plusieurs semaines, un rassemblement se tient chaque vendredi à 18 heures devant l'immeuble qui doit accueillir de Campus. Le collectif appelle la population à se réunir dans le quartier en faisant un tintamarre. "Alertez vos amis et amenez des casseroles, des sifflets et d'autres outils bruyants!", demande le collectif sur un Wiki créé pour informer le public.

Berlin, déjà l'une des capitales européennes des start-up

Les militants anti-Google arriveront-ils à dissuader le groupe de mener son projet à terme? Sans doute pas. Le permis de construire a été accordé et le Campus devrait ouvrir avant la fin de l’été. Mais, comme le rappelle Télérama, un précédent a eu lieu dans le quartier en 2012. Le groupe BMW avait déjà essuyé une vague de protestation contre l’installation d’un laboratoire d’idées et a été contraint à s’installer dans un autre quartier alors que son projet était bien avancé.

Mais depuis 2015, les incubateurs poussent comme des champignons dans tous les quartiers de la ville. Rocket Internet s’est installé dans une ancienne manufacture de tabac de Prenzlauer Berg et Factory a transformé une vieille brasserie pour créer le plus grand incubateur du pays. En quelques années, ces centres ont fait de Berlin l’une des trois villes les plus innovantes d’Europe avec Londres et Paris.

En 2015, le montant total des fonds levés par les start-up berlinoises a atteint la somme record de 2,145 milliards d’euros. Depuis, la capitale allemande a été détrônée par Paris qui prend de l'avance avec Station F. Le Google Campus pourrait lui permettre de reprendre la première place. Et contre cela, les opposants à la transformation numérique n’ont rien pu faire.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco