BFM Business
Transports

Pourquoi les constructeurs lancent autant de véhicules propres en Chine

Les constructeurs automobiles multiplient les annonces sur les véhicules propres depuis le salon de l'automobile de Shanghai.
(image d'illustration)

Les constructeurs automobiles multiplient les annonces sur les véhicules propres depuis le salon de l'automobile de Shanghai. (image d'illustration) - Geoff Robins - AFP

Menacées de se voir imposer un quota de véhicules propres, les marques se précipitent pour gonfler leur offre de voitures électriques en Chine. Un marché dominé par les constructeurs locaux et convoité par d’ambitieuses start-up.

Qu’ils soient hybrides, hybrides rechargeables ou 100% électriques, les véhicules propres sont omniprésents cette année au Salon de Shanghaï. Un rendez-vous où les groupes automobiles rivalisent d’annonces destinées au premier marché mondial.

Le constructeur suédois Volvo (propriété du chinois Geely depuis 2010) a confirmé qu’il introduirait en 2019, en Chine, sa toute première voiture 100% électrique tandis que Ford y commercialisera début 2018 son premier véhicule hybride. "D’ici 2025, 70% des modèles de notre gamme en Chine seront disponibles avec l’électrification en option" précise David Schoch, président Asie-Pacifique du groupe américain.

Il faut dire que ce segment de marché est particulièrement attractif. Les ventes chinoises de véhicules "à énergies nouvelles" se sont envolées de 53% en 2016 à 507.000 unités grâce à de généreuses primes gouvernementales et à des facilités d’immatriculation. Cela reste bien peu cependant sur un total de 28 millions de véhicules vendus, dont 24,38 millions de voitures individuelles.

David Schoch le reconnaît: "Le marché de l'électrique reste porté par les autorités. Le coût (de production des batteries) est tel qu'il n'y a aucun bassin naturel d'acheteurs". Une réduction des primes à l'achat début 2017 a d'ailleurs fait trébucher les ventes.

L'instauration de quotas affole certains constructeurs 

Au-delà des incitations pour les consommateurs Pékin, dans sa lutte contre une pollution urbaine endémique, envisage désormais de forcer la main aux constructeurs. Un projet publié en septembre esquisse un quota de "voitures propres" qu'il leur imposerait dès 2018. Les détails ne sont pas arrêtés, mais les industriels évoquent un système complexe où chaque véhicule vendu représenterait un certain nombre de crédits, plus généreux pour les voitures électriques. Avec pour obligation pour chaque groupe d'accumuler 8% de crédits "véhicules verts" sur le total des ventes annuelles.

Un probable mécanisme qui a de quoi affoler certains constructeurs. Volkswagen a vendu près de 4 millions d'unités en Chine en 2016, dont seulement quelques centaines de véhicules propres. Pour rattraper son retard, l'allemand entamera l'an prochain la production en Chine d'une voiture électrique en coentreprise avec le chinois JAC. "Nous visons 400.000 ventes de véhicules hybrides et électriques d'ici 2020 et 1,5 million d'ici 2025" afin de respecter les futurs quotas, explique le patron de Volkswagen Chine, Jochem Heizmann, tout en disant espérer des "ajustements".

Soucieuse de protéger ses constructeurs, la chancelière allemande Angela Merkel a sollicité un compromis auprès du Premier ministre chinois Li Keqiang, selon le quotidien allemand Handelsblatt. Le ministre de l'Industrie, Miao Wei, a confié en mars que le gouvernement envisageait d'abaisser le quota ou de retarder sa mise en application, précisant que les détails ne seraient finalisés qu'en mai ou juin.

Les constructeurs locaux dominent le marché 

En attendant, le marché reste dominé par des constructeurs locaux, dont le pionnier du secteur, BYD, avec 96.000 véhicules électriques écoulés l'an dernier. En dépit de subventions réduites, "la dynamique vers l'électrification est irréversible" s'exclame son président, Wang Chuanfu. "Nous avons atteint le point où (les économies d'échelle) en production vont permettre des prix plus abordables", assure-t-il.

Déjà, la majorité des voitures électriques se négocient sous 250.000 yuans (33.900 euros) avant subventions pour des modèles de très faible autonomie. "On ne peut pratiquement pas vendre au-delà de ce prix", regrette Hubertus Troska, président de Mercedes Chine.

Cela n'empêche pas de jeunes start-up de défier l'américain Tesla sur le créneau très restreint de l'électrique haut de gamme. Parmi elles, Qiantu, dont un modèle sport sera commercialisé aux alentours de 95.000 euros cette année, Chehejia, fondé par un entrepreneur surnommé "l'Elon Musk chinois", ou encore Nio (marque NextEV), appuyée par les géants chinois du web Tencent et Lenovo.

Après des bolides pour Formule E, Nio entamera cette année la production de son premier SUV électrique. "Il y a une envie non satisfaite pour (le premium électrique) dans les grandes villes chinoises" assure auprès de l'AFP le fondateur de l'entreprise, William Li, qui promet également une voiture électrique autonome aux États-Unis en 2020.

Sur le haut de gamme, "nous ne sous-estimons personne. Ces nouveaux venus ont des ressources considérables", concède Ian Robertson, responsable marketing de BMW. Avant de tempérer: "Beaucoup d'annonces, mais certains concrétiseront, d'autres non."

Antonin Moriscot avec AFP