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Pourquoi, même à 100 euros, le marathon de Paris fait le plein

Comme en 2016, 57.000 coureurs sont inscrits au marathon de Paris cette année

Comme en 2016, 57.000 coureurs sont inscrits au marathon de Paris cette année - MARTIN BUREAU / AFP

Les tarifs d'inscription au marathon de Paris augmentent année après année mais le succès populaire ne se dément pas, bien au contraire. Quelles raisons poussent plus de 50.000 coureurs à dépenser en moyenne 100 euros pour s'aligner au départ?

Dimanche matin sur les Champs-Elysées, 57.000 coureurs se sont élancés à l'assaut du 41ème marathon de Paris. Des participants qui ont dépensé entre 80 et 115 euros, en fonction de la date à laquelle ils se sont inscrits, pour se lancer le défi ultime du coureur à pied. "Le prix moyen est de 100 euros", explique Edouard Cassignol, le directeur de l'épreuve. Un prix en très forte hausse ces dernières années: en 2004, courir le marathon de Paris ne coûtait qu’entre 42 et 62 euros.

Comment expliquer cette augmentation? Les coûts de sécurité ont, certes, fortement augmenté ces dernières années. Un poids certain dans le budget, surtout lorsque l’on sait que "tous les agents de police sont à la charge de l’organisateur, et les dispositifs sont largement complétés par des agents de sécurité, payés par l’organisateur aussi" complète Edouard Cassignol. L’organisateur, c’est ASO, la branche événementielle du groupe Amaury, qui est également aux manettes du Tour de France et du Dakar, entre autres.

Plusieurs postes de dépenses

Pour justifier le tarif d’inscription, ASO met également en avant ce qui est proposé aux coureurs en amont de l'événement, comme des sessions d’entraînement, ou encore une application dédiée, ainsi que ce qui est mis à leur disposition le jour J: les infrastructures de départ et d’arrivée, les ravitaillements, ou encore la surveillance médicale, opérée par "une dizaine de médecins et 600 secouristes".

Ajoutons aux dépenses à la charge de l’organisateur la redevance versée à la mairie de Paris, de l’ordre de plusieurs centaines de milliers d’euros, ainsi que les frais engagés pour attirer les meilleurs coureurs mondiaux: primes de victoire (50.000 euros chez les hommes et chez les femmes), billets d’avion, chambres d’hôtel, etc. Les postes de dépenses sont nombreux, mais ils laissent tout de même à ASO une marge qu’on imagine relativement confortable.

L'an dernier, le Kényan Cyprian Kotut s'était imposé chez les hommes, et sa compatriote Visiline Jepkesho chez les femmes
L'an dernier, le Kényan Cyprian Kotut s'était imposé chez les hommes, et sa compatriote Visiline Jepkesho chez les femmes © MARTIN BUREAU / AFP THOMAS SAMSON / AFP

Car les recettes d’un tel événement sont plus que conséquentes. Au minimum 5 millions d’euros, uniquement sur les inscriptions. À cela s’ajoutent les revenus issus des partenariats: selon différentes sources, environ un million d’euros sont versés par Schneider Electric, qui donne son nom à l’épreuve, et aux alentours de 500.000 euros de la part d’Asics. Un chiffre d’affaires qu’on pourrait donc estimer à 6,5 millions d’euros au minimum, sans compter les revenus générés par le Salon du running, passage obligé des participants venus récupérer leur dossard.

En pratiquant des tarifs relativement élevés, ASO entretient donc son principal poste de recettes. "Dans le modèle économique des épreuves de masse, ce sont les inscriptions qui font la force du modèle. C’est ce qu’a su parfaitement faire ASO" salue Virgile Caillet, le délégué général de l'Union Sport et Cycle.

L'offre et la demande

Une politique de prix validée par la progression fulgurante du marché de la course à pied qui se confirme année après année: en 2016, 12 millions de Français affirmaient pratiquer la course à pied au moins une fois par semaine. Alors que les participants n’étaient que 36.000 en 2006, les demandes d'inscription au marathon de Paris sont toujours plus nombreuses, malgré l'augmentation des prix. Une simple question d'offre et de demande, donc. Cette année, les inscriptions étaient closes fin janvier, "un peu plus tard qu’en 2016, notamment car les étrangers sont venus moins nombreux" concède Edouard Cassignol, probablement en raison du contexte sécuritaire. Alors que 37% des participants de 2016 venaient de l’étranger, le chiffre est descendu cette année à 30%.

Si l'augmentation du prix d'inscription au marathon est souvent pointée du doigt, il faut toutefois la mettre en perspective avec ce qui est pratiqué ailleurs. À New York, les coureurs ayant la chance d’être tirés au sort devront s’acquitter de 358 dollars pour valider leur inscription. À Boston, il en coûtera entre 180 et 240 dollars, sous réserve d’être qualifié au temps. À Londres, le tirage au sort peut donner accès à des dossards très bon marché, mais les chances sont minces. La majorité des coureurs étrangers doit donc passer par un tour operator, ce qui fait flamber l’addition. Enfin, à Berlin, où une loterie est également organisée, l’inscription coûte 108 euros, "auxquels il faut ajouter 25 euros pour le t-shirt finisher et 6 euros pour la puce chronométrique", explique Edouard Cassignol.

Expérience consommateur

Paris se situe donc plutôt dans la fourchette basse des grands marathons mondiaux. En revanche, l'épreuve est bien plus chère que les autres marathons français. Pour ASO, la justification est toute trouvée: "À Paris, il y a une expérience unique, un parcours exceptionnel. Tout notre positionnement est là-dessus" éclaire le directeur de l’épreuve.

Un constat que fait également Virgile Caillet: "Le marathon de Paris est l’un des mieux organisés au monde, et il propose de visiter Paris de manière exceptionnelle". Au-delà de l'aspect touristique, c'est donc également le niveau de prestation qui est salué.

"Il ne faut pas prendre le prix de manière intrinsèque, complète-t-il. On peut comparer le marathon de Paris à une expérience de divertissement: Disneyland Paris, on sait que ça va coûter cher. Le prix, c’est l’expérience consommateur que l’organisateur va proposer". Charge pour ASO de faire vivre dimanche la plus belle des expériences à ses consommateurs-coureurs.

Thomas Oliveau