BFM Business
Culture loisirs

Pourquoi Pascale Clark est-elle intermittente du spectacle?

Les radios publiques concluent 39.000 contrats d'intermittents chaque année

Les radios publiques concluent 39.000 contrats d'intermittents chaque année - Thomas Samson AFP

Pascale Clark a perdu sa carte de presse car France Inter l'emploie, non en CDI, mais comme intermittente du spectacle. Un régime précaire que Radio France applique à 5.300 personnes...

La semaine dernière, Pascale Clark apprenait avec fureur qu'elle avait perdu sa carte de presse. En effet, la commission chargée de l'attribuer avait décidé de lui retirer pour deux raisons.

D'abord, son émission actuelle sur France Inter, A'Live, "n'est pas de nature journalistique". Ensuite, la radio ne l'emploie pas comme journaliste, mais comme intermittente du spectacle. Un régime que la commission considère comme incompatible avec la carte de presse.

Recours massifs aux permittents

A priori, il est surprenant que Pascale Clark soit employée comme intermittente. En effet, cela fait cinq ans et demi qu'elle a rejoint France Inter, où son emploi semble donc permanent, et devrait donc être en CDI.

En réalité, l'affaire Clark met en lumière le recours massif aux intermittents à Radio France pour des postes permanents -c'est ce qu'on appelle la "permittence".

39.000 contrats d'intermittents par an

En pratique, Radio France signe avec les animateurs, les producteurs... des "contrats de grille", qui durent une saison (de septembre à juin), et renouvelables d'une année sur l'autre.

Selon la direction, 1.800 animateurs, producteurs délégués, intervenants spécialisés... sont ainsi sous contrat d'intermittent. Soit près de la moitié de 5.300 intermittents employés par les radios publiques -le reste sont des musiciens ou des comédiens. En revanche, les techniciens ne sont plus intermittents depuis 2007.

Au total, les radios publiques ont conclu en 2011 39.000 contrats d'intermittents, en grande majorité de courte durée (moins de quatre jours). 

Résorber les abus

Cette situation avait été critiquée par le député PS Jean-Patrick Gille: "on peut légitimement s’interroger sur la permanence des emplois pourvus en contrats de grille répétés. La situation des salariés en contrat (intermittent) est fragile: Radio France leur impose une situation précaire alors qu’ils occupent, pour certains, des fonctions permanentes. Il en résulte une absence de réelle évolution de carrière et, en outre, un préjudice important en matière de retraites. Cela étant, si cette situation n’est évidemment pas satisfaisante, un effort a été mené depuis 2003 pour résorber certains abus. Suite à un conflit social, environ 500 personnes ont été intégrées".

Mais la direction n'a pas l'intention de modifier ses pratiques. "Cela est indispensable, et se justifie totalement quand on travaille sur une saison. A chaque fin de saison, l'émission peut s'arrêter. Si tout le monde avait un CDI, la grille ne changerait jamais", expliquait le PDG Mathieu Gallet en juin dernier.

Intermittent pendant 37 ans...

Interrogée, la direction ajoute: "l'intermittence fait l’objet d’un encadrement strict et d’un usage limité. Radio France se conforme strictement aux règles prévues par les textes en vigueur et fait pleinement application de l’accord national professionnel du 29 novembre 2007. Le recours à l’intermittence à Radio France est strictement circonscrit aux cas qui le justifient pleinement, à savoir les métiers listés en annexes de cet accord. Ce strict respect du recours à l'intermittence explique sa baisse significative depuis les 10 dernières années".

Toutefois, Mathieu Gallet admettait: "le risque de requalification en CDI existe quand vous êtes dans la grille depuis longtemps". Par exemple, en 2009, un producteur qui avait travaillé pendant 37 ans comme producteur et animateur, a vu son contrat requalifié en CDI par la justice... 

Les intermittents (CDD-U) à Radio France

Cachets avec charges, hors pigistes (en millions d'euros)
2010: 37,7
2011: 39,6
2012: 39,3

Part dans les charges de personnel (en %)
2010: 10,4%
2011: 10,5%
2012: 10,3%

Source: Radio France

Jamal Henni