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Pourquoi Renault se retire de la Formule E

La Renault de Sebastien Buemi au Grand Prix de Formula E de Paris en mai dernier

La Renault de Sebastien Buemi au Grand Prix de Formula E de Paris en mai dernier - Geffroy van der Hasselt - AFP

Le constructeur automobile a annoncé ce mercredi qu'il quittait la petite sœur électrique de la Formule 1 pour se concentrer sur la discipline reine du sport automobile, dont la visibilité est plus importante.

Alors qu'il avait largement accompagné les débuts de la Formule E, le groupe Renault a annoncé ce mercredi qu'il allait faire ses adieux à la petite sœur électrique de la Formule 1.

Dans un communiqué, le groupe au losange indique ainsi qu'il se retirera à l'issue de la saison 2017-2018 (la saison de formule E s'achevant en juillet et débutant en octobre), la quatrième de cette jeune discipline où ne roulent que des monoplaces électriques.

Cette décision fait écho à l'annonce de Nissan, partenaire de Renault au sein de l'alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, qui avait indiqué mardi qu'elle participerait au championnat de Formule E à partir de la saison 2018-2019.

Des audiences en baisse

Renault y fait d'ailleurs référence en affirmant vouloir travailler "en synergie" avec son partenaire japonais pour "assurer une transition en douceur et capitaliser sur l'expertise et le développement déjà existants". Le groupe au losange compte ainsi se concentrer sur la Formule 1 où il possède une écurie en nom propre et motorise Red Bull, Toro Rosso et bientôt McLaren. Avec, à terme, le titre de champion du monde en ligne de mire. 

Un virage stratégique pour Renault qui n'apparaît pas évident au premier coup d'oeil. La Formule 1 a connu ces dernières années une baisse générale de ses audiences. De 600 millions de téléspectateurs dans le monde en 2008, le chiffre est passé à désormais 400 millions. Et le passage sur la télévision payante de certains diffuseurs (comme en France) ne suffit pas à expliquer cette baisse de 33%. Par ailleurs, les revenus de sponsoring déclinent. Selon le Financial Times, ils sont passés de 950 millions de dollars en 2012, à 750 millions.

Démontrer un savoir-faire

A contrario, la Formule E semble être sur une pente ascendante. Nissan se félicite d'ailleurs d'arriver dans une compétition "en plein essor". De plus, les transferts de technologie paraissent plus immédiats qu'en Formule 1, notamment pour un constructeur qui se veut le leader européen de l'électrique. "En tant que pionniers sur le marché des véhicules électriques, nous avons beaucoup appris sur le véhicule électrique haute performance et la gestion de l’énergie, ce dont nos clients bénéficient directement", explique d'ailleurs dans le communiqué Thierry Kokas, directeur commercial du groupe Renault.

En F1 "à l'heure actuelle, les moteurs et autres technologies sont tellement sophistiqués que le gain pour les véhicules de série est minime", expliquait en mars dernier à BFMBusiness.com Paolo Aversa, professeur de stratégie à la Cass Business School de Londres et spécialiste de la F1.

Interrogé, un porte-parole de Renault Sport explique que '"l'idée d'engagement d'un constructeur dans un championnat est de démontrer son savoir-faire". Or après trois victoires les trois premières saisons de Formule E (avec l'écurie Renault e.dams, NDLR) ce savoir-faire a été démontré et nous avons assis notre leadership et avons accompagné notre volonté commerciale sur les ventes de véhicules électriques: Renault est ainsi le constructeur qui vend le plus de voitures électriques en Europe".

"Sous-médiatisation"

Il explique par ailleurs que Renault a besoin de la Formule 1 comme "vitrine technologique", la discipline continuant d'avoir "une très bonne visibilité malgré les baisses d'audience". Et souligne que les passerelles entre la discipline reine du sport automobile et l'ingénierie civile sont nombreuses, que ce soit aux niveaux technique (pièces de fabrication), technologique (des logiciels qui peuvent être utilisés dans les deux sens) ou humain (des ingénieurs passent régulièrement de la F1 à la division commerciale et vice-versa).

Pour Flavien Neuvy, économiste et directeur de l'Observatoire Cetelem de l'Automobile, la Formule E souffre encore d'un déficit de notoriété important. 

"Ce qui pénalise la Formule E, c’est sa sous-médiatisation. Renault peut certes bénéficier des transferts de technologies vers la série, mais médiatiquement l’impact est très faible. Peut-être vaut-il mieux alors faire l’économie des investissements en Formule E, pour réinvestir en R1D ou dans des sports plus médiatisés comme la Formule 1", conclut-il.

Julien Marion avec Pauline Ducamp