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Pourquoi Twitter ne soutient pas le projet de Macron contre les fausses nouvelles

La proposition de loi relative à la lutte contre les fausses informations sera présentée dans quelques semaines par un(e) député(e) de la commission de le culture

La proposition de loi relative à la lutte contre les fausses informations sera présentée dans quelques semaines par un(e) député(e) de la commission de le culture - Etienne LAURENT / POOL / AFP

La directrice des Affaires publiques de Twitter France soulève les risques d'une loi contre les fake news. En plus d'être difficilement applicable, elle évoque un projet dangereux pour la démocratie qui remettrait en cause le rôle des média.

"En tant qu'entreprise, nous n'avons pas à être l'arbitre de la vérité". En une phrase, Audrey Herblin-Stoop, directrice des affaires publiques de Twitter, résume sa position concernant le projet anti-fausses nouvelles (fake news) d’Emmanuel Macron. Dans un courrier envoyé au site NextInpact, la elle explique pourquoi, selon elle, cette idée ne résoudra rien, sera inapplicable et pourrait même représenter un danger.

Audrey Herblin-Stoop estime que le modèle ouvert de Twitter, qui permet à tous de s’exprimer à propos d'une information publiée est par nature "un puissant antidote aux soi-disant 'fausses nouvelles'". Elle rappelle que "les journalistes, experts et citoyens engagés, main dans la main, corrigent et réfutent en quelques secondes le discours public grâce à leurs Tweets".

Un danger pour la démocratie

Mais surtout, elle soulève un risque majeur que pourrait poser une loi en donnant à un réseau social la responsabilité de déterminer ce qui est vrai ou faux. "Confier ce rôle à des entreprises privées […] est dangereux pour la démocratie et affaiblit activement le rôle vital des médias dans notre société".

Troisième argument: quand bien même une loi obligerait Twitter à supprimer une information considérée comme fausse, ce serait impossible dans l’état actuel des choses. "Nous ne pouvons pas distinguer si chaque Tweet de chaque personne est faux ou non", rappelle Audrey Herblin-Stoop comme pour faire écho au message diffusé ce jeudi 8 mars par Jack Dorsey, patron de Twitter au sujet de la certification des comptes.

Cette réaction va alimenter le débat sur cette loi qui, selon NextInpact, devrait être déposée dans quelques semaines par la commission culture de l’Assemblée Nationale. Le site, qui a obtenu le texte, précise que le choix d’une proposition de loi plutôt qu’un projet "évacue l’obligation de saisir pour avis le Conseil d’État", et évite "l'impératif de rédiger une étude d’impact pour jauger les effets économiques des futures obligations pesant sur les plateformes".

50 millions d’euros en Allemagne

L’idée d'une loi anti-fake news a été dévoilée par Emmanuel Macron en janvier dernier lors de ses vœux à la presse. Le texte qui sera présenté propose de permettre aux consommateurs de connaitre l’identité des contenus sponsorisés et imposera aux plateformes (réseaux sociaux, moteur de recherche, site de partage de contenus et portails d’informations) "des obligations relativement poussées de transparence".

La France n'est pas le seul pays a tenter de lutter contre la désinformation. En janvier, l'Allemagne applique la loi NetzDG qui permet de condamner les réseaux sociaux qui relayent des fake news. Les plateformes risquent une amende qui peut aller jusqu’à 50 millions d’euros s'ils ne suppriment pas dans les 24 heures les contenus litigieux.

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco