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Le prix de cette brique de lait a été fixé par les consommateurs

Certains magasins Carrefour d'Ile-de-France et de Rhône-Alpes ont commencé à vendre cette semaine un lait dont le prix a été fixé sur internet par les consommateurs eux-mêmes. Et l'association à l'origine du projet ne compte pas s'arrêter là.

Dans les rayons de la grande distribution, il y a deux types de produits: ceux de marques dites nationales (Danone, Amora, LU...) et ceux de marques distributeurs (les produits Carrefour, Casino ou Leclerc...). Mais depuis ce lundi 17 octobre, une troisième catégorie a vu le jour en rayon: un produit de marque... de consommateurs. Depuis ce matin, une brique de lait de la marque "C'est qui le patron?!" a faire son apparition dans les rayons de certains supermarchés et hypermarchés Carrefour en Ile-de-France et en région Rhône-Alpes. Une première apparition dans les linéaires avant un déploiement dans tous les magasins de l'enseigne, soit 1.200 magasins au total. Et ce n'est ni Carrefour ni le fabricant qui auront décidé du prix affiché au bas de ce rayon. Si cette brique de lait coûte 99 centimes, c'est parce que les clients de Carrefour en ont décidé ainsi sur le site "La marque du consommateur". 

A l'origine du projet, on retrouve Nicolas Chabanne, une figure montante de l'univers de la grande consommation. L'homme s'était notamment fait connaître il y a deux ans en lançant le collectif "Les Gueules Cassées" afin d'aider les producteurs à écouler leurs fruits et légumes non calibrés dans la grande distribution. Cette fois, il a souhaité aller plus loin en permettant au consommateur de prendre le pouvoir. "Avec la crise du lait, on a eu le sentiment que le consommateur en avait marre d'être co-complice de cette situation, explique Nicolas Chabanne. Nous sommes donc allés trouver 51 producteurs de lait qui étaient au bord de l'asphyxie afin de leur proposer le projet."

Un surcoût de 7 centimes par brique

Cette approche est née un peu au hasard à l'occasion d'une réunion avec des cadres de Carrefour. "On a simplement évoqué l'idée au milieu de la discussion d'une "marque de consommateur", ils ont immédiatement été emballé", confie le fondateur des Gueules Cassées. Un site a alors rapidement été créé pour l'occasion afin que le consommateur décide lui-même du cahier des charges. En fonction de ses réponses le prix de la brique évolue. À date, plus de 10.000 internautes ont participé au vote, fixant le prix à 99 centimes la brique.

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Ce tarif qui permettrait au producteur de lait de vivre convenablement, assure Nicolas Chabanne. "Sur cette somme, 39 centimes vont directement dans la poche du producteur contre 20 auparavant, précise-t-il. Et c'est même 10 centimes de plus que l'accord signé avec Lactalis." Le tout pour un tarif à peine plus élevé que le prix de vente moyen en grande surface (7 centimes de plus). Ce surcoût représente 3,50 euros par consommateur et par an, à raison de 50 briques achetées.

Place maintenant à la pizza

Les 60 autres centimes de la brique de lait son ensuite répartis entre le distributeur, la laiterie du Loiret qui le conditionne et l'association qui s'octroie 5% de la vente, soit 5 centimes. Car cette dernière ne compte pas en rester là. "L'objectif est de faire une vraie marque pérenne, pas un truc sympathique et associatif", précise Nicolas Chabanne. Ainsi, après le lait, l'association compte s'attaquer à la pizza. Elle s'est pour cela associé au site Mesgoûts.fr afin de définir un cahier des charges pour une pizza plébiscitée par le consommateur.

Le concept est le même: ce dernier définit des critères (tomate fraîche origine France, jambon supérieur origine France etc.) et le prix évolue en conséquence. Il est actuellement de 4,84 euros sur le site. Pour passer en phase de production, les deux associations recherchent des fabricants. Approché, Fleury-Michon se serait montré intéressé mais rien n'est signé pour le moment.

Reste à savoir si ces initiatives convaincront les clients. L'internaute "militant" et attentif au devenir des producteurs va-t-il une fois en magasin accepté de payer (un peu) plus cher ses produits? "Là est toute la question, reconnait Nicolas Chabanne. Mais je suis confiant. Depuis quelques temps les initiatives se multiplient comme celle de Faire France qui propose depuis 3 ans du lait équitable en magasin. Si cela ne marchait pas, ils auraient arrêté." 

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco