BFM Business
Industries

Siemens veut-il vraiment faire une offre sur Alstom?

Siemens a-t-il d'autres raisons que la finalisation de son offre pour réclamer des informations sensibles à Alstom?

Siemens a-t-il d'autres raisons que la finalisation de son offre pour réclamer des informations sensibles à Alstom? - -

Avant de préciser son offre sur les activités énergie de l'industriel français, Siemens réclame l'accès à des informations sur le groupe. Quelles sont ces données? Et pourquoi leur transmission est-elle si sensible?

Alstom favorise General Electric mais laisse la porte entrouverte à Siemens. Le Français a annoncé, ce mercredi 30 avril, que son conseil d'administration a voté à l'unanimité en faveur de l'offre de GE. Mais il prend des pincettes vis-à-vis d'un gouvernement qui rechigne à laisser démanteler un fleuron industriel français.

Alors, en attendant le résultat de l'expertise indépendante qu'il a commandé sur le rachat de sa branche énergie par GE, d'ici un mois, il promet d'observer attentivement les offres alternatives. Dont celle que Siemens s'est engagé à formuler, mardi 29 avril.

Le géant industriel allemand, concurrent historique d'Alstom, n'a pas encore livré les détails de cette proposition. Il réclame, au préalable, "l'accès aux informations de l'entreprise française et la permission d'interroger le management d'Alstom durant une période de quatre semaines".

En somme, Siemens demande à son concurrent direct de lui fournir des informations stratégiques à même de lui procurer un panorama complet de la situation financière du groupe, les "due diligences".

Pas d'obligation pour Alstom

Ce que réclame l'Allemand va bien au-delà des données consultables dans les comptes sociaux que l'entreprise est obligée de publier en tant que société cotée. C'est par exemple le montant de sa dette, mais aussi "les grandes lignes de ses projets industriels, les diagnostics internes des forces et des faiblesses de l'entreprise, l'organisation de son haut management, ses projets d'investissements financiers, ses prévisions de rentabilité, etc.", liste Christopher Dembik, analyste chez Saxo Banque.

En droit, rien n'oblige l'inventeur du TGV à fournir ces données confidentielles aux candidats à son rachat partiel. "Le droit boursier est très bien organisé en cas d'OPA, quand 100% des titres sont visés. Mais là, dans les deux cas, il s'agit d'acheter 70% de l'activité. Ce ne sont donc pas les mêmes règles. Il n'y a donc pas de processus organisé", précise Gérard Rameix, le président de l'Autorité des marchés financiers, ce mercredi sur BFM Business.

Un moyen de contrer son futur concurrent?

Le patron de l'AMF avait déjà récemment regretté l'absence de règles à ce sujet dans un cas similaire: le dossier de la cession de SFR, et les reproches de Bouygues à Vivendi qui ne lui donnait pas suffisamment d'informations pour peaufiner son offre.

Dès lors, "les appréhensions d'Alstom (à fournir ces informations) sont compréhensibles. Car pour le conseil d'administration, il est exclu que Siemens reprennent une partie des activités du groupe". L'Allemand part clairement avec un handicap alors que les négociations avec GE ont commencé il y a des mois. "Lui donner accès à des informations si sensibles paraît incongru aux administrateurs", poursuit l'analyste.

"Siemens pourrait très bien ne pas réellement projeter de faire une offre, avance même Christopher Dembik. Il pourrait chercher à obtenir les plans stratégique et opérationnel dans le seul but de mieux contrer son futur concurrent, l'entité qui émergera après l'opération Alstom-GE".

Le titre de l'encadré ici

|||

Ce que propose Siemens

Selon Le Figaro, l'Allemand envisage de mettre entre 10,5 et 11 milliards pour la branche énergie d'Alstom. En échange, il lui céderait l'intégralité de son activité transports (Son train grande vitesse, ses locomotives, mais aussi ses métros). Il serait actionnaire à 19% du nouvel ensemble ferroviaire. En revanche, il récupérerait les métiers signalisation du Français.

Ce que dit Alstom

Un comité ad hoc va être formé au sein du conseil d'administration, composé exclusivement de membres indépendants, pour examiner les deux offres en toute impartialité. Elles seront aussi examinées par un cabinet d'expertise indépendant.

Nina Godart