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Spatial: les entreprises font la guerre des étoiles

Pour concurrencer SpaceX et ses prix cassés, la conquêt spatiale se privatise.

Pour concurrencer SpaceX et ses prix cassés, la conquêt spatiale se privatise. - JM Guillon – ESA - AFP

Airbus et Safran ont annoncé ce mercredi la mise en place de leur coentreprise pour fabriquer la nouvelle fusée européenne: Ariane 6. En Europe comme ailleurs, la conquête spatiale se privatise.

La conquête de l'espace, jusqu'ici prérogative des Etats qui démontraient leur puissance par leurs succès dans ce domaine, se privatise. En Europe, Airbus Group et Safran vont développer conjointement Ariane 6, le nouveau modèle de lanceur de satellite sur lequel se sont mis d'accord les ministres européens en charge de l'espace mardi à Luxembourg.

Les deux groupes, principaux fournisseurs d'Arianespace, ont annoncé ce mercredi 3 décembre le lancement d'une coentreprise à cette fin: "Airbus Safran Launchers". Les Etats garderont un droit de regard sur la mise au point de la nouvelle fusée, dans laquelle ils comptent investir 8 milliards d'euros. Mais le projet sera piloté en grande partie par le privé.

Des agences spatiales interventionnistes

Jusqu'à présent, le marché spatial européen était un millefeuille de différentes agences, dont l'ESA, l'agence spatiale européenne, ou encore le CNES, l'agence française de l'espace, chacune dotée de son propre service de R&D. Des agences qui, du fait qu'elles "donnent l'argent", se permettaient d'intervenir "de façon extrêmement détaillée dans la définition des produits, l'organisation… ce qui entraine des coûts", regrettait en 2013 François Auque, le président d'Astrium, sur BFM Business.

Désormais, le duo Airbus-Safran devrait procéder selon une méthode industrielle. La recherche et développement sera mutualisée, les méthodes de fabrication calquées sur celles du privé: optimisation, meilleure mise en concurrence des fournisseurs ou encore mise en commun des achats… L'objectif est de réduire les coûts de lancement au kilo dans des proportions significatives, de l'ordre de 40%.

Les agences se sont en outre décidées à offrir aux industriels de la visibilité à long terme, puisque "elles se sont engagées mardi à acheter 5 Ariane par an à partir de 2020", a expliqué Stéphane Israël, patron d'Arianespace, sur BFM Business ce mercredi (vidéo ci-dessous).

Privatisation, restructuration et consolidation

Pour autant, "beaucoup reste à faire", a estimé Tom Enders, le patron d'Airbus, selon qui il faut notamment transformer "la manière dont les agences spatiales institutionnelles opèreront et interagiront avec l'industrie à l'avenir".

Miser sur le privé pour développer des projets plus compétitif est un mouvement global, en Europe mais aussi aux Etats-Unis. Les entreprises de l'aérospatial se rapprochent, se restructurent, se serrent la ceinture. Areva a ainsi annoncé le 2 décembre avoir cédé une petite filiale d'une vingtaine de salariés, Aerospace Integration à AIP Aerospace, un acteur américain de référence du secteur, qui fournit des solutions d'assemblage et des structures aux géants Airbus, Boeing, Safran, Lockeed Martin ou encore… SpaceX.

Space X, c'est justement le pionnier, celui qui a initié le mouvement. L'entreprise a révolutionné l'industrie aérospatiale en lui appliquant un modèle low cost. Le groupe a notamment développé des fusées qui se réutilisent, c'est-à-dire qui reviennent intactes sur terre plutôt que de brûler dans l'atmosphère. Avec d'énormes économies à la clé: envoyer du fret -et bientôt des hommes- vers la station spatiale internationale ou lance des satellites coûte moitié moins qu'avec Ariane. 

Mathieu Sevin et N.G.