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Tesla commence à faire vraiment peur à Wall Street

Le constructeur américain spécialiste des véhicules électriques a enregistré une perte de 620 millions de dollars au cours du dernier trimestre.  (image d'illustration)

Le constructeur américain spécialiste des véhicules électriques a enregistré une perte de 620 millions de dollars au cours du dernier trimestre. (image d'illustration) - Tesla Motors - Alexis Georgeson

La marque automobile californienne vient d'enregistrer sa plus grosse perte trimestrielle. Alors que les difficultés s'accumulent pour la production de la Model 3, sa première berline grand public, Elon Musk doit regagner au plus vite la confiance des marchés.

Rien ne va plus chez Tesla. Alors que son patron et fondateur, Elon Musk, a promis de révolutionner l’industrie automobile avec des véhicules propres bardés de technologies dernier cri et son usine californienne futuriste, le constructeur automobile vient d’enregistrer une perte trimestrielle de l’ordre de 620 millions de dollars (530 millions d’euros).

L’entreprise est ainsi en passe de connaître sa huitième perte annuelle depuis son entrée en Bourse le 29 juin 2010. Mercredi 1er novembre, à Wall Street, le titre perdait 5% dans les échanges électroniques suivant la clôture.

Les espoirs reposant sur la Model 3 ont pourtant fait gagner plus de 50% à l’action depuis janvier. En avril, Tesla est même parvenu brièvement à ravir à GM la couronne de premier groupe automobile américain par capitalisation boursière. Mais depuis un mois, le vent a toutefois tourné.

Les retards de production s'accumulent chez Tesla 

En octobre, Tesla a révélé n’avoir produit, entre juillet et septembre, que 260 exemplaires du Model 3. Contre un objectif initial de 1.500 unités. Or, cette berline de milieu de gamme vendue 35.000 dollars (30.000 euros) et dont le carnet de commandes est plein, a pour objectif de transformer Tesla en constructeur de masse. 

Interrogé sur cette piètre performance, le constructeur dénonce des "goulots d’étranglement" dans la production sans donner davantage de détails. En réponse, l’entreprise a licencié 700 employés, soit 2% de ses effectifs, dont certains militaient pour la création d’une section syndicale au sein de l’usine.

Tesla -qui envisage d'atteindre la barre des 500.000 véhicules produits (Model S, Model 3 et Model X confondus) en 2018, contre à peine 80.000 en 2016- paraît loin d'avoir trouvé des solutions. Son objectif de produire 5.000 exemplaires du Model 3 par semaine a même été repoussé à la fin du premier trimestre 2018, au lieu du quatrième trimestre 2017.

Le constructeur californien est également moins ferme sur l'objectif d'augmenter la production à 10.000 unités par semaine en 2018. "Il y a beaucoup d'incertitudes actuellement", a admis Elon Musk, lors d'une conférence téléphonique, parlant d'"enfer de la production". "Nous ferons aussi vite que possible", a toutefois assuré le fondateur de la marque californienne en promettant un nouveau point en janvier.

La Model 3, est-elle seule responsable de cette situation ? 

"Tesla fait enfin face à la réalité. Il comprend qu'il produit des voitures et pas seulement des idées", estime Jessica Caldwell, expert au cabinet spécialisé Edmunds.com.

"Toute la croissance devait venir de la Model 3. Vu ces contretemps, les gens veulent des réponses", renchérit Akshay Anand, chez Kelley Blue Book. "Où va l'argent dépensé? Que se passe-t-il? Elon Musk ne se disperse-t-il pas un peu trop en dirigeant à la fois Tesla et SpaceX et en proposant son aide à la reconstruction de Porto Rico au moment où la Model 3 a des problèmes?" sont "autant de questions qui se posent actuellement" souligne-t-il. 

Depuis sa création en 2003, Tesla n'a jamais pu honorer ses calendriers de production mais cela n'a pas empêché le groupe d'annoncer une montée en puissance infernale de la fabrication de la Model 3, qui contient beaucoup moins de technologies sophistiquées que les deux autres modèles actuellement produits, les Model S et X.

"Les défis de production d'un modèle de masse sont importants. Pour 500.000 voitures par an, c'est deux lignes d'assemblage avec deux équipes travaillant cinq jours par semaine", avance Maryann Keller, analyste au cabinet éponyme. Or Tesla n'en dispose que d'une, à Fremont, près de San Francisco et a fait des choix industriels discutables, comme celui de fabriquer lui-même les sièges de ses véhicules, là où l'ensemble des constructeurs fait appel à des sous-traitants spécialisés. 

Antonin Moriscot avec AFP