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Test réussi pour une sortie plus rapide des films sur internet

"Welcome to New York", le film sur l'affaire DSK, n'a pas pu sortir simultanément en VoD et en salles

"Welcome to New York", le film sur l'affaire DSK, n'a pas pu sortir simultanément en VoD et en salles - -

Des sorties en vidéo-à-la-demande avant ou en même temps que la sortie en salles ont été expérimentées avec succès, dans le cadre d'un test lancé par le Parlement européen.

Welcome to New York vient encore de le rappeler. Le calendrier de diffusion des films sur les différents supports (salle, DVD, vidéo-à-la-demande, télévision...) est très rigide, en particulier en France, où ce calendrier est fixé par la loi et par décret.

Mais des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent pour faire bouger cette "chronologie des médias". Le Parlement européen lui-même s'est saisi de la question, et a décidé de tester une disponibilité plus rapide de films sur internet -de manière légale et payante, bien sûr.

Illégal en France

En pratique, les test ont porté sur une sortie en vidéo-à-la-demande (Vod) avant la sortie en salles, ou en même temps. Alors que selon la chronologie traditionnelle, le film sort en VoD longtemps après la salle (4 mois en France).

Des tests sont donc menés en ce sens depuis un an par trois consortiums, comprenant notamment Wild Bunch, l'ARP, Fandango, Europa Distribution... Les tests ont porté sur 9 films et 15 pays européens. En France, seul a pu être testée la sortie en VoD trois semaines avant la sortie en salles pour les films Viramundo de Pierre-Yves Borgeaud et Magnifica presenza de Ferzan Ozpetek. En effet, la sortie simultanée en salles et en VoD reste illégale dans l'Hexagone.

Trois enseignements

Les résultats de ces tests ont été présentés lors du Festival de Cannes.

Premier enseignement: les ventes en VoD sont plus importantes lorsque le film sort en même temps en VoD et en salles. Ce qui est assez logique, car la promotion maximale autour d'un film a lieu lors de sa sortie en salles.

Second enseignement, là encore assez logique: une sortie simultanée en salles et en VoD permet de faire des économies dans les dépenses de marketing.

Troisième enseignement: le film est acheté en VoD majoritairement là où le film n'est pas à l'affiche en salles. Cela paraît là encore logique. En effet, "les sorties simultanées en salles et en VoD permettent de rendre accessibles certains films sur l'ensemble du territoire, et non plus sur quelques villes, alors même que la promotion qui est faite est nationale", souligne l'étude.

Elle cite un sondage récent mené pour la Commission européenne, selon lequel 14% des Européens n'ont accès à aucune salle à moins de 30 minutes de chez eux. Et 30% des Européens qui piratent des films assurent le faire car ces films ne sont pas disponibles dans leur pays.

Pas de cannibalisation des salles

Surtout, ce résultat bat en brèche la crainte que la VoD cannibalise les entrées en salles, ce qui reste la grande peur des exploitants de salles. Trois organisations d'exploitants (Europa Cinémas, Cicae et Unic) se sont même publiquement opposés à cette expérimentation.

Et certains tests ont dû être abandonnés devant l'opposition des exploitants. Ainsi, en Espagne, le distributeur de Neuf mois ferme d'Albert Dupontel a renoncé à le sortir en VoD en même temps qu'en salles, car "cela aurait divisé par plus de trois le nombre de salles prêtes à distribuer le film". Précédemment, la sortie de Né quelque part de Mohamed Hamidi simultanément en salles et en VoD "avait provoqué de vives réactions de la part des exploitants espagnols, et un refus catégorique des gros circuits".

Conclusion de l'étude: "il est important de ne pas considérer la VoD dans une opposition avec la salle, mais dans un contexte où la salle est concurrencée par le piratage". Surtout, sortir un film plus tôt en VoD "apparaît, dans un marché saturé, comme une bouffée d'oxygène pour un certain nombre de films, qui peuvent bénéficier d'une exposition accrue, à coûts moindres".

Le titre de l'encadré ici

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Des pionniers aux Etats-Unis

Des sorties en VoD avant ou en même temps que la sortie en salles sont pratiquées couramment aux Etats-Unis. Le distributeur IFC a sorti ainsi près de 200 films indépendants depuis 2008. De son côté, Magnolia a sorti depuis 2007 une vingtaine de films en VoD avant la salle, en commençant par Redacted de Brian de Palma. En Grande-Bretagne, Curzon a sorti près de 75 films simultanément en salles et en VoD depuis 2010. Selon l'étude, "ces sorties alternatives sont présentées dans la presse comme des voies prometteuses pour de nombreux films indépendants, qui leur permettent de contourner les difficultés d'accès aux salles, de bénéficier d'une visibilité beaucoup plus importante, et d'améliorer leur rentabilité. Et les recettes VoD globales dépassent parfois les recettes classiques", comme pour Margin Call de JC Chandor, ou Melancholia de Lars Von Trier.

Jamal Henni à Cannes