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Travail du dimanche: le patronat se divise

Sur le travail du dimanche, des voix discordantes se font entendre au sein du patronat.

Sur le travail du dimanche, des voix discordantes se font entendre au sein du patronat. - Mychele Daniau - AFP

A l'instar du PDG de Carrefour, certains commerçants ne sont pas totalement favorables à l'ouverture des magasins le dimanche, et émettent des réserves sur le projet de loi du gouvernement.

Sauf surprise, le travail du dimanche va bien être étendu. La loi Macron présentée ce mercredi en Conseil des ministres prévoit de donner aux commerçants, non plus 5, mais 12 autorisations d'ouvertures dominicales par an. Cette possibilité serait en outre élargie pour les commerces situés dans les zones très touristiques, comme Paris, et les gares.

La mesure provoque une forte opposition chez les syndicats, qui appellent à une manifestation le 16 décembre. Côté patrons, on entend beaucoup ceux qui réclament la libéralisation, comme le PDG de la Fnac, Alexandre Bompard, ou Jean-Claude Bourrelier, de Bricorama.

Mais d'autres commencent à faire du bruit: ceux qui ne sont pas sûrs de la pertinence du travail dominical, ou qui émettent des réserves sur la méthode envisagée pour le généraliser. Comme Georges Plassat, le patron de Carrefour, qui a fait part de ses doutes ce 8 décembre, jouant de fait le rôle de porte-voix pour les autres. 

> Ceux qui trouvent la méthode de généralisation inadaptée

Georges Plassat est favorable à l'ouverture des magasins de proximité le dimanche, mais pas des grandes surfaces situées en périphérie. Pour lui, les magasins susceptibles d'être visités par des touristes doivent rester ouverts toute la semaine, notamment les supermarchés situés à Paris. En revanche, il n'y a pas lieu d'ouvrir les hypermarchés, estime-t-il, s'inquiétant que "d'une commune à l'autre, les autorisations données par les maires ne sont pas nécessairement convergentes".

A l'inverse, certains dirigeants d'entreprises s'inquiètent d'une potentielle ouverture systématique le dimanche à Paris, où même la maire socialiste, Anne Hidalgo, s'y oppose. Notamment au sein de l'hôtellerie. De manière anonyme, ils expliquent appréhender une concurrence accrue entre quartiers: ceux où les magasins seront ouverts contre ceux où ils ne le sont pas.

Ces patrons craignent que leur hôtel, s'il n'est pas situé dans une zone où les magasins pourront être ouverts le dimanche, perdent en fréquentation. Ils estiment aussi que le dimanche est consacré au départ de la ville, et qu'il n'y a pas lieu de chercher à attirer les touristes ce jour-là.

Enfin, certains petits commerçants parisiens se demandent si la mise en œuvre du travail le dimanche ne va pas leur coûter cher sans être compensée par des revenus supplémentaires. En effet, ils vont devoir trouver un salarié disponible, le rémunérer plus, payer l'électricité un jour de plus, etc. Et si finalement, ces commerçants ne veulent ou ne peuvent ouvrir, ils ont peur de perdre des clients au profit de ceux qui ouvrent. 

> Ceux qui ne veulent pas du tout du travail le dimanche 

Le directeur de Point S, réseau d'entretien de voitures, est leur porte-drapeau. Christophe Rollet estime qu'ouvrir ses magasins le septième jour de la semaine "ne changera rien au chiffre d'affaires des commerces: les consommateurs n'ont pas plus d'argent à dépenser, et les magasins feront le même chiffre sur 7 jours que sur 6".

Pour lui, "d'une ville à l'autre, les dimanches travaillés pourront ne pas être les mêmes, ce qui ne pourra que compliquer encore la situation".

Il alerte aussi sur le coût de l'ouverture le dimanche pour les entreprises: "côté commerçant, cela va rendre plus difficile la rentabilité de l'entreprise qui, en ouvrant le dimanche, devra doubler ses charges, y compris salariales".

Le réseau Maison de la Literie compte aussi des récalcitrants. Son dirigeant, Pierre Elmalek, se prononce pour une "liberté totale des commerçants, quelle que soit la zone". Mais il doit convaincre nombre de ses franchisés, surtout "ceux qui n'ont un seul point de vente, qui s'en occupent seuls ou en couple, et qui souhaitent conserver leur dimanche".

Nina Godart