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Un sac de luxe à prix tout doux, c'est possible

Des chutes de cuirs de luxe et du tissu d'ameublement recyclé pour des cabas canons.

Des chutes de cuirs de luxe et du tissu d'ameublement recyclé pour des cabas canons. - Marli

Marli, une toute jeune marque française de sacs à main, a réussi l'exploit de mixer tissus et cuirs de luxe, modèles uniques et made in France, tout en fixant des prix à mille lieux de ceux des grandes maisons.

Chez Hermès, Dior ou Chanel, impossible d'acheter un sac en cuir pour moins de trois zéros derrière l'unité. Un prix qui s'explique par la grande qualité des matières utilisées, le savoir-faire unique d'artisans français qui oeuvrent à leur confection, l'unicité de chaque modèle. Pourtant, une petite marque dont les sacs combinent ces trois facteurs parvient à les vendre quatre fois moins cher.

Elle s'appelle Marli, a été fondée il y a à peine un semestre, et cartonne déjà. Grâce à un business model inédit: sa fondatrice, Amélie Prêtre, confectionne des cabas à base de tissus industriels recyclés et de chutes de cuir de grandes maisons de luxe. À l'arrivée: des sacs exclusifs, dans des matières haut de gamme, vendu à partir de 85 euros pour ceux en tissus, et 250 euros pour ceux en cuir.

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Avant de fonder Marli, Amélie Prêtre parcourait les brocantes pour trouver des tissus d'ameublement et autres étoffes anciennes, et en faire de grands cabas tous simples, agrémentés d'anses en laiton. Ses modèles, uniques par définition, rencontrent un tel succès auprès de ses amies qu'elle décide d'en faire un vrai business. Mais pour produire en plus grande quantité, elle ne peut plus se contenter de chiner.

Une histoire de rencontres

Pour sa première collection, elle appelle "différents tapissiers pour mettre en place des partenariats. L'un d'eux m'a dirigé vers l'usine de Gravigny, en Normandie, qui fermait ses portes", explique Amélie Prêtre. Le spécialiste du tissu d'ameublement haut de gamme, qui produisait chaque année plus de 200 étoffes à motifs complexes, est en effet en liquidation judiciaire depuis 2014. La jeune entrepreneuse rachète alors "la mémoire de l'entreprise": tous les rouleaux qui restaient des tissages de Gravigny. De la toile de Mayenne au velours côtelé, en passant par le jacquard. 

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Pour la production, là encore, c'est une histoire de rencontre. "Ma mère est tombée malade au moment où j'ai lancé l'entreprise. En lui rendant visite, j'ai fait la connaissance d'une personne en situation de handicap qui travaillait comme couturière au sein d'une Esat (ces structures publiques qui aident les travailleurs handicapés à s'insérer, ndlr). Elle adorait mon cabas et le concept de Marli", raconte Amélie Prêtre. La jeune femme se rend alors sur le site de l'Esat, dans le 94: "le projet leur a plu, la simplicité de confection des modèles et le fait que ce soit des petites séries correspondaient à leur manière de travailler". Un partenariat est conclu, les couturières de l'Esat deviennent les petites mains de Marli.

L'aventure peut alors commencer. Le e-shop est lancé, un showroom ouvre dans Paris. Le succès est quasi immédiat, porté notamment par une mention dans la newsletter aux 2 millions d'abonnés de MyLittleParis, le site qui déniche les pépites de la capitale, et une apparition dans sa Gambettes Box. 

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Autre coup de pouce, celui d'une grande maison de luxe qui contacte Amélie Prêtre il y a quelques semaines. "Cette grande marque m'a appelé pour me demander si je voulais récupérer des cuirs et leur redonner vie pour des cabas". La Maison lui fait signer un contrat de confidentialité, et cède à Marli ses chutes de cuir: "des peaux entières sur lesquelles ils avaient fait des tests pour réaliser des prototypes, d'autres dont la coloration n'est pas tout à fait homogène, qui restent magnifiques mais qui ne correspondent pas aux standards extrêmement élevés du luxe, des petits et des grands modèles, avec une diversité foisonnante de couleurs, de rigidité, d'aspects, de vernis", s'enthousiasme la fondatrice.

Aujourd'hui, la marque a déjà vendu 1.500 cabas, et "ça s'accélère avec Noël", se félicite Amélie Prêtre. Pour le cuir de luxe, "on verra si le partenariat de pérennise, si d'autres maisons nous contactent". De toute façon, la créatrice est confiante pour l'avenir puisque "le concept de recyclage de tissus nous offre des perspectives infinies". La marque planche déjà sur une collection en tissu de transats des années 60, et envisage une ligne plus masculine à base de bâches recyclées. "Peu importe d'où vient la matière, tant qu'elle a une histoire et qu'elle est belle".

Nina Godart