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Vivendi: grand oral réussi pour Vincent Bolloré

L'industriel breton a été applaudi par les petits porteurs

L'industriel breton a été applaudi par les petits porteurs - Eric Piermont AFP

Pour la première fois, l'industriel breton affrontait les actionnaires de Vivendi en tant que président du conseil de surveillance. Sa vision a fait mouche.

Drôle, pugnace, convaincant... Vincent Bolloré a brillamment passé son grand oral devant les actionnaires de Vivendi vendredi 17 avril. C'était la première fois qu'il se livrait à l'exercice en tant que président du conseil de surveillance, poste qu'il occupe depuis mi-2014.

Pourtant, l'exercice n'était pas gagné d'avance. S'il a été applaudi par beaucoup de petits porteurs, d'autres ont été critiques, comme Louis Bulidon: "vous êtes rentré sur un coup de bourse. Votre légitimité est contestable et contestée. Vous n'avez pas de stratégie, et vous me rappelez Jean-Marie Messier", lui a lancé cet habitué des assemblées générales.

D'autres acquisitions en 2015

"Pourquoi voulez-vous que je mette 4 milliards d'euros dans un truc auquel je ne crois pas?", lui a répondu l'industriel breton. Pour lui, "la stratégie me paraît claire". Même s'il ne juge pas opportun de la détailler précisément: "on ne peut évidemment pas vous dire à l'avance ce qu'on faire, qu'on va racheter telle ou telle société". Mais, promis, "en 2015, on ne se contentera pas de l'acquisition de DailyMotion". En particulier, le directoire présentera des cibles potentielles lors d'un séminaire le 12 mai.

En revanche, Vincent Bolloré a semblé écarter des acquisitions dans la presse ou l'édition, disant vouloir faire de Vivendi "un champion européen, pas des médias d'hier, mais de demain".

"J'aime beaucoup la bande à Bébéar"

Globalement convaincant, Vincent Bolloré ne l'est plus tout à fait lorsqu'il chante les louanges de son prédécesseur Jean-René Fourtou -"un personnage remarquable"- avec qui il s'affrontait violemment il y a encore quelques mois. Sans craindre d'en faire trop, il a même ajouté: "j'aime beaucoup Claude Bébéar, un type formidable, et toute sa bande: Jean-René Fourtou, Henri Lachmann... J'ai de l'admiration pour ces gens. La patrie France doit leur être reconnaissante". 

En réalité, l'industriel breton doit ménager cette "bande", car elle domine encore largement le conseil du surveillance de Vivendi. Il a même laissé échapper: "il m'arrive assez souvent d'être mis en minorité au conseil de surveillance". Et il a donné un exemple: lorsque le fonds américain PSAM a exigé que la cagnotte soit redistribuée aux actionnaires, "j'aurai préféré garder tout l'argent. Mais Claude Bébéar était plus raisonnable, et a dit qu'il faudra lâcher du lest".

Finalement, Vivendi a accepté de reverser à ses actionnaires une partie de cette cagnotte. "Cet accord ne me réjouit pas, ce n'est pas une victoire, mais un compromis", a admis Vincent Bolloré.

Le sale caractère de Bertrand Meheut

De même, Vincent Bolloré n'a pas convaincu l'intégralité de l'auditoire quand il a décrit les dirigeants de Vivendi comme "une équipe de gens soudée, qui s'entendent bien et travaillent ensemble". De fait, l'inimitié est de notorité publique entre le président du directoire Arnaud de Puyfontaine et le patron de Canal Plus Bertrand Meheut. De même que la fraîcheur des relations entre Bertrand Meheut et son bras droit Rodolphe Belmer.

Mais le premier actionnaire du groupe (14,5% du capital) n'en tient pas rigueur à Bertrand Meheut, qui le soutient de longue date et a vu son rôle confirmé pour les années à venir. "Bertrand Meheut a un sale caractère, c'est connu: il est breton comme moi!", a ironisé Vincent Bolloré, ajoutant: "j'ai toute confiance en cette équipe", et en les tutoyant tous... Cela rassurera peut-être les dirigeants issus de l'ère Fourtou toujours en place, qui craignent en permanence un coup de balai de l'industriel breton. 

9,4 millions d'euros pour la retraite de Dubos

Les petits porteurs ont d'ailleurs sifflé les rémunérations accordées aux anciens membres de l'équipe Fourtou, à commencer par l'ancien président du directoire Jean-François Dubos, parti en retraite mi-2014 après 23 ans de bons et loyaux services. Ce dernier va toucher une retraite chapeau de 411.611 euros bruts par an, soit 30% de son salaire moyen des trois dernières années.

A noter que Vivendi avait mis en réserve au fur et à mesure de quoi payer cette retraite. Lors du départ de Jean-François Dubos, Vivendi a donc dû prélever dans ces réserves la coquette somme de 9,4 millions d'euros correspondant à cette retraite chapeau...

Les droits de vote double s'appliqueront

Les actionnaires de Vivendi ont accepté vendredi l'application des droits de vote doubles. La résolution contraire, déposée par le fonds de gestion PhiTrust, n'a été approuvée que par 50,15% des actionnaires présents, alors qu'elle nécessitait une majorité des deux tiers pour être adoptée. Cette résolution (déposée par PhiTrust aux cotés de neuf autres actionnaires représentant 2% du capital) demandait la non-application de la loi Florange, qui permet aux actionnaires de disposer d'un droit de vote double par action à partir de deux ans de détention. Le directoire de Vivendi avait appelé à voter contre cette résolution. "Plus de la moitié des sociétés du CAC 40 ont déjà un droit de vote double", a souligné Vincent Bolloré. 

Jamal Henni