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Transports

Voici à quoi pourrait ressembler l'aéroport du futur

Pendant un an et demi, des chercheurs européens ont planché sur la viabilité d'un aéroport avec une piste de décollage et d'atterrissage circulaire qui permettrait aux avions de décoller et d'atterrir en évitant d'avoir le vent de côté. Avec un trafic plus soutenu.

Youtube fait parfois naître des idées révolutionnaires. À force de voir des vidéos d'avions peinant à atterrir en raison du vent de travers, Henk Hesselink, un chercheur néerlandais au centre d'aérospatial des Pays-Bas, s'est demandé s'il ne fallait pas repenser la forme des pistes d'atterrissage. En faisant décoller et atterrir les avions sur un cercle parfait, les pilotes pourraient avoir le vent de face à tous les coups.

L'idée n'est pas complètement nouvelle: dès le début du XXe siècle jusqu'aux années 60, des croquis de piste circulaire ont été imaginés, sans toutefois donner lieu à des expérimentations. Mais depuis plus rien.

De la réflexion d'Henk Hesselink est né un projet appelé The Endless Runway (la piste sans fin). Un projet soutenu par la Commission européenne qui a versé 1 million d'euros pour permettre aux chercheurs de valider le concept. Pendant un an et demi, cinq centres spatiaux européen (le NLR néerlandais, la DLR allemande, l'Onera française, l'Inta espagnol et l'Ilot portugais) ont ainsi planché sur la viabilité de cette piste circulaire.

Compenser la force centrifuge

Ils ont imaginé un aéroport dont les principaux bâtiments (tour de contrôle, hangar, accueil des passagers, zones d'embarquement…) seraient situés au centre du cercle. Les terminaux seraient dispatchés aux quatre coins d'un cercle intérieur plus restreint. La piste d'atterrissage de 11 km encerclerait le tout. Les automobiles, taxis et trains accéderaient à l'aérogare via des routes souterraines.

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- © Onera

Reste une interrogation: comment l'avion peut-il décoller alors que la piste circulaire, applique une force centrifuge qui déporte l'avion vers l'extérieur? "La force centrifuge est compensée par l'inclinaison de la piste qui n'est toutefois pas un plan incliné mais une pente qui devient de plus en plus verticale, de sorte à ce que chaque vitesse corresponde à une position latérale de l'avion", répond Sébastien Aubry, responsable d'unité de recherche Systèmes Aéronautiques à l'Onera.

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Plus il gagne de la vitesse, plus l'avion se déplace vers l'extérieur. La gravité compense alors la force centrifuge. Comme le mouvement est très progressif, les passagers sentent à peine le déplacement à l'accentuation de la pente. L'atterrissage ou le décollage se fait sur environ 4 km, selon le modèle d'avion.

Au-delà de cet aspect technique, les équipes de recherches ont procédé à des tests avec des simulateurs de vol. Ils ont également réalisé diverses études de faisabilité ainsi qu'une comparaison coûts/bénéfices.

Un coût plus élevé

"En un an et demi d'études nous n'avons pas trouver de point bloquant. Néanmoins le problème vient plutôt de la transition avec le système actuel: il faudrait refaire entièrement les aéroports et former les pilotes à ce nouveau type de pistes, ce qui serait coûteux. Cela peut éventuellement être une solution pour des territoires peu équipés", explique Sébastien Aubry.

Par ailleurs, le coût d'un tel aéroport aurait éventuellement de quoi rebuter. Les chercheurs ont ainsi calculé que son coût de construction serait de 10% à 60% plus élevé que celui d'un aéroport "conventionnel".

Mais ce nouveau concept d'aéroport présenterait néanmoins d'importants avantages. Sa capacité pourrait ainsi être supérieure à celle des aéroports conventionnels. Selon les cas de figure, elle s'élèverait de 110 à 146 mouvement d'avions par heure. Un aéroport comme Roissy, affiche lui 115 mouvements par heure, celui d'Heathrow à Londres 80.

L'aéroport étant mieux organisé, il prendrait également moins de place. Les chercheurs estiment que sa surface serait inférieure d'un tiers par rapport à un aéroport traditionnel.

"Du point de vue du gestionnaire d'aéroport, une piste circulaire serait probablement bénéfique car elle permettrait de mettre plus d'avions à occupation égale", explique Sébastien Aubry.

Enfin, l'espace aérien protégé (le "TMA" dans le jargon pour Terminal manoeuvring area) serait plus facile à gérer, permettant aux avions d'optimiser leurs trajectoires. Si bien que les chercheurs estiment que sur un trajet de 1.300 km, la distance de vol pourrait être réduite de 1 à 2%. Ce qui générerait alors des économies de carburant pour les compagnies.