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Voiture autonome: la France accélère

Le gouvernement veut autoriser plus de tests de voitures autonomes.

Le gouvernement veut autoriser plus de tests de voitures autonomes. - Francesc MONTERO - Renault

Selon des informations de nos confrères de RMC, des tests de voitures sans chauffeur ni superviseur vont être autorisés dès cette année en France. Par ailleurs, les tests sont désormais étendus à tout le territoire.

Pays fondateur de l’automobile il y a plus d’un siècle, la France compte bien jouer un rôle majeur dans la révolution qui touche actuellement le secteur: la voiture autonome. Selon des informations de nos confrères de RMC, le gouvernement proposera bientôt un plan dédié à ce véhicule du futur. Il sera intégré dans la loi "Pacte" présentée le 16 mai en Conseil des ministres. L’objectif principal: étendre les tests de voitures autonomes.

Ce que prévoit le projet de loi

Potentiellement, ces tests pourront désormais être réalisés sur tout le territoire, et non plus sur des zones dédiées comme actuellement. Une disposition que laissait déjà entendre la parution au Journal Officiel du décret n°2018-211 "relatif à l’expérimentation de véhicules à délégation de conduite sur les voies publiques" le 28 mars. Le projet de loi prévoit également des tests de voitures sans chauffeur, ni même superviseur derrière le volant. Un superviseur suivra cependant les tests à distance.

Le texte ne porte pas que sur le transport de personne mais aussi sur celui des marchandises. "La circulation d’engins roulants à délégation partielle ou totale de conduite affectés au transport de colis" est ainsi prévue dans le texte, à l’image des tests de livraisons de pizzas via des voitures autonomes que Ford vient de lancer en Floride.

Avec ce plan "Voiture Autonome", le gouvernement se penche surtout sur une question cruciale: la responsabilité lors des tests. Cette question va bouleverser durablement les règles du secteur automobile, qui depuis le début de son histoire se base sur la responsabilité du conducteur.

Quid de la responsabilité

C’est le titulaire de l’autorisation en charge de l’expérimentation qui sera responsable. Il sera ainsi "pécuniairement responsable des amendes" et "pénalement responsable en cas d’accident ayant entraîné un dommage corporel". Le débat sur la responsabilité a été relancé mi-mars suite au décès d’une piétonne à Tempe, en Arizona, tuée par un Volvo XC90 autonome de la société américaine Uber.

Si tous y réfléchissent, par exemple dans le cadre d’un comité de réflexion en Allemagne, ni les constructeurs, ni les géants de la tech ou les compagnies d'assurance n’ont encore donné de position claire sur un tel sujet. "Aucun industriel n’a quoi que ce soit à gagner en se positionnant sur cette question, nous confiait il y a deux semaines Jean-François Bonnefon, chercheur au CNRS qui étudie les comportements en lien avec les technologies. Les réponses doivent plutôt venir des autorités gouvernementales. Mais ce n’est pas si simple. Le comité de réflexion mis en place en Allemagne n’a par exemple pas réussi à se mettre d’accord". Pour fiabiliser les véhicules, et éviter les accidents, les tests sont donc cruciaux. Le décret du 28 mars doit ainsi permettre d’étendre les tests des voitures autonomes de niveau 4.

Des voitures autonomes de niveau 4 sur les routes

Ces voitures autonomes de niveau 4 représentent la dernière étape avant les robotaxis, comme le Renault Symbioz que nous avions essayé il y a quelques semaines. Elles peuvent être conduites pour le plaisir, mais peuvent surtout gérer seules l’ensemble des trajets, sans avoir besoin de l’attention du chauffeur qui peut alors s'assoupir, lire ou écouter de la musique.

L’étape suivante, c’est le vrai robotaxi, qui peut circuler sans aucun humain dans l’habitacle. Certaines navettes comme celles de Navya ou celle d’Easymile, testée Gare de Lyon à Paris, se rapprochent de cet objectif. Elles évoluent cependant encore sur des boucles prédéfinies, parfois sur une route fermée, afin de circuler sans être perturbées par les autres usagers de la route.

En quoi consistent les tests?

C’est tout l’enjeu des tests autorisés par le nouveau décret: faire progresser les véhicules, et leur permettre ainsi de gérer n’importe quelle situation de circulation, notamment en ville. Ces tests pourront désormais avoir lieu sur tout le territoire français, et non plus seulement dans quelques zones concernées.

Jusqu’à présent, les tests de voitures autonomes n’étaient autorisés sur des tronçons de route bien définies, actuellement beaucoup de voies rapides à séparation centrale. PSA testait par exemple ses prototypes sur l’A86, en région parisienne, près de son centre de R&D à Vélizy (Yvelines). Pour les essais de Symbioz, Renault évoluait sur une portion bien définie de l’A13, en Normandie.

Ces tronçons avaient été définis par la précédente législation de 2016. Auparavant, certains constructeurs avaient demandé des dérogations pour des tests ponctuels, au cas par cas. En 2015, PSA avait ainsi rallié Paris à Bordeaux dans un C4 Picasso autonome. Le groupe avait eu besoin d’une autorisation spéciale pour chaque véhicule testé. Désormais, le gouvernement veut délivrer des autorisations plus larges. Les véhicules qui seront testés jusqu’à la fin de l’année devront eux circuler avec une plaque "W garage", les plaques utilisées pour les véhicules non encore immatriculés.

Comment obtenir des autorisations?

Pour obtenir les autorisations, les constructeurs devront toujours déposer des dossiers de demande d’autorisation. Le décret du 28 mars donne quelques pistes pour la constitution de ces dossiers: il faudra d’abord une autorisation du responsable de la voirie et de la police où seront organisés les tests. Le dossier détaillé ne devrait pas varier beaucoup de ceux déposés jusqu’à présent par les constructeurs. "Nous fournissons des fiches techniques des prototypes que nous testons, sur quels types de route, quelles sont les procédures de sécurité", nous expliquait-on, voici peu, chez Renault.

Qui travaille en France sur la voiture autonome?

Tout le secteur automobile français travaille peu ou prou sur cette nouvelle technologie, des bureaux d’étude comme Akka Technologies jusqu’aux constructeurs automobiles (Renault, PSA), des acteurs dédiés comme Navya ou Easymile, ou encore les grands équipementiers tels Valeo. La réflexion est également menée au sein de Vedecom, un institut de recherche sur le secteur. Et l’enjeu est de taille! Selon une étude du cabinet Roland Berger en 2016, les ventes d'automobiles pourraient baisser de 60% en France d’ici 2030, à cause des voitures autonomes.

Pauline Ducamp