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Finances publiques

Crédit d'impôt compétitivité : questions sur son coût

Le coût d'un emploi créé grace au Cice devrait atteindre 190 000 euros

Le coût d'un emploi créé grace au Cice devrait atteindre 190 000 euros - -

Malgré le vote négatif du Sénat, samedi 15 décembre, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi devrait être voté cette semaine dans sa version initiale. Mais gouvernement et parlementaires s'opposent toujours sur son coût et ses conséquences.

Le gouvernement arrive enfin au bout de son chemin de croix. Après plusieurs semaines de polémiques et de discussions avec sa propre majorité, il va obtenir que le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (Cice) annoncé par François Hollande en novembre soit enfin voté. De même que les hausses de taux de TVA au 1er janvier 2014 pour le financer.

Malgré le vote négatif du Sénat, samedi 15 décembre, le collectif budgétaire prévoyant la mise en place du Cice devrait, en effet, être définitivement adopté au plus tard jeudi 20 décembre, après une dernière lecture par l'Assemblée. Il devrait entrer en vigueur dès le 1er janvier prochain, sauf censure éventuelle du Conseil constitutionnel d'ici au 31décembre. Une seconde loi prévoyant d'éventuelles contreparties salariales devraient être débattue en janvier comme l'a promis le gouvernement aux parlementaires PS.

Le Cice va, certes, entrer en vigueur. Mais au delà des interrogations concernant ses effets rééls sur l'amélioration de la compétitivité des entreprises, des questions demeurent sur son véritable impact macro-économique. Quelques chiffres et quelques prévisions expliquent ces incertitudes.

> 190 000 euros : le coût de l'emploi créé grâce au Cice.
Lors des débats au Sénat, le gouvernement a avancé ses prévisions de création d'emploi liées à la mise en place du Cice : 32 000 en 2013, 125 000 en 2014, et 400 000 d'ici à la fin du quinquennat. Le gouvernement reconnait cependant que 100 000 postes pourraient à l'inverse disparaître en raison des hausses de TVA et des économies budgétaires touchant le secteur public. Au final, ce sont donc 300 000 emplois qui devraient voir le jour grâce au Cice.

Ramené au coût du Cice pour le budget à l'horizon 2017, soit plus de 58 milliards d'euros, l'emploi créé grâce à ce mécanisme va ressortir à 190 000 euros. Plutôt cher, mais toujours moins que les 412 000 euros par emploi liés à l'exonération de taxes sur les carburants profitant aux compagnies aériennes selon l'Inspection des finances.

> 20 milliards par an : sauf si les salaires augmentent trop
Selon les estimations du gouvernement, le coût du Cice pour les finances publiques va monter en puissance : 10 milliards en 2014 pour se stabiliser à 20 milliards en 2017. Le réaménagement des taux de TVA à partir de janvier 2014, le développement de la fiscalité écologique à partir de 2016 et des économies budgétaires dès 2013 doivent compenser cette dépense nouvelle.

Mais, comme le remarque François Marc, le rapporteur général PS du budget au Sénat, les 20 milliards d'euros de coût évoqués par le gouvernement ne tiennent pas compte de l'élargissement de l'assiette du Cice liée à la croissance. Or, le gouvernement prévoit que le Cice devrait entraîner une hausse de 0,5 point de croissance grâce à l'amélioration de la compétitivité. Ce qui augmentera d'autant son coût.

Le gouvernement n'a donc plus qu'à espérer que les entreprises limitent au maximum les créations d'emplois et les hausses de salaires pour contenir l'augmentation de leur masse salariale qui sert à calculer le montant du crédit d'impôt. Sinon, le coût pour les finances publiques augmentera.

> Le déficit budgétaire alourdi de 13 milliards ?
Selon Jean Arthuis, l'ancien ministre centriste de l'Economie, "le Cice devra être comptabilisé au titre de dette de l'Etat", bien que le gouvernement ne le fasse pas pour l'actuel Crédit d'impôt recherche (CIR). "N'avons-nous pas érigé la sincérité budgétaire en principe constitutionnel", ajoute-t-il.
"Les entreprises ne constateront-elles pas en 2013 des créances sur l'Etat ? Pierre Moscovici a annoncé que celles-ci seraient négociables. On comprend mieux la raison de la création de la Banque publique d'investissement, qui financera l'Etat pour que les entreprises gardent une trésorerie... Si l'on s'accommode de ce genre d'artifice, de maquillage budgétaire, demain on réalisera une formidable économie en payant en janvier les salaires de décembre".

Selon l'ancien ministre, le déficit prévisionnel de 2013 devrait donc être alourdi de 13 milliards d'euros. Il a d'ailleurs annoncé avoir écrit à Didier Migaud, le Premier président de la Cour des comptes, pour connaître le point de vue de la juridiction financière sur ce point.

Patrick Coquidé