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Finances publiques

Équitation, station de ski, facteurs: les perles de la Cour des comptes

Le Snow Hall d'Amnéville

Le Snow Hall d'Amnéville - User;Tom2 - Flickr - CC

Dans son rapport annuel l'institution aborde de nombreux thèmes dont certains très sérieux comme le coût de la remise à niveau des centrales nucléaires. D'autres semblent plus insolites.

Comme chaque année, la Cour des comptes livre son inventaire à la Prévert de la gabegie publique. De nombreux sujets sont abordés, allant de l'échec des contrats de génération au coût faramineux de la piste de ski intérieur d'Amnéville ou la viabilité de l'institut français du cheval. Morceaux choisis

> Le grand raté des contrats de générations

Ce dispositif a été mis en place au début du quinquennat de François Hollande, pur permettre de maintenir l'emploi des seniors tout en incitant à embaucher des jeunes actifs. L'idée, pour faire simple était que l'expérimenté forme le novice, avec des cotisations patronales allégées pour l'entreprise.

Mais la mayonnaise n'a pas pris. En juillet 2015, on comptait 40.300 contrats soit moins de la moitié de l'objectif du gouvernement qui en visait 85.000 en 2013 et 100.000 après. La Cour déplore "l'absence de mobilisation de la part des partenaires sociaux" sur ce sujet et observe que cet instrument a davantage servi à "titulariser des jeunes au sein de l'entreprise" qu'à les recruter. 

Et de résumer: "l’élaboration d’un seul instrument pour répondre à trois problèmes distincts (le chômage des jeunes, celui des seniors et la transmission des compétences dans les entreprises) a abouti à construire un dispositif hybride, qui tient à la fois de l’obligation de négocier, d’un régime de pénalités et d’un système d’aide". "Il n’est pas surprenant, dans ces conditions, qu’il ait été considéré comme complexe et peu lisible par les entreprises", conclut-elle.

> Le coût de la maintenance des centrales nucléaires

Avec le vieillissement du parc nucléaire, une remise à niveau des 58 réacteurs nucléaires d'EDF s'est imposée. C'est ce que le groupe publique appelle son "programme de grand carénage", représentant des investissements de 56 milliards d'euros sur 11 années.

Un impératif pour la Cour des comptes qui explique que la mauvaise performance du parc nucléaire français a coûté 800 millions d'euros en 2013. Si l'institution valide les intentions d'EDF elle n'en critique pas moins l'organisation. 110.000 recrutements vont être nécessaires d'ici à 2020 pour mener à bien ce programme. Or EDF connaît déjà des difficultés de recrutement."La mobilisation des acteurs n’est pas à la hauteur des enjeux en matière de recrutement et de formation. L’État peine à se mobiliser, notamment en matière de formation professionnelle", souligne à ce titre la Cour des comptes.

Surtout l'institution indique ce programme de carénage pourrait être sensiblement révisé en raison de la loi sur la transition énergétique qui pourrait amener EDF a fermer un tiers de son parc. 

> Des facteurs à tout faire pas forcément rentable

En raison de la dégringolade des courriers à l'heure d'internet (-22% en termes de chiffres d'affaires entre 2009 et 2014), La Poste a tenté de diversifier les activités de ses facteurs. Et, comme le rappelle la Cour des comptes, les différentes expérimentations ont mené à tout et n'importe quoi: collecte de papiers ou de cartouches d’imprimantes usagés, portage de médicaments, de courses ou de livres et DVD, relevé des consommations sur les compteurs, visites de prévention ou de détection des besoins au domicile de personnes âgées ou vulnérables... la liste est longue.

Sauf que la Cour souligne que "ces nouveaux services" représentent aujourd'hui une activité marginale: 6 millions d'euros en 2014 soit une goutte d'eau pour une entreprise réalisant un chiffre d'affaires de 22 milliards d'euros. "La Poste n’a pas choisi les services auxquels elle donne priorité, ni structuré un dispositif opérationnel et commercial pour les commercialiser à grande échelle", regrette la Cour.

La Poste nourrit pourtant certaines ambitions sur ces nouveaux services: 75 millions de chiffres d'affaires en 2017 et pas moins de 200 millions en 2020. "En tout état de cause, même si l’entreprise atteint [ces] objectifs de son plan stratégique, les nouveaux services ne pourront, à l’horizon de ce plan, compenser plus qu’une part minime de la baisse du courrier", considère la Cour.

> Les chevaux n'auront plus leur institut

L'institut français du cheval et de l'équitation (IFCE) est né en 2010 de la fusion de l'établissement public des haras nationaux et de l'École nationale d'équitation. Une fusion dont la Cour des comptes considèrent que "la pertinence n'est pas démontrée". "La fusion des deux établissements préexistants pour créer l’IFCE a été conduite sans qu’une véritable cohérence ait été recherchée", déplore-t-elle.

Le problème est que ce mariage contre nature n'est pas sans coût. Depuis 2010, l'établissement est déficitaire, avec, en cumulé, 29 millions d'euros de pertes. "Des personnels dont les compétences ne correspondent plus aux tâches qu'ils assument, un "parc immobilier démesuré et inadapté", "des missions de service public peu nombreux", les griefs de la Cour sont nombreux. Si bien qu'elle appelle à arrêter les frais et recommande sa suppression pure et simple et d'affecter ses missions aux ministères des Sports et de l'Agriculture. Elle appelle même à vendre son patrimoine immobilier

> La catastrophique piste de ski intérieur d'Amnéville

La Lorraine est une région où parler de besoin de reconversion industrielle est un doux euphémisme. Dans cette logique, la commune d'Amnéville a construit sur un ancien crassier une piste de ski intérieure inaugureé en 2005 pour des travaux d'un montant de plus de 20 millions d'euros. Si l'idée peut paraître séduisante, elle n'a clairement pas démontré sa viabilité économique.

Cette piste d'intérieure, la seule en France, est ainsi déficitaire depuis 2009 pour un total de 4,7 millions d'euros de pertes entre 2009 et 2014. De plus ce déficit est "masqué", car, explique la Cour, "le budget est voté chaque année sur la base de prévisions insincères". Les recettes sont surévalués (64% d'entre elles sont réalisées) alors que les dépenses sont sous-évaluées, n"intégrant pas au niveau nécessaire les dépenses d’électricité et de loyer. 

Ces sous-estimations sont d'autant plus problématiques que cette piste attire de moins en moins les skieurs au fil des ans. La fréquentation est passée de 105.600 à 96.260 visiteurs. Très loin de 153.600 visiteurs par an estimés. Et la Cour ne voit pas vraiment de perspectives d'amélioration de la situation. La commune d'Amnéville ayant elle-même un situation financière de plus tendus, elle ne peut prendre à son compte le déficit de la piste. La Cour n'a ainsi qu'une seule recommandation, simple: "cesser l’exploitation de la piste de ski dans les plus brefs délais".

>L'avenir incertain de la pêche à St-Pierre & Miquelon

La pêche est le moteur de ce petit territoire d'outre-Mer au large du Canada. Mais plusieurs décisions politiques, notamment un moratoire du Canada sur la pêche à la morue, l'ont fragilisé obligeant l'État français à soutenir ce secteur qui générait 400 emplois dans les années 90.

Or malgré plus de trois millions d'euros versés par l'État et les collectivités locales "la filière continue de se dégrader" et il y "a une absence apparente à court terme de solution de revitalisation pérenne". La faute selon la Cour au manque d'implication des acteurs locaux qui, selon elle, doivent être mobilisés pour qu'une éventuelle restructuration de la filière soit réussie.