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Finances publiques

Fraude fiscale: le gouvernement va renforcer les pouvoirs du fisc

Bercy va pouvoir utiliser les fichiers illégaux

Bercy va pouvoir utiliser les fichiers illégaux - -

Les députés vont entamer, ce 19 juin, l'examen du projet de loi réprimant la fraude fiscale et la grande délinquance économique. Parmi les réformes, la possibilité donnée au fisc d'utiliser les informations provenant de fichiers "volés".

Le fisc le souhaitait depuis des années. Grâce à l'affaire Cahuzac, il va l'obtenir. Le projet réprimant la fraude fiscale et la grande délinquance financière qui va être examiné à partir de ce mercredi 19 juin par les députés donnera à l'administration fiscale la possibilité d'exploiter toutes les informations concernant un contribuable "suspect". Et ce, quelle qu'en soit l'origine : documents officiels comme fichiers volés ou récupérés auprès "d'informateurs" anonymes...

La pratique était bien entendue utilisée depuis longtemps par le fisc mais discrètement et de manière totalement officieuse. On se souvient ainsi que le fisc avait utilisé en 2008 sous Eric Woerth le "fichier volé" d'HSBC contenant quelque 3.000 noms de contribuables français disposant de comptes non déclarés à l'étranger.

La Cour de Cassation partagée

Sauf que ce genre de procédé ne tenait pas forcement devant la justice, fragilisant ainsi la position du fisc. Dans deux arrêts récents, la chambre commerciale de la Cour de cassation a confirmé l'annulation de perquisitions dans le cadre d'investigations fiscales à l'encontre de certains contribuables.

Selon elle, la procédure ne pouvait être valablement fondée sur des éléments qui, bien que transmis à l'administration fiscale par le parquet, avaient une origine illicite.

En revanche, la chambre criminelle de la même Cour de cassation permet à une juridiction pénale de condamner un fraudeur en se fondant sur des documents issus d’un vol ou sur des enregistrements sonores réalisés illégalement "à condition que ces illégalités ne soient pas le fait des enquêteurs ou des magistrats", précise l'étude d'impact du projet de loi.

Que dira le Conseil constitutionnel ?

A condition naturellement que le Conseil constitutionnel ne censure pas une telle disposition s'il est amené à examiner le texte, ce type de procédure devrait donc avoir désormais une véritable base légale.

Elle permettra de "sécuriser les procédures d’enquête, de saisie, à l’exclusion des visites domiciliaires, de contrôle, d’imposition et de rectification mises en œuvre par l’administration fiscale", explique l'étude d'impact rédigée par Bercy.

L’article 10 du projet de loi permettra ainsi à l’administration fiscale d’utiliser tout document, quelle qu’en soit l’origine et sans que puisse lui être opposé le caractère illicite du mode d’obtention de ce document.

Une condition toutefois : qu’il ait été régulièrement transmis par la justice ou par des autorités fiscales étrangères dans le cadre de la mise en œuvre d’un droit de communication ou d’une assistance administrative internationale.

Autre gros bémol cependant à cette nouvelle possibilité, la loi ne devrait toujours pas autoriser les perquisitions aux domiciles de fraudeurs basées sur des informations "volées"...

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|||sondage|||904

Le titre de l'encadré ici

|||Les principales dispositions du projet de loi:

> Création d'un parquet financier au niveau national
> Compétences élargie de la brigade de répression de la délinquance financière
> Possibilité pour les associations anti-corruption de se porter partie civile
> Création du délit de fraude fiscale en bande organisée et aggravation des peines pour fraude complexe
> Confiscation du patrimoine en cas de condamnation d'une personne morale pour blanchiment
> Extension de la confiscation des biens d'un condamné pour fraude

Patrick Coquidé