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Gouvernement et opposition ferraillent sur la "rigueur"

Les mesures budgétaires décidées par le gouvernement français n'annoncent pas le retour de la rigueur, a assuré vendredi son porte-parole, Luc Chatel, accusant l'opposition d'entretenir un débat purement sémantique à ce sujet. /Photo d'archives/REUTERS/Ja

Les mesures budgétaires décidées par le gouvernement français n'annoncent pas le retour de la rigueur, a assuré vendredi son porte-parole, Luc Chatel, accusant l'opposition d'entretenir un débat purement sémantique à ce sujet. /Photo d'archives/REUTERS/Ja - -

PARIS - Les mesures budgétaires décidées par le gouvernement français n'annoncent pas le retour de la rigueur, a assuré vendredi son porte-parole,...

PARIS (Reuters) - Le gouvernement français n'a pas engagé de plan de rigueur, contrairement à ce que dénonce l'opposition, mais y sera contraint s'il ne poursuit pas sa politique de réduction des dépenses publiques, déclare François Fillon.

Le Premier ministre a annoncé jeudi une cure d'austérité pour le pays, sur fond de crise grecque, avec un gel en valeur des dépenses de l'Etat sur trois ans, une baisse de 10% des dépenses de fonctionnement et cinq milliards d'euros d'économies sur les niches fiscales.

La gauche voit dans ces mesures un plan de rigueur qui ne dit pas son nom. A ses yeux, le gouvernement utilise la crise grecque pour donner un "tour de vis social" en France.

"Nous sommes dans une gestion qui n'est pas un plan de rigueur", a souligné François Fillon lors d'une conférence de presse commune avec son homologue portugais, José Socrates.

"De la même façon que pendant deux ans vous avez évoqué (...) une récession qui n'existe pas, ne refaites pas la même erreur en parlant d'un plan de rigueur qui n'existe pas et qui n'existera pas à condition que nous mettions bien en oeuvre la politique économique qui est la nôtre", a-t-il dit à l'adresse des journalistes.

"Si nous ne le faisions pas, alors dans quelques années, nous nous trouverions avec une situation difficile qui conduirait là à mettre en place un plan de rigueur", a ajouté le Premier ministre.

REVENIR SUR LES AVANTAGES FISCAUX

Pour l'ancien ministre socialiste de l'Economie Michel Sapin, "il ne faut pas se leurrer (...), nous sommes dans un plan d'austérité d'une très grande dureté".

Le député socialiste Claude Bartolone estime que la majorité doit revenir sur les avantages fiscaux qu'elle a accordés aux plus aisés.

"C'est une erreur d'essayer de faire croire que l'on peut s'en sortir en donnant encore un coup au pouvoir d'achat notamment des retraités, des salariés, des chômeurs", a-t-il dit sur France 2. Le gouvernement "essaie beaucoup plus d'utiliser la Grèce que de répondre à la préoccupation des Français et de la France", a-t-il ajouté.

"Il faut cesser de prendre les Français pour des imbéciles", déclare le Parti communiste dans un communiqué. "Le gouvernement profite de cette crise pour renforcer son soutien aux marchés financiers au détriment des intérêts de la population".

Force ouvrière considère qu'on est passé cette semaine "de la rigueur grecque à l'austérité française". Ces mesures seront "encore accentuées lors de la conférence sur les déficits publics" du 20 mai, prévient dans un communiqué le syndicat selon qui "le remède de cheval risque de tuer le cheval".

Un sommet social est prévu lundi à l'Elysée.

L'OPPOSITION JOUE SUR LES MOTS

Jérôme Cahuzac, président socialiste de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, note dans le journal Le Monde que ce tournant, mis en avant "dans une mise en scène dramatisée", est déjà inscrit dans le programme de stabilité transmis en janvier à Bruxelles.

La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a insisté jeudi sur la nécessité de réduire les déficits, établissant elle-même le parallèle avec la Grèce, au coeur d'une crise politico-budgétaire sans précédent qui ébranle les marchés.

"La souveraineté nationale est en cause", a déclaré Christine Lagarde au Sénat. "Je ne voudrais pas qu'on se trouve dans la situation où est la Grèce, je ne voudrais pas qu'on perde notre notation", a-t-elle dit par la suite sur Canal+.

Pour Luc Chatel, porte-parole du gouvernement, l'opposition joue sur les mots. "C'est un vrai débat politique, ce n'est pas un débat sémantique, l'affaire de la rigueur", a-t-il dit vendredi sur RTL.

"Nous ne voulons pas de la rigueur parce que c'est l'augmentation des impôts et ça pourrait briser le début de reprise que nous connaissons", a-t-il souligné.

Le Parti socialiste a prédit une "cure d'austérité salariale pour la fonction publique" mais en l'état actuel des choses, il est impossible, selon Luc Chatel, d'affirmer que ces mesures de restriction budgétaires se traduiront pas un gel des salaires des fonctionnaires pendant trois ans.

"Laissons les discussions se tenir entre l'Etat et les partenaires sociaux", a-t-il ajouté.

Le président de l'Autorité des marchés financiers (AMF), Jean-Pierre Jouyet, a salué les "signaux" envoyés par le gouvernement. "Que l'on soit de gauche, de droite ou du centre, ce serait mentir que de faire croire qu'on va vers des années faciles", a-t-il dit sur i>Télé.

Laure Bretton et Sophie Louet, édité par Gilles Trequesser