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Hollande et Mitterrand: deux présidents contraints au libéralisme

François Hollande et François Mitterrand ont tous les deux émis d'importantes critiques contre le capitalisme

François Hollande et François Mitterrand ont tous les deux émis d'importantes critiques contre le capitalisme - Gérard Malie - AFP

Les deux présidents de la République avaient été élus sur des promesses de campagne qui montraient leur hostilité envers le capitalisme et la finance. Mais une fois élus, la conjoncture les a amenés à modifier profondément leur discours.

François Hollande s’est rendu à Jarnac ce vendredi 8 janvier pour commémorer les 20 ans de la mort de François Mitterrand. Est-ce aujourd'hui bien pertinent de faire un parallèle entre les deux chefs d'État?

Il y a un terrain sur lequel le rapprochement est intéressant: celui de leurs discours respectifs sur la finance et les entreprises. Petit retour en juin 1971, lors du congrès socialiste d'Épinay, quand François Mitterrand avait frappé un grand coup contre le capitalisme.

"Celui qui ne consent pas à la rupture avec l'ordre établi, avec la société capitaliste, celui-là je le dis il ne peut pas être adhérent du parti socialiste", s'exclamait-il. Lors du même discours, François Mitterrand avait prôné "une rupture avec toutes les puissances de l'argent, l'argent qui corrompt, qui écrase, qui pourrit jusqu'à la conscience des hommes".

41 ans plus tard, en janvier 2012, François Hollande prononçait son discours phare de campagne présidentielle, le discours du Bourget, très à gauche, où il avait fait de la finance son ennemi juré!

"Mon véritable adversaire, il n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti, il ne présentera jamais sa candidature; il ne sera donc pas élu. Et pourtant il gouverne. Cet adversaire c'est le monde de la finance", déclarait-il.

De "l'esprit d'entreprise" à "j'aime l'entreprise"

Quand ils se sont fait élire, Mitterrand et Hollande étaient tous les deux donc des candidats étiquetés contre l'argent et la finance. Mais dans l'exercice du pouvoir, chez François Mitterrand, très vite le discours va changer. Quelques mois après son arrivée à l'Élysée, en décembre 81, il va sur le campus de HEC pour fêter le centenaire de la célèbre école.

Et là, le président lâche cette phrase: "Il faut que naisse un esprit d'entreprise, non seulement au niveau de chacune des entreprises françaises, mais aussi à l'échelle de la nation". À l'époque, la trame du discours avait été élaborée entre autres par un jeune énarque sorti aussi de HEC, un certain François Hollande...

Ce discours de François Mitterrand n'est d'ailleurs pas sans rappeler aussi un certain Manuel Valls, qui 32 ans plus tard en août 2014 lâchait sur le campus de HEC son désormais célèbre "J'aime l'entreprise".

La "loi des deux ans"

Mais le parallèle le plus saisissant entre François Hollande et François Mitterrand reste le timing du changement de cap de politique économique, comme s'il y avait une "loi des 2 ans". En gros, après deux ans d'exercice de pouvoir, en 83, François Mitterrand fait demi-tour toute. Un tournant de la rigueur, qui marque le début d'un processus de privatisations après une vague de nationalisations des entreprises.

Idem pour François Hollande. Deux ans après son arrivée à l'Élysée, il change de cap de politique économique, lors de ses vœux pour 2014. "En 2014, nous aurons besoin de la mobilisation de tous, c'est pourquoi je propose un pacte de responsabilité aux entreprises. Il est fondé sur un principe simple: moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur leurs activités et en même temps une contrepartie; plus d'embauches et de dialogue social", affirmait-il alors.

Au final, Hollande-Mitterrand, c'est aussi l'histoire de deux chefs d'État qui se sont retrouvés chacun piégés en début de mandat par des promesses de campagne. Et qui ont mis un certain temps à assumer un discours plus libéral que celui sur lequel ils s'étaient fait élire.