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"J'ai régulé la finance": François Hollande a-t-il exagéré ?

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Durant l'allocution télévisée au cours de laquelle il a annoncé qu'il ne serait pas candidat, le président sortant a dressé l'inventaire de ce qu'il a réalisé durant son quinquennat. François Holllande a notamment affirmé avoir “régulé la finance". Est-ce exagéré?

Réalité édulcorée ou affirmation erronée? Dans son allocution télévisée destinée à expliquer qu'il ne serait pas candidat à sa réélection en 2017, François Hollande a dressé un bilan plus ou moins précis des mesures qu'il a prises à la tête du pays.

Si presque toute la classe politique s'est accordée pour dire que le chef de l'État avait fait preuve de lucidité en renonçant à se présenter, la longue liste de ses actions qu'il a égrené est loin de faire l'unanimité. L'une d'elle a pourtant été relativement peu commentée.

"J’ai également régulé la finance, oui la finance, et le système bancaire, a-t-il insisté. Parce que ce que j’avais trouvé en 2012 était source de tous les risques."

En entendant cette phrase, certains se sont demandés s'il avait réellement fait quelque chose en ce sens.

C'est surtout l'Europe qui a régulé la finance

En matière de régulation bancaire. François Hollande n'a été, en fait, à l'origine que d'une seule mesure: la loi de séparation et de régulation des activités bancaires du 26 juillet 2013. Un intitulé qui peut paraître assez "excessif", estime Gautier Bourdeaux, directeur du Master 2 "banque et finance" à l'université Paris 5 Descartes. "C'est une bonne loi, concède-t-il. Mais sa portée reste limitée".

Même son de cloche chez Jérôme Lasserre, maître de conférences à l'université de Strasbourg et auteur de l'ouvrage Droit de la régulation bancaire. Ce nuance la critique en assurant qu'il y a eu certaines avancées grâce à cette loi, notamment sur la "protection des clients fragiles".

"En matière financière, cette loi n'a pas été exceptionnelle, elle a simplement étendu les pouvoirs des enquêteurs des marchés financiers. En matière bancaire, il y a eu de bonnes choses. Mais c'est beaucoup plus mesuré que ce à quoi on s'attendait (en 2012)".

Donc "rien de révolutionnaire", s'accordent à dire les deux universitaires. L'essentiel de l'arsenal de la régulation de la finance et des banques a effectivement été réalisé au niveau européen. Des mesures qui ont commencé à être appliquées par la Commission européenne dès la fin de la "crise des subprimes" à partir de ... 2011. 

“Il n’y est strictement pour rien”

La France est très active au niveau de l'UE. Donc il peut paraître normal que François Hollande veuille s'approprier les résultats de ces mesures.

"Mais il n'y est strictement pour rien", souligne Jérôme Lasserre. "Ce serait 'Tartampion', les mesures seraient imposées de la même façon (...). Il (François Hollande) a pris le train en marche".

Sa campagne présidentielle de 2012 avait été marquée par le discours du Bourget où il avait affirmé: "Mon véritable adversaire, (...) c'est le monde de la finance". De cette déclaration pleine d'entrain n'a donc pas résulté grand chose, alors que le candidat Hollande promettait de scinder en deux les opérations "classiques" des banques de leurs opérations spéculatives.

La finance est même devenue proche de l'exécutif à en croire son ministre des Finances: "Notre amie, c'est la finance, la bonne finance", s'amusait Michel Sapin en 2014. Un grand écart qui montre que le bilan du quinquennat dans ce domaine n'est pas aussi clair et définitif que ce que l'affirmait le président jeudi soir.

James Abbott