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Economie et Social

L'Assemblée nationale adopte le "droit à l'erreur"

Le "droit à l'erreur", nouvel essai pour améliorer les relations avec l'administration.

Le "droit à l'erreur", nouvel essai pour améliorer les relations avec l'administration. - Philippe Huguen - AFP

En cas d'erreur dans une déclaration administrative, ce sera à l'administration de prouver la mauvaise foi de l'usager pour sanctionner ce dernier. Le gouvernement évoque une "révolution du quotidien".

C'était l'une des mesures fortes du programme économique d'Emmanuel Macron. L'Assemblée a voté mardi soir l'article phare du vaste projet de loi sur le "droit à l'erreur" qui permettra, sous réserve d'être "de bonne foi", d'éviter des sanctions de l'administration dès le premier manquement, une "révolution du quotidien" selon le gouvernement.

Cet article, adopté à main levée au premier jour de l'examen du texte sur "un État au service d'une société de confiance" en première lecture, est sa "pierre angulaire", selon le gouvernement. "Largement évoqué" pendant la campagne par Emmanuel Macron, il est présenté comme "la possibilité pour chaque Français de se tromper dans ses déclarations à l'administration sans risquer une sanction dès le premier manquement". Ce sera à l'administration de prouver que l'usager était de mauvaise foi.

"La généralisation du #droitàlerreur adoptée à l'instant par l'Assemblée! C'est une révolution dans les relations entre administrations et administrés. C'est aussi une attente forte des agents publics qui veulent plus de marges d'initiative!", a salué sur Twitter le ministre de l'Action et des Comptes publics Gérald Darmanin.

Un droit "limité à la première erreur"

Dans un hémicycle clairsemé, l'article a fait l'objet de quelques retouches, notamment pour clarifier, à l'initiative des Insoumis, que le droit à l'erreur est bien "limité à la première erreur". Les députés ont par ailleurs adopté dans la foulée un amendement du gouvernement destiné à empêcher le blocage d'une demande d'attribution de droits lorsqu'il manque une pièce non essentielle.

D'autres articles restaient à examiner sur le droit à l'erreur. En matière fiscale, est ainsi prévu que si l'administration détecte une erreur de bonne foi dans le cadre d'un contrôle, les intérêts de retard seront réduits de 30%. Si c'est l'usager qui rectifie son erreur de lui-même, les intérêts seront réduits de moitié.

"Un renoncement de l'État"

À l'ouverture des débats sur ce texte qui compte quelque 40 articles, le ministre a dit entendre "les Français qui aiment leurs services publics mais pas leurs administrations", s'appuyant sur une lettre de griefs que lui a envoyée un certain Alexandre. Le droit à l'erreur, qui ne s'appliquera pas à un certain nombre de cas, comme les atteintes à la santé publique, "ce n'est pas un droit à la fraude. C'est un droit de régulariser une erreur commise de bonne foi", a souligné le rapporteur LREM Stanislas Guerini, qui plaide pour un triptyque: une administration "qui conseille, dialogue et s'engage".

Les communistes y voient, "un renoncement de l'État", Jean-Paul Dufrègne observant notamment qu'il n'y a pas de définition de la "bonne foi" ce qui peut conduire à de "l'arbitraire". "C'est une loi de défiance envers l'État et les fonctionnaires", a renchéri le chef de file Insoumis Jean-Luc Mélenchon, pronostiquant aussi que "le contentieux va exploser".

Si la démarche a été globalement saluée par la socialiste Valérie Rabault, elle a déploré un manque de consultation des fonctionnaires et défendu vainement un renvoi en commission. À droite, l'UDI-Agir a jugé que le texte était une "bonne première pierre" pas encore "suffisante", et le chef de file des LR Christian Jacob a dit attendre de voir "comment nos amendements vont être traités sur un certain nombre de sujets sensibles comme l'agriculture ou les éoliennes". Marine Le Pen, a évoqué pour sa part un texte qui va "globalement dans le bon sens" malgré des "imperfections".

Répondre "à l'attente des usagers du service public"

Jugé "fourre-tout" par certains élus, le projet de loi traite de sujets aussi divers que la modification des procédures pour l'obtention d'un permis pour l'installation de parcs éoliens en mer ou de la possibilité de dons aux associations de culte par SMS.

Il veut développer des expérimentations et comprend également des mesures pour répondre "à l'attente des usagers du service public", comme l'expérimentation d'un référent unique, une adaptation des horaires d'ouverture, un numéro d'appel non surtaxé ou zéro papier d'ici à 2022 via la dématérialisation. Le ministre a prévenu que ce ne serait pas "un énième texte de simplification" et qu'il s'opposerait à des amendements "bavards". Les députés devront encore en examiner plus de 800 d'ici à la fin de la semaine.

P.L avec AFP