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Finances publiques

Le grand perdant de l'euro faible s'appelle... Laurent Fabius

Le ministre des Affaires étrangères devra trouver de nouvelles recettes durant l'année

Le ministre des Affaires étrangères devra trouver de nouvelles recettes durant l'année - Patrick Kovarik-AFP

La baisse de l'euro fait les affaires de nombre d'entreprises mais pas du patron du Quai d'Orsay. Son budget 2015 a été établi sur la base de 1 euro à 1,36 dollar alors qu'il est à moins de 1,20 aujourd'hui. Conséquence des effets de change, il pourrait manquer plus de 50 millions dans les caisses du ministère des Affaires étrangères en fin d'année.

Pourvu que l'euro ne baisse pas davantage ! C'est ce que doit penser Laurent Fabius et les hauts responsables du Quai d'Orsay.

Car si la baisse de 13% en six mois de la monnaie européenne face au dollar peut permettre aux industriels français de regagner en compétitivité, il plombe en revanche les comptes du ministère des Affaires étrangères.

Hypothèses erronées

Au printemps dernier, le budget du Quai d'Orsay (3 milliards d'euros) a été établi sur l'hypothèse d'un euro valant 1,36 dollar alors que la devise européenne s'échange aujourd'hui pour 18 cents de moins. Lors de la discussion budgétaire, cet automne, l'euro était déjà tombé à 1,26 dollar.

Le rapporteur des crédits de la diplomatie française, le député PS Pascal Terrasse, avait alors fait ses calculs : un tel écart se traduirait en 2015 par un surcoût pour le Quai d'une cinquantaine de millions d'euros, chiffre confirmé alors par les services de Laurent Fabius. Avec un euro qui se rapproche de la parité avec le dollar, le manque à gagner sera donc logiquement plus élevé. 

Contributions payées en dollars

De nombreuses dépenses du ministère sont, en effet, payées en devises étrangères, en dollars essentiellement. Elles dépendent donc des taux de change. Ainsi, les rémunérations des agents français en postes à l’étranger dans la zone dollar seraient réévaluées grâce au jeu du mécanisme de change-prix qui évite à ces personnes une perte de pouvoir d’achat. "Le ministère n’a pas chiffré ce montant, qui représente sans doute plusieurs dizaines de millions d’euros, dans la mesure où, étant calculé avec un certain décalage, ses effets ne se feraient pas sentir en 2015, mais plutôt en 2016 et 2017", explique Pascal Terrasse dan son rapport.

Quant aux rémunérations des agents locaux (chauffeurs, secrétaires, personnel d'entretien...), elles représentent 106 millions d'euros, totalement payées en monnaie locale. La perte liée à un euro faible pourrait atteindre sur ce poste au minimum 2 millions d'euros en 2015.

C'est aussi le cas des crédits de fonctionnement courant des ambassades et des consulats, et surtout de la contribution financière de la France aux organisations internationales. Cette dernière contribution s'élèvera au total à 794 millions d'euros en 2015, dont 104 millions pour l'ONU et 37,2 millions pour l'Otan. Or, les trois quarts de ces sommes sont libellées en dollars. Un euro à 1,26 dollar plutôt qu'à 1,36 représentait déjà une perte de 43 millions pour le Quai. A 1,20 dollar, la facture sera encore plus salée.

Achat de devises

Un autre élément peut remettre en cause l'équilibre du budget 2015 voté en décembre. En 2013, profitant d'un taux de change avantageux, le Quai d'Orsay avait effectué des achats de devises de plusieurs centaines de millions d'euros qui ont lui permis de réaliser une économie de 18 millions l'an dernier.

" Compte tenue de l'évolution du cours des monnaies, cette opération ne pourra probablement pas être répétée en 2015, ce qui diminuera d'autant les ressources du ministère par rapport à 2014", avertissait le rapporteur du budget.

En cette période d'économies budgétaires, Laurent Fabius va donc devoir dégager des marges de manoeuvre financière durant l'année pour faire face à la baisse de l'euro. 

Patrick Coquidé