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Finances publiques

Les collectivités territoriales à bout de souffle

Un grand nombre de communes se voient dans l'obligation de rogner sur leurs investissements.

Un grand nombre de communes se voient dans l'obligation de rogner sur leurs investissements. - Gaizka Iroz - AFP

Conséquence de la baisse des dotations de l’Etat, les investissements des collectivités sont en chute libre. Bon nombre d’entre elles se trouveraient en effet dans une situation financière insurmontable, selon un rapport.

Après les maires, l'alerte est maintenant donnée par les sénateurs. La réduction des dotations de l'Etat aux collectivités territoriales entraîne une forte baisse de leurs investissements, et plongent nombre d'entre elles dans une situation financière jugée "insurmontable", selon un rapport parlementaire sur l'évolution des finances locales qui sera mis en ligne lundi.

Pour rappel, après une première baisse en 2014, le gouvernement a mis en oeuvre une nouvelle diminution des dotations aux collectivités de 11 milliards d'euros de 2015 à 2017, dans le cadre de sa politique d'économies budgétaire.

"Ça devient insupportable"

Sans remettre en cause la nécessité de réduire les dépenses, les rapporteurs soulignent l'"absence de visibilité" des élus locaux, qui "décrochent" face à un système complexe. "A force de modifier le fonctionnement des collectivités locales, les élus ne savent plus où ils en sont", résume Jacques Mézard (RDSE, Radical de gauche), pour qui "il ne s'agit pas de dire qu'il ne faut pas réformer, mais à force de réformer en continu, ça devient insupportable".

Les sénateurs demandent en priorité que les préfets adressent à chaque collectivité - communes, départements, régions... - "une information précise concernant la baisse des dotations et les éléments chiffrés lui permettant d'en évaluer l'impact".

Conséquence des réductions de crédits, "les deux tiers des collectivités locales vont se trouver structurellement dans le mur en 2017", résume Philippe Dallier (Les Républicains), de la Délégation aux collectivités territoriales du Sénat, à l'origine du rapport.

Rogner sur les dépenses de fonctionnement ou sur l'investissement

Pour compenser la baisse des dotations, 44% des collectivités ont choisi "en priorité" de réduire leurs dépenses d'investissement dans leur budget 2015, selon une enquête Ifop réalisée auprès de plus de 3.000 collectivités. Un tiers d'entre elles (32%) ont choisi de réduire d'abord leurs dépenses de fonctionnement et 13% ont opté pour une hausse de la fiscalité. Jusqu'à présent, elles sont en revanche très peu nombreuses (5%) à choisir en priorité de s'endetter pour dégager de nouvelles ressources.

Au total, selon le rapport sénatorial, 62% des collectivités ont déjà baissé leurs dépenses d'investissement en 2015, dont un tiers ont voté une baisse d'au moins 10%. Les équipements en général, les travaux de voirie, l'entretien des bâtiments, sont les premiers touchés. Et seules les régions semblent avoir pu "relativement préserver leur niveau d'investissement".

Conséquences sur l'emploi

Autres secteurs affectés par les baisses de dotations : les subventions aux associations et les services administratifs et des personnels. Selon les rapporteurs, les élus locaux sont par ailleurs "très sceptiques quant à la nécessité et l'efficacité de la baisse des dotations de l'Etat" : 63% d'entre eux jugent qu'elle n'est pas nécessaire et 68% qu'elle n'est pas efficace. Ce scepticisme est encore plus fort (78%) sur la capacité de la réforme territoriale à générer des économies. "Si les choses ne sont pas redressées, beaucoup de communes vont être dans des difficultés gravissimes", note Jean-Marie Bockel (UDI), qui préside la délégation sénatoriale.

Selon le rapport, la baisse des investissements risque en particulier d'avoir des retombées importantes sur le secteur de la construction et des conséquences négatives pour l'emploi. Les rapporteurs mettent notamment en garde sur "la situation financière très délicate des départements", en raison de l'"effet de ciseaux" entre baisse des recettes et hausse des dépenses sociales. 

Y.D. avec AFP