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Economie et Social

Loi Macron: les députés se penchent sur le travail le dimanche

"Près de 30% des salariés travaillent déjà le dimanche", a souligné le ministre de l'économie Emmanuel Macron

"Près de 30% des salariés travaillent déjà le dimanche", a souligné le ministre de l'économie Emmanuel Macron - Bercy

La commission spéciale de l'Assemblée nationale a commencé samedi à minuit l'examen des dispositions concernant le travail dominical.

Les députés de la commission spéciale sur la loi Macron ont commencé samedi 17 janvier à minuit à s'attaquer à la réforme des règles d'ouverture des commerces le dimanche, un point très controversé au sein de la gauche.

La discussion générale au lieu tard samedi, et les amendements sont examinés ce dimanche.

"La réforme prévoit que les ouvertures (le dimanche) seront soumises à un accord de branche, d'entreprise ou de territoire sur les compensations. Sans accord il n'y aura pas d'ouverture", a plaidé samedi le ministre de l'Economie Emmanuel Macron. Elle va aussi "garantir l'homogénéisation des règles de compensation", a-t-il jugé, en rappelant que "près de 30% des salariés travaillent déjà occasionnellement ou régulièrement" le dimanche.

Des sondages favorables

Qualifiant la loi Mallié de "largement illisible et injuste", les salariés ne bénéficiant pas tous de compensations pour le travail du dimanche, Emmanuel Macron a ensuite insisté dimanche sur "les changements de comportements de consommation" avec l'essor du commerce en ligne, sur les sondages montrant qu'une majorité de Français seraient désormais en faveur du travail dominical ou sur des différences entre secteurs d'activité "devenues intenables" (bricolage, etc) pour justifier son texte.

Il a vanté une "liberté rendue aux élus pour s'adapter aux territoires et à leurs réalités" avec la possibilité "en fonction de leurs écosystèmes" d'ouvrir sans que cela "ne détricote le commerce de centre-ville" jusqu'à 12 dimanches par an, nombre issu de la "longue consultation menée par Jean-Paul Bailly, pas un crypto-libéral mais un ancien haut fonctionnaire et dirigeant d'entreprise".

Justice sociale

Le texte est porteur de "justice sociale", a encore assuré le ministre, affirmant que sans accord de branche, d'entreprise ou de territoire, il n'y aura pas d'ouverture le dimanche et qu'il y aura "compensations" et "garanties" pour les salariés.

Mais M. Macron s'est montré défavorable à l'inscription dans la loi d'un plancher de compensations, réclamé notamment par le Front de Gauche, affichant le souci de laisser le dialogue social primer et observant que certains commerces de zones touristiques ne peuvent pas payer double. A ses yeux, "cette réforme permet de s'adapter au réel sans être une grande libéralisation" et "rendra les choses meilleures".

Samedi, le rapporteur Stéphane Travert (PS) avait assuré: "nous sommes partis d'un point important: l'ouverture dominicale doit rester exceptionnelle et nous devons partir de la réalité des territoires". Il va notamment proposer de supprimer les cinq dimanches donnés de droit aux commerces.

Echanges à gauche

La création de zones touristiques internationales, cruciales pour "optimiser" l'atout touristique français pour le ministre, a suscité nombre d'échanges, surtout à gauche. Jacqueline Fraysse (Front de Gauche) ou encore les PS Sandrine Mazetier et Karine Berger se sont inquiétées du "flou" de la définition de zones ouvertes "7 jours sur 7 et 24 heures sur 24" et de l'absence de compensations en salaire ou en repos pour les salariés. Opposé à ces ZTI, l'écologiste Jean-Louis Roumégas s'est montré sceptique sur leur pertinence économique.

Face aux remarques des députés, le ministre a insisté sur les garanties déjà prévues pour les salariés notamment amenés à travailler de 21h à minuit. Il s'est engagé, d'ici le débat dans l'hémicycle, à travailler sur des critères quantitatifs et qualitatifs définissant ces zones et s'est montré ouvert au principe d'une évaluation, par exemple tous les deux ans. De quoi convaincre des élus PS de retirer leurs amendements.

Egalement retirés, des amendements socialistes visant à fixer à au moins 30% la majoration de rémunération pour les salariés travaillant dans des commerces alimentaire d'au moins 400 mètres carrés ouverts le dimanche jusqu'à 13h00.

Seul changement notable de la matinée de dimanche, la commission a étendu à l'intercommunalité la décision d'ouverture du travail dominical, via un amendement PRG.

Les députés divisés

Samedi, les députés UMP présents avaient fait part de leur scepticisme. "Je ne vois toujours pas comment on dépense l'argent le dimanche qu'on n'a pas la semaine", a jugé Jean-Frédéric Poisson qui n'aura cependant "pas un regard malveillant" sur la ZTI à Paris.

Pour la Front de gauche Jacqueline Fraysse, "le repose dominical doit rester un principe essentiel de notre droit, c'est le seul jour de repos commun pour les amis, la famille".

Pour l'écologiste Jean-Luc Roumegas, "c'est un recul pour l'ensemble des salariés".

"Le dimanche, c'est aussi le temps de la citoyenneté", avait renchéri la député PS de Paris Sandrine Mazetier, qui a déploré que "plusieurs milliers de salariés" des grands magasins à Paris n'aient pu participer à la grande marche républicaine du 11 janvier, premier dimanche des soldes.

Monique Rabin (PS, Loire-Atlantique) "n'est pas fan" du texte mais a salué la capacité d'écoute du ministre dans l'élaboration de certains amendements qui sont discutés dimanche. 

Le dispositif de la loi

Le projet de loi du gouvernement prévoit de créer trois nouvelles zones pour réglementer l'ouverture le dimanche dans le commerce. D'abord, les zones commerciales (ZC) et les zones touristiques (ZT), qui vont remplacer les PUCE et "les communes ou zones d'intérêt touristiques" actuelles aux règles très disparates. Et enfin, les zones touristiques internationales (ZTI), essentiellement le boulevard Haussmann et les Champs-Elysées à Paris. Le travail y sera possible le dimanche et le début de la période de nuit y sera porté à minuit, au lieu de 21H00 actuellement.

Par ailleurs, le texte prévoit aussi l'ouverture, pour les commerces non alimentaires cinq dimanches par an sur simple demande (et non sur autorisation préalable) et jusqu'à 12 dimanches par an au total.

J. H. avec AFP