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Renégocier une partie de la dette, la suggestion risquée de Benoît Hamon

Benoît Hamon envisage de renégocier une partie de la dette

Benoît Hamon envisage de renégocier une partie de la dette - Philippe Huguen - AFP

Le candidat du PS à l'élection présidentielle a indiqué en filigrane lundi qu'il pourrait renégocier une partie de la dette française détenue par "les banquiers". Une mesure jugée "pas sérieuse" et "dangereuse" par les invités de l'émission Les Experts de BFM Business.

Le candidat PS à l'élection présidentielle Benoît Hamon a suggéré lundi de renégocier une partie de la dette tricolore. "J'assume qu'en matière de dette et de déficit il faut regarder ce que nous pourrons rembourser, ce que nous ne pourrons pas rembourser. Il y a une dette vis-à-vis de la planète que nous ne pouvons pas rembourser. Il y a une dette vis-à-vis des banquiers que nous pouvons tout à fait renégocier", a-t-il affirmé sur France Inter.

L'esprit de Thomas Piketty

Une inflexion qui traduit en fait la volonté de l'économiste Thomas Piketty, membre de l'équipe de campagne de Benoît Hamon, de s'affranchir des règles édictées par la Commission européenne.

"Avant de rembourser la dette, il faut retrouver un niveau de production de richesse suffisant. Compte tenu du niveau de dette en Europe du Sud, mais aussi dans d'autres pays comme la France, dire que l'on va s'en sortir sans moratoire en consacrant au remboursement 2% à 4% d'excédent budgétaire pendant 50 ans, cela ne tient pas la route", explique d'ailleurs ce même Thomas Piketty aux Échos. L'économiste affirme ainsi qu'en 2017 "nous nous affranchirons du Pacte de stabilité de façon raisonnable pour financer la croissance".

Les épargnants derrière les banquiers

Ainsi, s'il est élu, Benoît Hamon envisage une restructuration de la dette française. Invité de l'émission Les Experts, l'ancien ministre de l'Économie et des Finances et président de Latour-Capital Alain Madelin n'a pas souhaité s'épancher sur le sujet. "Ce n'est pas sérieux et cela ne mérite pas davantage de commentaires", a-t-il affirmé.

L'économiste et professeur à l'ESCP Europe Jean-Marc Daniel a lui dénoncé "une approche dangereuse sur le plan économique". "On a une présentation des choses qui revient à dire 'la dette c'est la finance, elle est entre les mains des banquiers, on va les punir. Or la dette n'est pas entre les mains des banquiers. Une fois que ces mêmes banquiers ont acheté de la dette, ils en font des produits financiers et, in fine, la dette est entre nos mains, celles des épargnants", a-t-il souligné.

Jean-Marc Daniel a pris pour exemple la restructuration de la dette grecque, qui était détenue par les banques chypriotes. L'effacement de dette décidé en 2011 avait provoqué, par ricochet, la faillite des banques de Chypre. Or le système bancaire chypriote "c'était les oligarques russes, certes, mais aussi le paysan et le citoyen chypriote", a-t-il rappelé. "Le banquier est un intermédiaire, celui qui détient la dette c'est l'épargnant", a conclu Jean-Marc Daniel.

Le député PS Christophe Caresche, un socialiste réformiste qui a rallié Emmanuel Macron, a lui dénoncé sur CNews des propos "extrêmement graves". "Il ne faut pas jouer avec ce genre de choses, c'est un sujet extrêmement sensible, la France doit rembourser ses créanciers", a-t-il ajouté.

J.M.