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Un salaire d'appoint pour doper la mobilité en France

Un salaire d'appoint et un accès plus large à la formation favoriseraient les mobilités choisies, qu'elles soient interprofessionnelles ou géographiques, estime le Conseil d'analyse économique dans un rapport publié jeudi. /Photo d'archives/REUTERS/Andrew

Un salaire d'appoint et un accès plus large à la formation favoriseraient les mobilités choisies, qu'elles soient interprofessionnelles ou géographiques, estime le Conseil d'analyse économique dans un rapport publié jeudi. /Photo d'archives/REUTERS/Andrew - -

Un salaire d'appoint et un accès plus large à la formation favoriseraient les mobilités choisies, qu'elles soient interprofessionnelles ou...

PARIS (Reuters) - Un salaire d'appoint et un accès plus large à la formation favoriseraient les mobilités choisies, qu'elles soient interprofessionnelles ou géographiques, estime le Conseil d'analyse économique dans un rapport publié jeudi.

La France s'est engagée dans un processus de "flexisécurité" mais "la flexibilité a augmenté plus vite que la sécurité des travailleurs", constatent ses auteurs, Mathilde Lemoine (HSBC France) et Etienne Wasmer (Sciences Po Paris-OFCE).

Avec 15,3% des salariés en contrats temporaires en 2007, contre 9,6% en 1990 et 6,6% en 1982, le marché de l'emploi a certes accru sa vitesse d'ajustement aux variations cycliques mais au prix de fortes inégalités qui, au bout du compte, réduisent sa performance globale, constatent-ils.

Les salariés précaires ou flexibles ont peu accès à la formation, les entreprises n'ayant aucun intérêt à les former puisqu'elles ne les gardent pas. Et pour les salariés qui en bénéficient, les formations sont souvent trop spécialisées, leur permettant d'être plus efficaces à leur poste mais non de développer des compétences générales.

Avec peu d'espoir d'améliorer leur employabilité, les conséquences sont des pertes de "capital humain" pour ces travailleurs et pour l'économie dans son ensemble.

"Qui dit amélioration du capital humain dit amélioration du potentiel de croissance", a souligné Martine Lemoine lors d'une présentation à la presse.

ENTREPRISES RESPONSABILISÉES

A l'opposé de la précarité, le fait que la protection de l'emploi soit basée sur l'ancienneté représente, après un certain temps passé dans l'entreprise, une désincitation puissante à la mobilité, observe le rapport en demandant que l'ancienneté retenue soit désormais celle en activité, et non plus dans l'entreprise.

Pour encourager les mobilités choisies, le document préconise le versement d'un complément salarial, pendant un à deux ans et sous conditions de ressources du ménage, aux personnes qui font le pari de changer de secteur ou d'entreprise et qui, de ce fait, subissent une baisse de salaire.

Les entreprises, de leur côté, seraient responsabilisées en matière d'employabilité de leurs salariés avec l'instauration d'un bonus-malus sur les cotisations d'assurance-chômage et sur leurs obligations de reclassement. En fonction de la part des salariés formés et du caractère diplômant ou certifiant des formations, elles paieraient plus ou moins.

"Le reclassement des salariés est d'autant plus facile que leur employabilité a été maintenue, c'est-à-dire qu'ils ont pu développer leurs compétences générales", note le rapport.

La qualité même des formations, trop spécialisées et souvent inaccessibles aux salariés des petites entreprises ou aux travailleurs peu qualifiés, est mise en accusation.

UN COÛT DE 8 MILLIARDS D'EUROS

Pour remédier à ces déséquilibres, le rapport propose d'étendre les contrats de transition professionnelle (CTP) - actuellement limités aux salariés menacés de licenciement économique dans certains bassins d'emploi - à tous les travailleurs en contrat temporaire et de les généraliser sur l'ensemble du territoire.

"Quand on voit que 6% des salariés bénéficient de 50% des formations, est-ce que c'est vraiment efficace ?", a noté Mathilde Lemoine en prônant une réorientation vers les formations certifiantes et diplômantes.

Les salariés seraient également invités à se former en amont avec une meilleure information et la création d'un "chèque formation" librement utilisable.

Le rapport pousse la réflexion jusqu'aux difficultés de logement auxquels sont confrontés les travailleurs qui changent de ville, de département ou de région, proposant des formes de baux plus souples pour aider les chômeurs et les salariés à faible revenu à déménager.

Les auteurs chiffrent le coût de l'extension du CTP à cinq ou six milliards d'euros, à quoi s'ajouterait 1,5 milliard au maximum pour les aides à la mobilité et les compléments salariaux, soit un total de huit milliards d'euros dont le financement serait assuré par le redéploiement d'autres moyens.

"Si on regarde les moyens de la formation professionnelle et d'autres dispositifs, on a largement de quoi faire une flexisécurité à la française", a affirmé Mathilde Lemoine.

Véronique Tison, édité par Yves Clarisse