BFM Business
International

Comment fait la Corée du Nord pour s'offrir un arsenal aussi redoutable

-

- - AFP

Avec sa capacité nucléaire, son armée d'un million d'hommes et ses dépenses militaires estimées à 20% de son PIB, la Corée du Nord fait figure d'épouvantail. Mais la Corée du Sud, plus riche, reste bien mieux armée. Explication.

L'armée nord-coréenne est-elle si puissante que ça? Sur le papier en tout cas, la force militaire du Juche (le nom de l'idéologie communiste nord-coréenne) a de quoi effrayer. La Corée du Nord dispose d'un armement non-conventionnel (elle a effectué six tests nucléaires dont un qui serait vraisemblablement une bombe H ainsi que des milliers de tonnes d'armes chimiques), son armée est composée d'un peu plus d'un million d'hommes (cinq fois plus que les forces dont dispose la France), huit millions de réservistes, 70 sous-marins, plus de 4000 chars, des missiles balistiques intercontinentaux ou encore 545 avions de combats.

A priori, la Corée du Nord dispose donc d'une des forces de frappe les plus puissantes de la planète. Un arsenal unique au monde pour un pays aussi pauvre. Si le régime de Pyongyang ne publie pas de statistiques économiques, le PIB de la Corée du Nord serait selon la Banque centrale sud-coréenne de 24 milliards d'euros. Ce qui situerait cette nation de 25 millions d'habitants au même niveau que le royaume de Bahreïn. 

20 à 25% du PIB consacré à l'armée

Comment fait alors le pays pour disposer d'un tel arsenal? Il consacre une part colossale de son PIB à l'effort militaire. Selon la CIA, l'armée représente entre 20 et 25% de la richesse nord-coréenne. Hormis l'Erythrée, aucun pays au monde ne s'impose un tel effort.

Au regard de ces données, la Corée du Nord semble donc mieux armée que sa voisine du sud. Séoul ne dispose en effet "que" de 495.000 hommes, ne consacre que 2,5% de son PIB aux dépenses militaires et n'a pas d'arsenal d'armes non-conventionnelles comme Pyongyang. 

Pourtant, la puissance militaire de la Corée du Nord doit être relativisée. Ainsi si l'effort militaire de sa soeur ennemie est moindre en pourcentage, il est bien supérieur en valeur. Selon le site Global Fire Power, Séoul consacre l'équivalent de 43,8 milliards de dollars à son armée, un budget six fois supérieur à celui de Pyongyang estimé à 7,5 milliards de dollars. Le PIB sud-coréen est en effet cinquante fois supérieur à celui de son voisin. 

De plus, l'état de l'arsenal est, à en croire de nombreux spécialistes, plus qu'incertain. Notamment en ce qui concerne les forces aériennes. "Si environ 600 appareils de combat sont alignés, les derniers à être entrés en service l’ont été dans les années 1990", expliquait en 2016 Philippe Langlois, chargé de recherche au Capri dans les colonnes de la revue DSI. Les appareils les plus récents sont des Mig-29 et des Soukhoï Su-25 russes, mais la Corée du Nord n'en possède qu'un cinquantaine.

Une stratégie datant de la seconde guerre mondiale 

Par ailleurs, explique le spécialiste des questions de défense, les pilotes nord-coréens manqueraient cruellement d'entraînement du fait des pénuries récurrentes de pétrole que connaît le pays. Ainsi le nombre d'heures de vol par pilote ne serait en moyenne que de 30 heures par an pour les Nord-Coréens contre 150 heures pour les Français et 180 heures pour les ceux de l'Otan. 

Selon l'ancien général américain James Mark cité par le site We Are The Mighty, "une attaque du Nord sur le Sud lui donnerait un avantage par surprise de quelques jours. La Corée du Nord ouvrirait avec l'artillerie et des roquettes car elle possède la plus grande force d'artillerie au monde avec 10.000 unités environ dans son arsenal." Mais rapidement, l'arsenal aérien sud-coréen reprendrait le dessus, estime James Mark. Appuyé notamment par les troupes américaines stationnées dans le pays (28.500 militaires) et par un armement ultra-moderne constitué de chasseurs F-22 Raptor et de bombardiers B-2 et B-52.

2000 milliards de dollars la réunification des deux Corées

Dans le cadre d'une guerre conventionnelle, estime l'ancien général, "les États-Unis établiraient rapidement une supériorité aérienne alors que les forces terrestres contourneraient la zone démilitarisée fortement défendue. La supériorité technologique, la puissance aérienne et le support d'hélicoptères élimineraient rapidement les formations d'infanterie et leur tactique inspirée de l'époque de la seconde guerre mondiale".

Dans un tel cas de figure, Washington et Séoul n'envisageraient pas pour autant de rassembler les deux Corées. Selon une étude du think tank Rand publiée en 2013, le coût d'une telle réunification serait colossal. Il est estimé à 2000 milliards de dollars en incluant le conflit armé, la reconstruction de toutes les infrastructures, et la remise à niveau de l'économie du pays de Kim Jung-un négligé depuis plus de soixante ans.

Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco