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Comment l'Allemagne veut faire payer ses routes aux automobilistes étrangers

L'Allemagne veut mettre en place un système de vignette dont le montant pourra atteindre 130 euros par an.

L'Allemagne veut mettre en place un système de vignette dont le montant pourra atteindre 130 euros par an. - Franck Leonhardt - DPA - AFP

Le Parlement allemand a adopté, ce 8 mai, un projet décrié de péage automobile pour ses routes et autoroutes. Le dispositif pénalisera en premier lieu les usagers étrangers, dont les frontaliers français, provoquant la colère de Bruxelles et de plusieurs voisins de l'Allemagne.

Le Bundesrat, la chambre haute du Parlement, a donné son feu vert ce vendredi à un texte déjà validé par le Bundestag (chambre basse). Il prévoit d'instaurer courant 2016 sur les autoroutes et routes nationales allemandes une vignette annuelle pouvant atteindre 130 euros.

Ce projet était le cheval de bataille du CSU, petit frère bavarois du parti conservateur d'Angela Merkel. Le CSU avait promis à ses électeurs un péage pour les étrangers, promesse porteuse dans une région où de nombreux habitants paient pour utiliser les autoroutes de l'Autriche et la Suisse voisines. Le passage à l'acte reflète un subtil exercice d'équilibre de la "grande coalition" au pouvoir à Berlin.

Une vignette pour les visiteurs ponctuels

Comme un péage applicable aux seuls étrangers contreviendrait aux règles européennes, le projet retenu est celui d'une vignette électronique à payer par tous. Mais pour s'assurer que les étrangers seront effectivement les seuls à payer en plus, la taxe dont s'acquitte déjà tout propriétaire de voiture en Allemagne sera minorée pour éviter une double charge.

Les visiteurs ponctuels devront s'acquitter quant à eux, pour les seules autoroutes, de 5, 10 ou 15 euros pour une vignette valable dix jours, et de 16 à 30 euros pour une vignette valable deux mois. Pour le moment, en Allemagne, seuls les poids lourds paient un péage. 

Un système jugé discriminant par les voisins de l'Allemagne

Le nouveau mécanisme, passé de justesse au Bundesrat et très critiqué en Allemagne même comme une marotte bavaroise, est aussi dans le collimateur des voisins de l'Allemagne et de Bruxelles, qui s'inquiète d'une discrimination des automobilistes étrangers.

"Ce projet pénalise les Néerlandais", a d'ailleurs regretté dans un communiqué la ministre néerlandaise des Infrastructures et de l'Environnement, Melanie Schultz van Haegen.

"Nous attendons de pied ferme la réaction du commissaire européen (aux Transports, Violeta) Bulc. Sa position est importante pour l'action que nous pourrons mener, conjointement avec d'autres pays voisins de l'Allemagne, afin d'empêcher la création de ce péage", a-t-elle ajouté.

Nous avons "bon espoir que l'Europe s'oppose à cette vignette, sous l'angle de la discrimination", a réagi pour sa part Cédric Rosen, président de l'Association des frontaliers d'Alsace-Lorraine (plus de 6.000 adhérents).

"Sur le principe de non-discrimination et de libre circulation, nous serons vigilants. Nous inciterons les autorités françaises à soulever cette problématique devant les instances européennes", a déclaré à l'AFP Céline Kastner, directrice juridique de l'Automobile Club Association, basée à Strasbourg.

L'Autriche "considère que la décision allemande est contraire au droit européen", selon une porte-parole du ministère autrichien des Transports. "Une fois que la loi sera promulguée en Allemagne, en juin ou en juillet, nous porterons plainte auprès de la Commission européenne, qui aura trois mois pour répondre", a-t-elle indiqué à l'AFP.

C.C. avec AFP