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Mistral russes: regain de pression sur la France

"La France doit interrompre immédiatement la livraison" des Mistral, selon un membre influent du Parlement européen.

"La France doit interrompre immédiatement la livraison" des Mistral, selon un membre influent du Parlement européen. - Rama - Wikimedia - CC

Intellectuels polonais, officiels allemands: la pression des Européens sur la France pour qu'elle renonce à livrer ses Mistral à la Russie s'intensifie. Mais une telle décision coûterait cher à l'Hexagone.

La présidence ukrainienne affirme avoir conclu un cessez-le-feu avec la Russie, pour l'est de l'Ukraine, ce 3 septembre. Un accord démenti par le Kremlin. Dans ces conditions, la vente de porte-hélicoptères français à l'armée russe reste périlleuse. Dans ce dossier, la pression contre la France se fait de plus en plus directe.

Mardi, le chef du plus important groupe politique du Parlement européen l'a exigé clairement: "la France doit interrompre immédiatement la livraison" des deux bâtiments militaires mistral commandés par la Russie au groupe français DCNS.

L'Allemand Manfred Weber, un ténor du parti de la chancelière Angela Merkel, n'a pas de mots assez durs. "Il est temps pour la France de faire preuve d'un peu de cohérence vis-à-vis de la Russie", a-t-il tonné.

La Pologne, seul grand Européen qui commande de l'armement

Lundi, dans un appel retentissant, des intellectuels polonais de premier plan ont mis en garde François Hollande contre "la tentative de faire un pas bien plus grave que la passivité de la France en 1939".

Notez que la Pologne est le seul grand pays de l'Union européenne qui augmente son budget militaire. En livrant ses mistral aux Russes, la France s'aliène ainsi le seul marché européen en croissance.

De toute façon, si le cessez-le-feu annoncé ce matin vient à échouer, le président français sera contraint de prendre en compte cet isolement. Avec des conséquences graves pour les chantiers de ces navires militaires. L'application des principes a toujours un prix.

Lorsque le contrat a été conclu il y a trois ans, pour un montant d'1,2 milliard d'euros, il a été alors affirmé que 1.000 emplois directs seraient pérennisés chez DCNS et son sous-traitant STX. Ce qui induit des milliers de postes de travail à temps plein ou à temps partiel dans les bassins de Saint-Nazaire et de Toulon.

300 salariés sur le carreau?

Sachant que seule la construction d'un des deux navires est achevée, un représentant du personnel explique qu'au moins 300 salariés risquent de se retrouver aussitôt sans travail. Tirer un trait sur un tel contrat entraîne aussi des pénalités financières pour celui qui n'honore pas sa signature. Pénalités qui seraient alors réglées par le contribuable français.

Bien entendu, la 5e puissance économique mondiale a encore les moyens de se le permettre. Mais l'affaire ne s'arrêtera pas en envoyant un chèque de dédommagement à Moscou. D'abord, les Russes ne mettront plus à disposition leurs avions de transport Antonov, qui ont permis d'acheminer les véhicules de combat de l'armée française au Mali. Au-delà, ce sont de très gros acheteurs dans le monde entier qui mettrait désormais en doute la signature française.

En Inde par exemple, où le chef d'Etat-major de l'armée de l'air a indiqué ce 3 septembre que l'accord pour l'achat au français Dassault de 126 chasseurs rafale va intervenir "bientôt". L'Inde, grande démocratie et vieille alliée de la Russie, se poserait alors de sérieuses questions sur la fiabilité de la France. Et elle ne serait pas la seule.

Benaouda Abdeddaïm