BFM Business
Economie et Social

Sortie de l'euro, dette... en Italie, une "ébauche" de programme du futur gouvernement inquiète

Le leader du M5S, Luigi Di Maio, et celui de la Ligue du Nord, Matteo Salvini.

Le leader du M5S, Luigi Di Maio, et celui de la Ligue du Nord, Matteo Salvini. - Tiziana Fabi / AFP

Un document d'accord gouvernemental entre la Ligue et le Mouvement 5 étoiles a fuité dans la presse. Parmi les mesures inscrites, le retour à une souveraineté monétaire et une demande à la BCE d'annuler 250 milliards d'euros de dette. Les deux partis ont confirmé l'existence du texte, mais assurent qu'il a été "amplement modifié" depuis.

Sortie de l'euro, renégociation des traités européens, annulation de 250 milliards d'euros de dette... Une ébauche de "contrat de gouvernement" en Italie entre la Ligue (extrême droite) et le M5S (populiste) publiée par la presse suscite une vague d'inquiétude, même si les deux partis assurent que le document n'a rien de définitif.

Alors que les deux partis négociaient toujours mercredi en vue de former le premier exécutif antisystème depuis la guerre, la publication par le Huffington Post d'un projet de "contrat de gouvernement de changement" a fait l'effet d'une bombe. Pour mémoire, les deux formations sont sorties vainqueurs des élections législatives du 4 mars, mais le scrutin n'a toutefois pas permis à l'une d'elles d'obtenir seule une majorité au parlement, les obligeant à s'allier pour accéder au pouvoir.

Parmi les nombreuses mesures énumérées dans le document de 39 pages figurent l'introduction de mesures "techniques de nature économique et juridique qui permettent aux États membres de sortir de l'Union monétaire, et donc de retrouver leur souveraineté monétaire". 

Un passage évoque aussi la possibilité de demander à la Banque centrale européenne (BCE), dirigée par l'Italien Mario Draghi, d'annuler quelque 250 milliards d'euros de dette italienne détenues sous forme de titres d'État par l'institution de Francfort.

La sortie de l'euro ne serait pas sur la table

Confirmé à l'AFP par une source proche du M5S, ce document serait une "ébauche" datant de lundi matin. Mais il serait depuis "dépassé" et "amplement modifié", ont rapidement réagi dans un communiqué la Ligue et le M5S.

Leurs représentants ont tenté d'apaiser les esprits en expliquant que la version du "contrat de gouvernement" sur laquelle il travaillaient ne correspondait "pas à celle qui a été publiée" par la presse. De nombreux contenus ont "radicalement changé" en particulier sur l'euro, les deux partis ayant "décidé de ne pas mettre en discussion la monnaie unique", ont-ils assuré.

Quant à l'idée de demander à la BCE de tirer un trait sur une partie de la dette, elle "n’a jamais figuré dans un quelconque projet officiel", a affirmé selon Reuters l'économiste Claudio Borghi, porte-parole de la Ligue. "Ce que nous proposons, c’est que pour les besoins du Pacte de stabilité, la dette rachetée dans le cadre du QE (le programme de rachat de titre d'État de la BCE, ndlr) ne soit pas prise en compte dans le ratio dette/PIB."

La Bourse en net recul

Malgré ces bémols, le texte qui a fuité a tout de même suscité une avalanche de réactions dans la presse, journalistes et experts critiquant en particulier sa "naïveté". "Détruire l'Italie pour faire du tort à l'Europe", a notamment commenté le quotidien La Repubblica, proche de la gauche.

Les marchés financiers n'ont pas apprécié non plus: la Bourse de Milan était recul de 1,81% à la mi-journée, pire performance des bourses européennes, tandis que le spread - l'écart très observé en Italie entre les taux d'emprunt italien et allemand à dix ans s'établissait à 150 points, en nette hausse par rapport aux 131 points de mardi soir.

Mardi, les chefs de file des deux partis Matteo Salvini (Ligue) et Luigi Di Maio (M5S) ont une nouvelle fois annoncé l'imminence d'un accord, promettant d'aller l'exposer aux Italiens dès ce weekend sur des stands installés à travers la péninsule.

Les pourparlers, qui avaient semblé sur le point d'aboutir lundi, ont dû être prolongés quand Matteo Salvini a posé ses conditions en matière de lutte contre l'immigration ou de politique européenne.

J.-C.C. avec AFP