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Les Suisses rejettent le revenu de base pour tous

"Un vote était organisé ce dimanche sur l'instauration d'un revenu universel pour tous versé par l'Etat. "

Les Suisses ont rejeté massivement dimanche 5 juin, sans surprise, la création d'un revenu de base pour tous, un projet révolutionnaire qui a suscité de vifs débats, selon les premières tendances données par l'institut de sondage gfs.bern pour la télévision publique. Les bureaux de vote ont fermé leurs portes à midi, et les résultats définitifs ne seront connus que dans la soirée.

Toutefois, selon une projection nationale diffusée par la télévision, 78% des Suisses auraient rejeté le projet de revenu de base, alors qu'ils approuveraient à 66% une réforme du droit d'asile et à 61% une loi sur l'autorisation du diagnostic préimplantatoire.

"Demi victoire"

Malgré l'échec sans appel, les organisateurs de la consultation se sont dit néanmoins satisfaits du résultat et célébraient leur "demi-victoire". "On est très contents", a déclaré dimanche à l'agence suisse ATS l'un des pères de l'initiative, Ralph Kundig, rappelant qu'ils étaient partis "de très loin".

Sergio Rossi, professeur d'économie et membre du comité de soutien au RBI, préfère lui aussi voir le verre à moitié plein. "Une personne sur cinq a voté pour le revenu inconditionnel de base, il s'agit déjà d'un succès", a-t-il commenté à l'ATS. Pour lui, l'important est que les citoyens commencent à réfléchir à cette idée, "qu'il faudra tôt ou tard mettre en oeuvre". Il attend notamment de connaître la proportion des jeunes ayant voté en faveur du RBI.

Coût de 22 milliards d'euros par an

L'initiative populaire "pour un revenu de base inconditionnel" (RBI) proposait de verser une allocation universelle chaque mois à tous les Suisses et aux étrangers vivant dans le pays depuis au moins 5 ans, qu'ils aient ou non déjà un emploi. Le montant envisagé par le groupe non politique à l'origine de l'initiative était de 2.500 francs suisses (2.260 euros) par adulte -un montant très faible pour vivre en Suisse- et 650 francs suisses pour chaque mineur. Cela nécessiterait un budget supplémentaire d'environ 25 milliards de francs suisses (22,6 milliards d'euros) par an, financé par de nouveaux impôts ou taxes.

Pour la majorité des Suisses qui vénèrent la valeur travail, recevoir de l'argent sans contrepartie est inconcevable. Il faut se souvenir qu'en 2012 déjà, ils avaient refusé de porter leurs congés payés de 4 à 6 semaines, craignant une baisse de leur compétitivité.

"Les Suisses ont jugé dimanche de façon réaliste", a commenté sur la chaîne RTS le politologue Andreas Ladner, de l'université de Lausanne. "Etre payé sans travailler, ça aurait été un grand pas. L'initiative n'était pas très claire, elle était surtout destinée à alimenter une discussion", a-t-il ajouté. 

"Un vieux rêve un peu marxiste"

"C'est un rêve qui existe depuis longtemps", mais qui est devenu "indispensable" face au chômage élevé provoqué par la robotisation croissante, avait expliqué à l'AFP l'un des pères de l'initiative, Ralph Kundig.

Le gouvernement et la plupart des partis politiques avaient dénoncé un projet utopique et trop coûteux. "C'est un vieux rêve, un peu marxiste. Pleins de bons sentiments irréfutables mais sans réflexion économique", avait déclaré à l'AFP le directeur du Centre international d'études monétaires et bancaires à Genève, Charles Wyplosz. Selon lui, si le lien entre la rémunération et le travail est coupé, "les gens en feront moins". 

J. H. avec AFP