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Travailleurs détachés: quand des Français sont employés... en France

La directive européenne sur le détachement de travailleurs permet à des Français de travailler sur le sol français en évitant à l'entreprise qui les emploie de verser des cotisations sociales en France.

La directive européenne sur le détachement de travailleurs permet à des Français de travailler sur le sol français en évitant à l'entreprise qui les emploie de verser des cotisations sociales en France. - -

Dans l'Hexagone, la deuxième communauté de travailleurs détachés est… française. Ils passent par les agences d'intérim de pays dont les charges sociales sont moindres, comme le permet la directive européenne sur le détachement.

Un sommet des ministres européens des Affaires sociales se tient ce lundi 9 décembre pour examiner le dossier des travailleurs détachés. Les 28 pays de l'Union doivent trouver un accord pour réformer la directive de 1996 qui encadre le détachement pour éviter les abus.

Un exemple de dérive légale donc est celle consistant à détacher un travailleur dans son propre pays. La France ne fait pas exception dans ce domaine: la deuxième communauté de travailleurs détachés sur le sol français... est française!

Ces salariés empruntent les mêmes chemins que ceux de l'évasion fiscale. Direction donc, le Luxembourg, où les agences d'intérim ont flairé l'opportunité. Un travailleur français s'inscrit dans une agence de travail temporaire luxembourgeoise. L'agence en question le place sur un chantier en France. Par exemple dans l'Est, près de la frontière.

L'entreprise et l'agence gagnante, le salarié et l'Etat perdant

Selon la législation en cours, l'agence d'intérim rémunère le salarié selon les conditions de travail et de salaire françaises, c'est la règle. En revanche elle ne paiera pas les charges sociales qui s'appliquent en France, mais celles en vigueur au Luxembourg, beaucoup plus faibles.

Au final, l'agence d'intérim et l'entreprise utilisatrice sont gagnantes. Contrairement à l'employé, qui pendant ce temps-là, ne cotise pas en France, ni pour sa retraite, ni pour son assurance maladie, ni pour le chômage.

L'autre perdant, c'est bien sûr l'Etat français qui voit filer un montant non négligeable de cotisations sociales. On estime à près de 19.000 le nombre de français détachés dans leur propre pays.

Des recours juridiques existent néanmoins. Ryanair avait notamment usé de cette pratique pour faire travailler des salariés français à l'aéroport de Marseille aux conditions du code du travail irlandais, là où se trouve le siège de la compagnie aérienne low cost. Une affaire pour laquelle le groupe a été condamné en octobre à verser plus de 10 millions d'euros de dommages et intérêts.

Isabelle Gollentz et BFMbusiness.com