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Fiscalité

Démarrage compliqué pour le PEA-PME

"Ce dispositif a été un feu de paille".

"Ce dispositif a été un feu de paille". - Philippe Huguen - APF

Ce dispositif est né en mars 2014. A l'époque, les prévisions se chiffraient en milliards. Un an plus tard, la collecte nette atteint seulement les 226 millions d'euros.

Le PEA-PME souffle sa première bougie. Et on ne peut pas dire que sa première année d'existence ait suscité beaucoup d'enthousiasme. Ce dispositif permet d'orienter l'épargne des Français vers les entreprises de taille moyenne ou intermédiaire.

Pour sa naissance effective, début mars 2014, une fois paru le décret d'application de ce dispositif promulgué le 1er janvier, les prévisions se chiffraient en milliards: un seul chez les prudents et cinq pour les plus enthousiastes. La réalité des mois plus tard se compte en millions: 226 depuis le décret, selon les calculs d'Arkeon Finance spécialiste du secteur, ce qui suscite logiquement des déceptions.

"Ce dispositif a plutôt été un feu de paille et l'attente suscitée n'a pas été satisfaite", lâche Sébastien Faijean, directeur associé chez IDMidCaps. "Les premiers résultats ne sont pas à la hauteur des prévisions faites au départ, mais elles étaient sans doute optimistes", relève de son côté Aymar de Léotoing, chez Arkeon Finance.

Situation complexe

Car si les principaux critères du dispositif semblaient simples - plafond de 75.000 euros pour des titres de sociétés comptant 5.000 salariés et un chiffre d'affaires annuel inférieur à 1,5 milliard ou un total de bilan de 2 milliards maximum -, la situation devenait plus complexe pour une entreprise avec des filiales ou dépendant d'un autre groupe.

Ce dernier point a nécessité des clarifications, Bercy demandant finalement aux sociétés de déclarer elles-mêmes leur éligibilité, en confiant à l'opérateur boursier Euronext le soin de centraliser. Quand tout a été fin prêt, les marchés sont devenus turbulents. "Les investisseurs ont retrouvé leurs réflexes et n'ont pas pris le risque d'aller sur un nouveau segment", explique Cyril Vial, gérant spécialisé sur les petites et moyennes valeurs chez HSBC.

Sébastien Faijean et Aymar de Léotoing évoquent également la frilosité des banques et des courtiers en ligne. Selon Sébastien Faijean, "les Français ne privilégient pas les investissements en Bourse" et "on ne peut pas faire boire un homme qui n'a pas soif!" "Il y a eu beaucoup d'effervescence au départ avec des chiffres annoncés sans doute un peu trop ambitieux (...) mais ce n'est absolument pas une déception", estime pour sa part Stéphanie Patel, directrice développement produit de HSBC.

"L'un des outils les plus performants"

"Il y a eu quelques retards au démarrage du fait de la difficulté d'interprétation du décret d'application", mais "après quelques mois d'existence, la situation est encourageante, même s'il ne faut pas encore crier victoire et relâcher les efforts", note également Eric Forest, président d'EnterNext, entité dédiée à ces entreprises chez Euronext. Car "on ouvre pas un PEA-PME, comme on ouvre un Livret A", il doit s'intégrer "dans une construction globale de patrimoine" et nécessite du temps, rappelle Stéphanie Patel. S'il offre généralement des rémunérations supérieures, le marché visé est en effet souvent plus délicat à gérer.

"Il y a moins d'informations disponibles, moins d'échanges, ce sont des valeurs sur lesquelles on ne peut pas papillonner", détaille Cyril Vial. "C'est un investissement un peu plus risqué, mais les performances sur de longues périodes sont significativement plus élevées", explique aussi Sébastien Faijean. En 2014, l'indice CAC 40 des plus gros groupes n'a ainsi pas progressé tandis que celui des petites et moyennes entreprises (CAC mid&small) a gagné plus de 8%.

Autre écueil: puisqu'il n'est pas possible de limiter ce type de dispositif aux entreprises nationales, les montants investis l'était "à 58% sur des actions françaises" fin décembre, selon Arkeon. Pour Eric Forest, ce dispositif n'en reste pas moins "l'un des outils les plus performants pour accompagner le développement des petites et moyennes valeurs".

"Le dispositif est bon en soi car il permet de flécher l'épargne des Français vers les PME", estime aussi Aymar de de Léotoing. "Pour l'investisseur qui voit la Bourse comme un moyen de s'enrichir rapidement, c'est perdu", résume Cyril Vial, "mais le potentiel de croissance des petites valeurs est réel" et par ailleurs "tout le monde sait bien que ce sont les petites entreprises qui créent des emplois".

D. L. avec AFP